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« Pas de bluff de la part de Poutine » : les quatre façons dont il pourrait utiliser des armes nucléaires, et comment l’Occident pourrait y répondre

« Pas de bluff de la part de Poutine » : les quatre façons dont il pourrait utiliser des armes nucléaires, et comment l’Occident pourrait y répondre
Getty

Nous devons croire Poutine quand il dit que sa menace d’utiliser des armes nucléaires « n’est pas un bluff », écrit Joseph Cirincione, auteur de « Nuclear Nightmares : Securing the World Before It Is Too Late » dans le Washington Post. Cirincione, 72 ans, sait de quoi il parle : il a écrit sept livres sur la prolifération nucléaire et est également l’auteur de plus de huit cents articles et rapports sur la défense et la sécurité nationale. Il envisage quatre scénarios possibles dans lesquels Vladimir Poutine pourrait recourir à l’arme nucléaire, et comment l’Occident répondrait militairement. Et chose remarquable : il ne pense pas qu’il y aurait une riposte immédiate à l’arme atomique.

Selon Cirincione, être le premier à utiliser des armes nucléaires dans un conflit fait partie de la doctrine militaire russe. Les documents militaires russes décrivent en détail comment la Russie, si elle perd un conflit, pourrait utiliser des armes nucléaires pour forcer son ennemi à battre en retraite. Et contrairement aux États-Unis, la Russie révise régulièrement l’utilisation d’armes nucléaires dans ses exercices militaires conventionnels, et l’a fait juste avant l’invasion de l’Ukraine.

Peu probable : une simple démonstration

Selon Cirincione, il existe quatre scénarios dans lesquels Poutine pourrait utiliser des armes nucléaires dans sa guerre avec l’Ukraine. Une première option, dit-il, serait que la Russie fasse exploser une arme nucléaire au-dessus d’une zone inhabitée – par exemple au-dessus de la mer Noire – à titre de démonstration dans l’espoir que l’Occident recule. Une telle démonstration ne nécessiterait pas de réponse nucléaire de la part des États-Unis, selon Cirincione. Pour empêcher une nouvelle escalade, le président Biden pourrait plaider en faveur de l’isolement international de la Russie (par exemple, la Chine et l’Inde prendraient rapidement leurs distances), imposer de nouvelles sanctions extraordinairement sévères et avertir des conséquences désastreuses si la Russie ne s’arrêtait pas à cette manifestation de puissance.

D’ailleurs, l’idée n’est pas nouvelle : faire une démonstration avec une arme nucléaire était aussi sur la table avant Hiroshima. Et selon Cirincione, la Russie pourrait ne pas opter pour ce scénario pour la même raison que les chefs militaires américains en 1945 : ils ont jugé que ça ne serait pas assez choquant.

Le plus probable : une arme nucléaire tactique

Le scénario le plus probable, selon Cirincione, est l’utilisation d’une arme nucléaire tactique. Il s’agit d’une arme nucléaire dont le but est de détruire des cibles militaires proches sur le champ de bataille. Les armes nucléaires tactiques ne sont donc pas destinées à une guerre nucléaire totale, mais à un objectif militaire limité. La Russie pourrait utiliser l’une des ogives de 10 kilotonnes qu’elle peut monter sur certains de ses missiles de croisière à lanceur terrestre, notamment l’Iskander qui a été largement utilisé dans la guerre avec des explosifs conventionnels. Si 10 kilotonnes représentent toujours une explosion énorme – équivalente à 10.000 tonnes de TNT – elle serait faible par rapport aux normes nucléaires. La bombe qui a détruit Hiroshima faisait 15 kilotonnes. La plupart des ogives américaines et russes ont une puissance comprise entre 100 et 1.000 kilotonnes.

La Russie pourrait tirer une telle arme nucléaire tactique sur une cible militaire ukrainienne. L’explosion tuerait des centaines ou des milliers de personnes et causerait des dégâts considérables mais, toujours selon Cirincione, cela ne nécessiterait pas de représailles américaines, du moins pas avec des armes nucléaires. La réponse probable, selon lui, serait une augmentation massive de l’aide militaire à l’Ukraine et éventuellement des attaques conjointes de l’OTAN ou des États-Unis contre les unités russes qui ont lancé l’attaque, mais avec des armes conventionnelles.

Les deux autres scénarios : moins probables mais bien pires

La situation est différente si Poutine choisit de déployer une arme nucléaire stratégique. Nous parlons alors de bombes nucléaires de 50 ou 100 kilotonnes. La cible pourrait être Kiev ou Odessa, par exemple. Et cela entraînerait presque certainement une réponse immédiate des États-Unis ou de l’OTAN, mais, selon lui, probablement pas avec des armes nucléaires. Selon lui, les États-Unis et l’OTAN disposent d’armes conventionnelles suffisamment précises et puissantes qu’ils pourraient utiliser pour éliminer rapidement les forces russes en Ukraine.

Le scénario le moins probable, le quatrième, est une attaque nucléaire contre l’OTAN avec des missiles à longue portée ou de croisière sur une cible en Europe centrale. Selon Cirincione, c’est le scénario qui pourrait bien déclencher une réponse nucléaire de l’Occident. Mais, selon lui, même dans ce cas, il est plus probable que la riposte se fasse avec des armes conventionnelles de précision pour éliminer la capacité de frappe russe, ainsi que Poutine lui-même.

MB

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