Le mythe du “loup solitaire”

Divers médias ont attribué les attentats terroristes survenus à Orlando et à Magnanville, près de Paris, au début de cette semaine, à ce qu’on appelle des “loups solitaires”. « Les experts sont convaincus que l’État islamique n’était aucunement derrière ces faits. Ils ont été l’œuvre d’un loup solitaire, un auteur qui a agi seul. Et cela suscite des préoccupations majeures pour les enquêteurs des cellules anti-terroristes », écrit l’expert en terrorisme, Bart Schuurman dans Het Nieuwsblad.

Mais la théorie d’un “auteur qui agit seul” n’est vraie qu’en partie, affirme Eric Delbecque, directeur de SIFARIS, une société française spécialisée dans la lutte contre la cybercriminalité, dans le journal français Le Monde.

Il explique que cela fait des années que l’État islamique serine une propagande de violence dans le but d’influencer des personnes isolées dans le but de les faire passer à l’acte. Il est donc réducteur de réduire l’orchestration d’une attaque à un seul auteur, lorsque il n’y a qu’un seul exécutant.

“On fait face à une chaîne de responsabilités : la première parmi celles-ci étant la dynamique d’endoctrinement opérée par des individus et des groupes radicalisés. Dans le cas de la tuerie homophobe d’Orlando, le meurtrier, un Américain d’origine afghane, avait déjà montré sa sympathie pour le terrorisme islamiste en 2013, et a été en ­contact avec un homme parti ­combattre en Syrie en 2014 au sein du Front ­Al-Nosra, proche d’Al-Qaida. ­

Par ailleurs, il frappait sa première femme tout en cherchant à l’isoler (ce qui nous rapproche du phénomène sectaire). Autant dire qu’il appartient au ­vivier des candidats archétypiques pour être endoctrinés puis présentés comme « soldats du califat » par l’EI, sans qu’aucun lien direct de subordination n’apparaisse”.

L’environnement de cet exécutant est décisif pour son parcours dans la radicalisation, où l’on retrouve souvent le trio fréquentations, ­Internet, prison. L’histoire personnelle joue également un rôle. Enfin, les appels incessants à la violence et au meurtre de l’État islamique, et l’influence de sa propagande, aboutissent aux attentats.

L’État islamique s’approprie ensuite ces actes, au travers de son agence de presse, pour diffuser la notion que le groupe est omniprésent, et qu’il peut mener une guerre sans frontière.

“Nous autres Occidentaux nous ­entêtons à penser l’adversaire sous forme d’organisation pyramidale et structurée, comme une entreprise ou une administration. C’est une mouvance, une galaxie, un réseau aux frontières extrêmement poreuses et mouvantes, un « système »”, conclut-il.

“Le concept de loup solitaire est bien trop flatteur”, affirme Asiem El Difraoui, politologue allemand-égyptien et expert sur le djihadisme dans Die Welt. “Le schéma n’est pas nouveau. L’État islamique fournit le plan et dit : +Faites comme vous voulez !+ Ce sont donc des auteurs individuels au sein d’un environnement qui se livrent à des actes contre des cibles faciles, pour diviser la société. Cela ne signifie pas qu’ils se sont totalement radicalisés au moyen de l’Internet. Dans presque tous les cas, les auteurs évoluaient dans un environnement radical, ou étaient en contact direct avec L’État islamique”.

ORLANDO, FL - JUNE 13: April Ross pauses after laying flowers at a makeshift memorial at Dr. Phillips Center for the Performing Arts on June 13, 2016 in Orlando, Florida. The shooting at Pulse Nightclub, which killed 49 people and injured 53, is the worst mass-shooting event in American history. Drew Angerer/Getty Images/AFP

Drew Angerer/Getty Images/AFP

ORLANDO, FL – JUNE 13: April Ross pauses after laying flowers at a makeshift memorial at Dr. Phillips Center for the Performing Arts on June 13, 2016 in Orlando, Florida. The shooting at Pulse Nightclub, which killed 49 people and injured 53, is the worst mass-shooting event in American history. Drew Angerer/Getty Images/AFP

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