Ambition climatique : une cacophonie typiquement belge

Tous les gouvernements de notre pays ne cessent de parler d’objectifs climatiques, mais ces plans sont-ils vraiment réalistes ? Comment rendre nos maisons neutres en énergie ? Et comment allons-nous produire de l’électricité verte ? Il est urgent d’adopter une approche large et réaliste, car si nous voulons réaliser nos ambitions en matière de climat, nous devons obtenir l’adhésion de tous.

Ces dernières semaines, les ambitions climatiques de la Belgique ont fait couler beaucoup d’encre. Le sommet sur le climat à Glasgow a permis à nos politiciens de réaliser une fois de plus qu’il est minuit moins cinq. Nos gouvernements se sont montrés du doigt et se sont présentés mutuellement avec des questions difficiles et de grandes attentes, parce que c’est comme ça en Belgique. Quelques décisions rapides ont été mises sur papier pour ne pas avoir l’air idiot à Glasgow. Mais si l’on regarde les ambitions climatiques concrètes et les plans qui les accompagnent, on ne peut que conclure que le surréalisme belge règne toujours. L’architecte a établi les plans de la rénovation. Sauf que la cuisine est dans la salle de bain et que la baignoire est dans le grenier. C’est une erreur. Parce que ça aussi, c’est belge.

Nous excellons dans l’ambition : d’ici 2030, nous n’achèterons que des voitures électriques. Les chaudières à gaz et à mazout seront progressivement éliminées et tous les logements seront équipés de pompes à chaleur. Personne ne remet en cause le fait que l’électrification et la carbonisation sont cruciales. Mais comment faire pour franchir cette étape ? Notre climat n’est pas adapté à une production optimale d’énergie avec le soleil et le vent. La Belgique ne sera pas en mesure de produire suffisamment de sa propre électricité verte. Et que fait le gouvernement ? Il veut construire des usines à gaz. Regardez qui parle. L’hypocrisie dans toute sa splendeur.

Est-ce un plaidoyer pour l’énergie nucléaire ? Absolument pas, car cette production apporte aussi sa propre poubelle. Mais quelles sont les alternatives ?

Chers gouvernements, gardez des ambitions réalistes

Les sujets sont également peu réalistes. Les politiciens fortunés et les yuppies verts marchent vers un avenir neutre en énergie sur leurs baskets végétaliennes. Leurs voitures électriques sont joliment posées dans l’allée de leurs maisons à trois façades, entièrement rénovées et isolées. Mais qu’en est-il des jeunes familles ? Qu’en est-il des parents célibataires de deux adolescents qui étudient ? Qu’en est-il de la génération plus âgée qui doit se contenter d’une maigre pension ? Comment vont-ils contribuer aux objectifs climatiques ? Un million de citoyens bénéficient aujourd’hui du tarif social. Chaque jour, ils se demandent s’il reste du chocolat dans le bocal. Ils ne perdent pas le sommeil à cause des objectifs climatiques. Le développement durable ne doit pas être une affaire d’élite. Et cela devient progressivement le cas.

Des solutions dans le secteur du bâtiment

Une partie de la solution climatique réside sans aucun doute dans le secteur du bâtiment. À l’époque, le gouvernement a été assez intelligent pour inventer le niveau E. Aujourd’hui, chaque nouvelle maison est presque neutre sur le plan énergétique (BEN). Les nouvelles technologies telles que les réseaux de chaleur, les pompes à chaleur et les systèmes collectifs comme la géothermie ouvrent des portes. C’est un pas dans la bonne direction, mais il y a encore peu de profits à réaliser dans les nouvelles constructions.

La véritable marge bénéficiaire se situe sur le marché de la rénovation et du remplacement. Bien que les Belges semblent encore compter sur les sources d’énergie conventionnelles. Au cours des douze derniers mois, 220 000 chaudières murales à gaz, 9 700 chaudières au sol et même 15 400 chaudières à mazout ont été vendues dans notre pays. En comparaison, seules 13 200 pompes à chaleur ont été vendues au cours de la même période.

Peut-on reprocher à nos compatriotes de continuer à choisir le gaz et le fioul ? Aujourd’hui, nous avons l’une des factures d’électricité les plus chères d’Europe. Le prix de l’essence est encore relativement abordable. Un transfert d’impôts ? C’est possible, mais la facture doit rester abordable.

Le chauffage hybride peut être une solution sur le marché du remplacement. Combinez votre chaudière à gaz ou à mazout existante avec une pompe à chaleur ! Pendant les mois les plus froids, vous apprécierez l’efficacité de votre chaudière à gaz ou à mazout. Pendant l’été, lorsque le chauffage est à peine nécessaire, vous pouvez utiliser une pompe à chaleur. Je lance ici un appel chaleureux à nos gouvernements : développez une bonne subvention pour les appareils hybrides. Vous réaliserez vos ambitions climatiques plus rapidement qu’avec votre approche actuelle.

À long terme, je crois aussi à l’hydrogène vert. Aujourd’hui, il est déjà possible de transporter de l’hydrogène vert depuis l’étranger. Pourquoi ne pas transporter le H2 via le réseau de gaz existant ? Les appareils de chauffage au H2 (100% H2 ou jusqu’à 20% de mélange) existent déjà et ont été testés. L’industrie est prête à le faire. Mais nous attendons toujours que les Fluvius et les Fluxis prennent le train en marche. Le H2 peut toutefois générer d’énormes profits. L’installation à elle seule nécessite beaucoup moins de travail que celle d’une pompe à chaleur, et vous pouvez simplement raccorder une chaudière à hydrogène aux radiateurs existants.

Adoptez une approche réaliste

Nous pouvons conclure que nos gouvernements ont travaillé sur des ambitions claires. Les objectifs étaient joliment formulés, mais les fondements n’étaient pas réfléchis. Les gouvernements ont manqué le coche sur plusieurs fronts (par exemple, l’hybride obligatoire dans les nouveaux bâtiments). Il est important de rappeler que ces objectifs touchent l’industrie, les familles et une très grande partie de la population.

Mesdames et Messieurs des gouvernements, pensez aux solutions à long terme. Tout le monde ne peut pas rénover en cinq ans une vieille maison qu’il vient d’acheter. Les prix des maisons montent déjà en flèche. Tout le monde ne peut pas s’offrir une voiture électrique. Tout le monde ne dispose pas de 25 000 euros pour isoler une maison. N’optez pas pour l’écofondamentalisme, mais pour l’écoréalisme. Croyez-moi, je ne suis pas un négationniste du climat. Je suis très heureux de travailler pour un avenir plus vert. Mais je veux que tout le monde soit avec moi. Tous ensemble. Parce que cela aussi est typiquement belge.

L'auteur Yves Vanpoucke est directeur commercial de Remeha Belgium.

OPINION | Pourquoi Nollet (Ecolo) ne se bat-il pas pour changer les règles, au lieu d’avouer ne pas les respecter ?

Une opinion d’Etienne Dujardin, juriste et conseiller communal MR à Woluwe-Saint-Pierre.

Énorme buzz hier de Jean-Marc Nollet (Ecolo) qui avoue ne plus respecter la bulle d’une personne depuis des semaines. Cette déclaration pose problème à plus d’un titre.

Le problème de Monsieur Nollet n’est pas qu’il trouve ridicule la bulle d’une personne. Le problème n’est même pas qu’il suscite un débat sur les mesures actuelles, c’est même plutôt sain, car je pense, comme lui, que certaines mesures ne sont effectivement plus adaptées et qu’il faut élargir la bulle sociale et même, à mon sens, ouvrir à bref délai des secteurs comme la culture, les cultes à plus de 15 personnes ou encore les universités avec plus de présentiel. Le problème n’est pas non plus que Jean-Marc Nollet n’ait pas respecté les règles une fois ou l’autre. Il faut dire qu’elles sont toutes tellement lourdes, complexes et évolutives que même certains experts virologues ont avoué ne pas avoir su toujours respecter toutes les règles à 100%.

Le problème est que le coprésident d’Ecolo le dise publiquement sur une chaîne de média public, sachant en plus qu’il ne s’est pas battu depuis des semaines pour apporter quoi que ce soit comme changement aux règles en vigueur. Au contraire, Ecolo aimait bien faire passer pour irresponsable tout qui souhaitait déconfiner un peu plus vite notre société et alléger les règles actuelles. Le co-président des verts se disait furieux il y a quelques semaines que le MR porte publiquement un débat sur l’assouplissement en déclarant : « Je me mets à la place du citoyen. Que doit-il retenir quand il voit un parti, qui est pourtant associé aux décisions, 48 heures après, se permettre de remettre en question les décisions auxquelles il a participé. Je suis fâché, cela ne peut plus se reproduire. On doit être unis derrière les décisions et derrière le Premier ministre. » Est-ce le même Nollet aujourd’hui qui avoue ne plus respecter les règles ? Je trouve plus irresponsable de venir dire à la radio qu’on ne respecte pas la bulle sociale, que de se battre politiquement pour que les règles changent. Si Monsieur Nollet souhaite aller vers plus de libertés dans la société, qu’il n’hésite pas à appuyer les voix du MR qui prônent des assouplissements depuis des mois et qui se sont souvent trouvées seules en Codeco.

La sortie de Monsieur Nollet pose aussi question par rapport à tous ceux qui ont fait des efforts depuis des mois. Que va-t-il dire demain aux restaurateurs, aux gens de la culture, aux commerçants ? Il va répondre : « C’est vrai les mesures étaient très strictes et, même moi, je ne les respectais pas ? ». On imagine la réaction de ces gens qui sont au bord du gouffre face à ce genre de déclarations et qui, eux, n’ont pas eu le choix de respecter ces règles !? Que va dire Monsieur Nollet demain à cette femme seule qui a reçu une amende pour non-respect des mesures Covid et qui boucle déjà très difficilement la fin du mois ? Va-t-elle encore adhérer aux mesures et aux amendes vu le comportement opposé d’un dirigeant aussi important que coprésident d’Ecolo ? Que va dire Monsieur Nollet à ce couple qui a respecté scrupuleusement les mesures à Noël et n’a même pas invité ses enfants du tout depuis des mois de peur de voir débarquer la police chez eux ? Que va dire Monsieur Nollet à cet étudiant qui ne voit plus ses amis depuis des semaines ? On pourrait multiplier les exemples à l’infini.

La seule défense d’Ecolo et de Monsieur Nollet, lui-même, est de dire : « regardez, moi je ne mens pas, j’ose dire dans les médias que je ne respecte pas les règles ». Cette défense est d’une vacuité intellectuelle rare. Si le coprésident d’Ecolo est payé, ce n’est pas pour aller se confesser à la radio et faire un numéro de transparence sur sa vie privée. Son rôle est de peser politiquement pour un monde qu’il estime meilleur et plus juste, pas d’avouer publiquement qu’il ne respecte plus depuis longtemps une règle édictée par les différents gouvernements où il est présent.

Enfin, et c’est sans doute le plus grave, la déclaration de Monsieur Nollet casse complètement l’adhésion de la population à d’autres règles qui peuvent, elles, avoir plus de sens. Il est plus que temps que certains politiques se ressaisissent dans cette crise et qu’ils pèsent dans les cénacles où se prennent les décisions pour changer les règles qu’ils estiment injustes ou inappropriées. Avouer publiquement qu’on ne respecte pas une règle dont on est responsable, je pense que c’est la dernière chose à faire pour réconcilier le citoyen avec le politique.