En Turquie, la nouvelle année scolaire a été marquée par de tout nouveaux programmes scolaires. Les autorités turques affirment que leur éducation devrait mettre l’accent sur les valeurs humaines, mais des opposants dénoncent un système machiste qui tente de nier la science. Par exemple, la théorie de l’évolution de Charles Darwin n’est plus enseignée dans les écoles turques. Le darwinisme jouissait déjà d’une faible popularité en Turquie. Un sondage de 2010 avait montré que 6 personnes sur dix se disaient créationnistes. Mais désormais, la théorie de l’évolution est totalement absente des programmes scolaires turcs. Les autorités turques affirment que ces concepts dépassent la capacité de compréhension des jeunes enfants. En revanche, l’accent est davantage porté sur les valeurs islamiques.Ainsi, le concept de djihad trouvera maintenant sa place dans l’éducation des enfants qui fréquentent les écoles imam hatip, destinées à former les futurs imams. Le ministère de l’éducation turc explique que ce terme, qui se réfère d’abord à « une lutte personnelle contre le péché », est souvent dévoyé. En outre, ils y apprendront que les musulmans doivent éviter de se marier avec des personnes athées, et que les femmes doivent obéir à leur mari.Les imam hatip, qui accueillaient 60 000 enfants en 2002, en formeront plus de 1,1 million cette année. Ainsi, ces écoles assureront l’éducation d’un dixième de la population totale de l’enseignement public. Pour favoriser leur essor, l’âge minimum d’entrée a été abaissé de 14 à 10 ans, et leur implantation a été favorisée dans les zones à faibles populations.
Une génération de jeunes Turcs pieux
Le président turc Recep Tayyip Erdogan a depuis longtemps fait savoir qu’il voulait former une génération de jeunes Turcs pieux. A cet effet, une plus grande coopération a été développée avec les organisations islamiques et le ministère des Affaires religieuses, avertissent des enseignants progressistes. Une nouvelle loi stipule également que les nouvelles écoles devront être dotées d’une salle de prière séparant les filles des garçons. « L’interférence de la religion dans l’éducation n’a jamais été aussi visible et aussi profonde », déplore Batuhan Aydagul, membre du think tank stambouliote Education Reform Initiative.La Turquie a réalisé d’importants progrès économiques au cours de la période écoulée. La pauvreté a reculé, et de plus en plus d’enfants ont eu accès à l’école, en particulier les filles.Mais cet essor vertueux semble stoppé depuis plusieurs années. Les tests internationaux du PISA ont révélé en 2015 que les performances de la Turquie en matière d’éducation avaient plongé. Au sein de l’Organisation pour la Coopération et le Développement économiques, la Turquie était classée avant dernière. Ces mauvais résultats sont probablement liés au choix de privilégier l’apprentissage par cœur, plutôt que la pensée critique, affirment les détracteurs du gouvernement Erdogan.Des parents turcs se plaignent des enseignants incompétents et des classes surchargées. L’éducation a également été gravement touchée par l’impact du coup d’Etat manqué contre Erdogan en juillet de l’année dernière. Trente mille enseignants ont été licenciés parce qu’ils étaient soupçonnés d’être des sympathisants dissidents.En conséquence, de plus en plus de Turcs fortunés décident d’envoyer leurs enfants dans des écoles privées. La part des écoles privées dans l’enseignement secondaire est passée de 7 % à 20 % en 5 ans.