Quand la peur change de camp : victoire symbolique des Ukrainiens sur les toits de Moscou

Alors que l’OTAN se réunit à Ramstein, en Allemagne, pour décider de la suite du soutien militaire à l’Ukraine, les Russes se préparent à défendre Moscou. Une ville qui n’a jamais été ouvertement menacée par les Ukrainiens. Mais ceux-ci continuent à laisser planer le doute sur leurs futures actions.

Pourquoi est-ce important ?

L'un des enjeux qui décideront du dénouement de la guerre entre l'Ukraine et la Russie reste le soutien - ou la passivité - des opinions publiques respectives des deux pays par rapport à la conduite du conflit par les gouvernements. Si à Kiev le moral tient bon, les Moscovites viennent d'assister à un signe de mauvais augure.

Dans l’actualité : la rumeur courait depuis quelques jours, la voici confirmée en images. L’armée russe installe des systèmes de défenses antiaériennes sur les toits de la capitale.

  • Il y a quelques jours, le rapatriement de systèmes de missiles antiaériens et antimissiles S-400 Trioumf avait été évoqué.
  • Ce n’est pas le même engin que l’on voit sur différentes images et vidéos apparues depuis jeudi sur les réseaux sociaux. Il s’agit de lance-missiles Pantsir, SA-22 Greyhound en code OTAN, des engins à courte et moyenne portée équipés tant de missiles que de canons jumelés, et capables d’écarter la menace des avions, hélicoptères, et autres missiles de croisière.
  • Ces engins ont été – difficilement – installés sur les toits de différents bâtiments ; l’un est utilisé par le ministère russe de la Défense, un autre est un bâtiment d’enseignement dans le quartier de Taganka, à Moscou, à 1,5 km au sud-est du Kremlin.
  • L’armée russe a déclaré que ces Pantsir pourraient être utilisés contre des cibles plus petites, comme les drones militaires et commerciaux, relève The Guardian ; des engins low cost qui sont devenus omniprésents sur le champ de bataille en Ukraine.
  • Plusieurs médias russes ont également fait état du déploiement de systèmes de missiles S-400 à longue portée à Moscou au cours des dernières semaines, rapporte aussi le quotidien britannique. Or les systèmes S-400 et Pantsir-S1 sont souvent utilisés en tandem pour offrir une couverture aussi dense que possible.

Le contexte : personne, ni au sein de l’OTAN ni en Ukraine, n’a jamais menacé de frapper Moscou d’une manière ou d’une autre. On dirait que les Russes sont les seuls à y croire. Au grand bénéfice des Ukrainiens.

  • Plus tôt cette semaine s’est posée la question de possibles représailles des Ukrainiens sur des villes russes, en réponse à la campagne de bombardements aveugles qu’ils subissent.
  • Kiev a les moyens de frapper, au moins symboliquement : en novembre dernier, un drone d’origine soviétique modifié en missile a frappé un aérodrome militaire situé loin à l’intérieur du territoire russe, à une distance supérieure que l’est Moscou.
  • Le renseignement ukrainien laisse donc sciemment planer le doute, par exemple en laissant des journalistes apercevoir des cartes de Moscou dans ses bureaux. Une manière de créer une pression supplémentaire dans l’esprit de l’état-major russe, justement car cette frappe reste improbable, mais pas impossible.
  • Et les faits sont là : l’armée russe déplace des systèmes de défense qui pourraient bien manquer sur le front, pour protéger des cibles qui ne seront sans doute jamais visées. C’est déjà une victoire, obtenue par le renseignement plus que par les armes.
  • Quant à l’effet que ce genre de déploiement – on pourrait parler d’aveu de faiblesse – aura sur la population russe, forcément aux premières loges, il est encore sujet à bien des théories. Mais nul doute qu’il ne pourra que renforcer le sentiment que la guerre se déroule bien plus mal que ne le prétend le gouvernement.
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