Paul Magnette se donne deux semaines pour convaincre l’Open VLD et le CD&V: l’aspect financier sera décisif

Se débarrasser de la N-VA délicatement et convaincre l’Open VLD et le CD&V. Si Paul Magnette veut y parvenir, il lui faudra faire des concessions, notamment en termes budgétaire, économique et fiscal.

‘Il est maintenant plus que temps de réussir’: Paul Magnette (PS), sans doute un peu moins confiant ce lundi en conférence de presse que lors de son premier rapport, a voulu accentuer la pression. Les deux protagonistes à amadouer sont toujours les mêmes: l’Open VLD et le CD&V.

Le premier est toujours aussi divisé sur la coalition à adopter au fédéral, entre la ligne pro arc-en-ciel (Somers, De Clercq, Rutten) et la ligne pro-N-VA (Van Quickenborne, De Croo). Le second a réaffirmé sa volonté de ne pas laisser les nationalistes, première force politique de Flandre, sur le carreau. Mais on constatera comme vous que ces deux partis sont toujours autour de la table. Preuve que les lignes peuvent encore bouger. Que les négociations sont toujours en cours.

La pression monte

La pression s’accentue aussi sur les épaules de Paul Magnette. Il ne pronostique d’ailleurs plus ses chances de réussite devant la presse. Cela fait six mois aujourd’hui que nous avons voté et cela fait presqu’un an que nous n’avons pas un gouvernement de plein exercice. Magnette privilégie encore et toujours l’arc-en-ciel. Il ne faut donc pas aller chercher très loin pour savoir à qui les mots suivants s’adressent: ‘Je comprends parfaitement que les partis s’interrogent sur leur avenir et qu’ils aient des considérations stratégiques. Mais ces débats internes ne doivent pas mettre en péril les intérêts de notre pays.’

L’Open VLD et le CD&V sont bien entendu dans le viseur du socialiste. C’est d’eux que dépendra la majorité de la future coalition fédérale, fut-elle minoritaire en Flandre. Rappelons à ce stade qu’un ensemble socialistes-écologistes-libéraux ne disposerait que de 76 sièges sur 150 à la Chambre, soit une majorité très fragile. Intégrer le CD&V a une triple utilité: conforter cette majorité, rendre les partis de Flandre moins minoritaires et sans doute favoriser l’ajout du CDH qui ‘veut faire partie des solutions’.

Voilà pour le contexte. Reste à déterminer l’aspect décisif qui fera ou non basculer l’Open VLD et/ou le CD&V vers l’arc-en-ciel. Celui-ci pourrait être le cadre fiscal, économique et budgétaire du prochain gouvernement fédéral.

Points clés

À ce sujet, les notes de Paul Magnette commencent à fuiter dans la presse. Outre quelques esquisses de mesures concernant les six grands axes des discussions (migration, climat, justice, précarité, modernisation de l’État…), certaines concernent le budget à proprement parler, en plus de quelques guidelines économiques et financières.

  • Le budget ne devra pas forcément être à l’équilibre, même en fin de législature. L’Europe a pressé la Belgique d’agir vite, mais laisse une certaine marge de manœuvre aux États. Le budget doit toutefois montrer ‘une amélioration structurelle’. Rendre progressivement la balance positive – plus de rentrées que de dépenses nettes – semble aussi être un point crucial pour les deux partenaires flamands courtisés.
  • Pour montrer cette amélioration progressive et arriver à une éventuelle balance positive, il faudra passer par certaines mesures structurelles. Et pour l’Open VLD et le CD&V, les priorités vont vers une flexibilisation du marché du travail et la dégressivité des allocations sociales. Deux thématiques peu au goût des socialistes. Jusqu’où pourra aller le PS? La hausse des basses pensions sera-t-elle mise dans la balance?
  • D’un autre côté, les mesures sociales proposées par Paul Magnette coûtent de l’argent. Environ 5 milliards ont déjà été prévus. Le reste devra être trouvé en limitant/rationalisant certaines dépenses ou en créant de nouvelles taxes. Pas le choix. ‘Des propositions ont été faites’, nous explique une source informée. Mais tant le CD&V et l’Open VLD que la N-VA attendent toujours de voir du concret.
  • Paul Magnette a un temps admis en conférence de presse qu’aucune proposition ferme de nouvelles taxes n’avait été laissée sur la table, avant de se rétracter un peu plus tard. Ses notes comportent des pistes. Mais il ne faudrait pas déjà passer, avant l’heure, pour le ‘gouvernement des nouvelles taxes’.

Cet aspect financier est crucial. Car si Paul Magnette veut écarter en douceur la N-VA – le parti de Bart De Wever est toujours autour de la table, même si son désir de confédéralisme n’a été entendu par aucun parti – il devra employer de sérieux arguments économiques pour convaincre l’Open VLD et le CD&V. De quoi trahir le programme des socialistes? Paul Magnette l’a dit lui-même: ‘Je comprends parfaitement que les partis s’interrogent sur leur avenir et qu’ils aient des considérations stratégiques. Mais ces débats internes ne doivent pas mettre en péril les intérêts de notre pays.’

Il faudra forcément mettre de l’eau dans son vin pour sauver le pays.

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