Le début d’une escalade ? Le président Maduro met l’armée du Venezuela en alerte face à une « menace » britannique

La crise couve toujours entre le Guyana et le Venezuela depuis que ce pays a fait passer un référendum réclamant l’annexion de 70% du territoire de son voisin. De part et d’autres, on prévoit des manœuvres militaires.

Pourquoi est-ce important ?

On devine rarement ce qui, a posteriori, sera considéré comme le premier indice qu'un conflit était imminent. Beaucoup d'étincelles peuvent voleter, avant que l'une d'elle mette réellement le feu aux poudres. Mais parmi les pyromanes à surveiller en 2024, le président vénézuélien Nicolás Maduro semble figurer en bonne position.

Le Venezuela s’alarme contre un seul (petit) navire

Le contexte : les tensions ne faiblissent pas autour de la région de Guayana Esequiba, que le Vénézuela réclame, mais qui appartient au Guyana voisin – et qui représente 70% de son territoire. Le petit pays anglophone d’Amérique latine semble militairement bien faible face à l’armée de Caracas, mais si guerre il devait y avoir, il y a peu de chance qu’elle reste limitée à deux acteurs.

Dans l’actualité : La Grande-Bretagne déploie un navire dans la région. Le ministère britannique de la Défense a annoncé que le HMS Trent, un patrouilleur, se rendra au Guyana pour participer à des manœuvres conjointes avec la marine de ce pays. Rappelons que le Guyana est membre du Commonwealth, alliance informelle d’États qui étaient des territoires britanniques avant la décolonisation du XXe siècle.

Commonwealth contre armée bolivarienne ?

  • Ce n’est pas une alliance militaire : les États membres n’ont aucune obligation les uns envers les autres. Mais outre l’entretien d’une certaine proximité culturelle, le Commonwealth peut servir de vernis à une véritable solidarité.
  • Et le Guyana n’est certainement pas en position de la refuser. Le pays ne dispose que d’une armée de 4.600 soldats en service actif, et 3.000 réservistes. Quant à sa marine, elle aligne un vieux dragueur de mines d’origine britannique et quatre bateaux côtiers venus des USA, ainsi qu’un patrouilleur américain plus récent de classe Defiant, incorporé en 2023 seulement.
  • Or il n’est pas exclu qu’un conflit futur avec le Venezuela ait un aspect maritime, car Caracas convoite aussi les eaux côtières de l’Essequibo, riche en gisements pétroliers.
  • On est toutefois bien loin de la guerre des Malouines de 1982, quand la Grande-Bretagne avait envoyé un groupe aéronaval complet pour reprendre cet archipel de l’Atlantique sud occupé par les Argentins – victoire britannique totale en moins de trois mois. Le HMS Trent, 1.800 tonnes de déplacement, n’est armée que d’un canon Bushmaster de 30 mm et de quatre mitrailleuses, détaille Opex360. Il peut aussi déployer un hélicoptère, ainsi que des drones.

Mais c’est assez pour provoquer une réponse agressive de Maduro qui pointe ce petit navire comme une grande menace. Le président vénézuélien a mis son armée en alerte et annoncé des grandes manœuvres aéronavales.

« J’ai ordonné aux Forces Armées nationales bolivariennes [du Venezuela] dans les Caraïbes orientales, une action conjointe de nature défensive, en réponse à la provocation et à la menace du Royaume-Uni contre la paix et la souveraineté de notre pays. »

Nicolás Maduro

« Nous n’avons pas l’intention d’envahir le Venezuela »

Une réponse qui semble assez disproportionnée : ces manœuvres devraient impliquer environ 5.600 soldats vénézuéliens, soit plus que l’armée d’active du Guyana. Des avions de combat F-16 et Su-30 seront impliqués, ainsi que des navires patrouilleurs. Nom de code de l’exercice : « général Domingo Antonio Sifontes 2023 ».

  • Or c’est là une référence à l’incident de Cuyuni de 1895, détaille le site de référence français. Une petite affaire entre Vénézuéliens et Britanniques dans la zone à cause d’un différend territorial à l’époque coloniale. Tout un symbole, apparemment.
  • Du côté du Guyana, on tente de désamorcer, en rappelant que ces exercices conjoints avec les Britanniques étaient prévus bien avant la récente crise déclenchée par Caracas. Nous n’avons pas l’intention d’envahir le Venezuela. » a déclaré Bharrat Jagdeo, le vice-président du pays anglophone. « Le président Maduro le sait et ne doit pas s’inquiéter. »
Plus