Les relations entre les États-Unis et la Chine se détériorent de jour en jour, et les deux hyper-puissances pourraient bel et bien en venir aux armes. Une telle guerre ne serait pas le fruit du hasard ou d’un incident accidentel.
L’histoire a toujours démontré que les grandes guerres ne se produisaient pas par inadvertance. La thèse d’une guerre entre les deux nations a récemment été soulevée par l’ancien Premier ministre australien Kevin Rudd, qui s’est appuyé sur les nombreux points de divergence entre les Américains et les Chinois.
Tout comme les grandes puissances du début du 20e siècle, la Chine et l’Amérique pourraient subir le même destin. C’est en tous les cas ce qu’affirme le magazine The Time.
L’exemple de la Première Guerre mondiale illustre très bien ce cas de figure. Plusieurs puissances, notamment (mais pas seulement) l’Autriche, la Hongrie et l’Allemagne persistaient dans des politiques agressives dont elles savaient qu’elles risquaient ‘au mieux’ une guerre localisée et ‘au pire’, une guerre continentale.
Une décision lourde de conséquences
Franklin Roosevelt n’avait pas non plus prévu, une génération plus tard, que la levée d’un embargo pétrolier sur le Japon conduirait à l’assaut aérien de Pearl Harbor. Il avait néanmoins saisi que la guerre était une possibilité si les États-Unis portaient atteinte à l’économie d’un pays qui pillait déjà l’Asie.
Comme l’a démontré l’historien Marc Trachtenberg, les pays évitent une guerre seulement lorsque les États souhaitent à tout prix la contourner, car il n’y a pas de guerre ‘accidentelle’. On pourrait en effet penser qu’une guerre est souvent causée de façon hasardeuse suite à un ‘incident’ mais cette hypothèse n’est en aucun cas universellement partagée. Il n’y a pas de décision plus monumentale que de déclencher un conflit majeur et les chefs d’État en sont conscients.
Comme le souligne l’historien, lors d’un conflit politique, et plus particulièrement en temps de crise, le conflit peut prendre une forme de ‘compétition dans la prise de risque’. Cela peut alors déboucher sur une guerre par le biais d’un processus qui n’est pas entièrement contrôlé, et c’est justement cette incapacité de contrôle qui permet de mettre la pression sur un État adversaire.
Doit-on s’attendre à une guerre?
Les décideurs politiques américains et chinois sont donc conscients des risques. Si les deux parties souhaitent vraiment éviter une guerre, elles trouveront probablement un terrain d’entente.
On ne peut pas forcément en conclure qu’une guerre entre la Chine et les États-Unis n’aura pas lieu. Si la Chine conclut que Taïwan s’éloigne trop du continent sur le plan politique, alors que l’équilibre des pouvoirs évolue en faveur de Pékin sur le plan militaire, elle pourrait décider que la guerre est préférable plutôt que de renoncer à son rêve de réunification. Si les dirigeants chinois craignent que leur pouvoir en interne ne s’effondre, ils pourraient se montrer plus agressifs en cas de crise.
Pékin pourrait même penser que les États-Unis battent en retraite, en se désintéressant de la situation au Japon portant sur des conflits relatifs aux îles Senkaku ou sur le contrôle militaire du récif philippin de Scarborough.
Depuis plusieurs siècles, la Chine et le Japon se disputent en effet la possession de cet archipel perdu en plein Pacifique. Pour contrer les ambitions de Pékin, le gouvernement japonais compte en effet sur son allié américain, mais ce pari pourrait toutefois ne pas être payant
Pékin pourrait alors faire le choix délibéré de rechercher des objectifs clés en recourant à la coercition ou à la force. Si une guerre entre les États-Unis et la Chine résulte d’un tel choix, on ne pourra donc guère parler d’un hasard.
Une solution?
Ces questionnements pourraient-ils déboucher sur une façon d’éviter une guerre dans le Pacifique ? Il serait sans doute opportun d’établir des mémorandums d’accord sur la manière dont les forces militaires qui opèrent à proximité immédiate doivent se comporter, tout comme il est important de créer des mécanismes de communication en cas de crise, et de prendre d’autres mesures.
Le maintien d’un équilibre entre les forces militaires et la perception de l’engagement américain reste néanmoins essentiel: cela dissuaderait les autorités chinoises d’envisager une guerre.
Il s’agit donc d’une tâche lourde. Elle implique non seulement d’injecter des budgets importants, mais aussi de concevoir des concepts opérationnels. Cela nécessiterait aussi le renforcement des alliances américaines, qui se sont dégradées sous l’investiture du président américain Donald Trump.