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Macron et Scholz doivent raviver la flamme franco-allemande avant qu’elle ne s’éteigne définitivement, une menace pour toute l’Europe

Macron et Scholz doivent raviver la flamme franco-allemande avant qu’elle ne s’éteigne définitivement, une menace pour toute l’Europe
Emmanuel Macron, Olaf Scholz – Getty Images

Le couple (politique) le plus important d’Europe va mal. Le président français et le chancelier allemand doivent à tout prix resserrer leurs liens distendus s’ils veulent préserver la santé de l’UE. Mais les deux dirigeants sont aux antipodes l’un de l’autre.

Pourquoi est-ce important ?

L'Allemagne et la France sont les deux pays pesant le plus lourd dans la balance européenne. L'Allemagne est la plus grande économie de l'UE (PIB de 4.093 milliards d'euros), suivie par la France (2.773 milliards d'euros). Quand le couple franco-allemand fonctionne, c'est toute l'Europe qui en profite. Mais pour le moment, les deux pays ne sont d'accord sur rien.

Dans l’actu : Une réunion de deux jours entre Emmanuel Macron et Olaf Scholz à Hambourg, le fief du chancelier allemand.

  • Les deux dirigeants ne seront pas en tête-à-tête, mais accompagnés chacun d’une vingtaine de ministres. Tout ce beau monde se réunit dans un « cadre informel », insiste-t-on. Au menu : balade en bateau, dégustations locales et discussions décontractées.
  • Ils s’entretiendront notamment au sujet de l’intelligence artificielle, de la souveraineté technologique et de la « transformation des sociétés industrielles », indique-t-on du côté de Macron.
  • Mais l’impact immédiat de la rencontre est minimisé des deux côtés. Aucune annonce n’est prévue, seulement une conférence de presse conjointe mardi.

Entre les lignes : Macron et Scholz préfèrent jouer la carte de la prudence pour éviter toute déception en l’absence d’accord. Ce qui est bien susceptible d’arriver, tant le fossé qui les sépare est profond.

Deux personnalités opposées

Les enjeux : Réchauffer des relations qui sont devenues glaciales entre les deux dirigeants. Alors qu’Emmanuel Macron et la prédécesseure de Scholz, Angela Merkel, filaient le parfait amour (politique).

  • « Nous ne sommes d’accord sur rien », a résumé le ministre allemand de l’Économie Robert Habeck. Ce dernier ne garde pas sa langue dans sa poche, mais ce n’est pas le cas de son chancelier. Une retenue pleine de non-dits qui peut le desservir dans sa relation avec son homologue français. De son côté, Emmanuel Macron est bien plus direct et familier dans son attitude avec les autres chefs d’État.

Il y a plus : au-delà de ces problèmes de compatibilité émotionnelle, un accord sur les sujets politiques fait surtout défaut.

  • Dans l’énergie, la France mise sur le nucléaire pour sa transition écologique. Alors que l’Allemagne a éteint ses derniers réacteurs en avril et doit user de ses centrales à charbon pour faire l’appoint du renouvelable. Paris veut que le nucléaire soit considéré comme une énergie verte, ce qui lui permettrait de bénéficier de subventions européennes. Ce que refuse en bloc Berlin.
  • Le volet de la défense ne fait pas meilleure figure. L’Allemagne veut développer un « Bouclier du ciel européen » basé sur des systèmes de défense allemands, américains et israéliens. De son côté, la France préfère s’appuyer sur des technologies locales. De plus, Macron défend une approche collective et critique la précipitation allemande à acheter des systèmes qui ne pointeront pas tout de suite leur nez, à cause de délais de livraison très longs.
  • Même au niveau aérospatial, les relations sont au plus bas. L’Europe attend toujours la fusée Ariane 6, qui doit assurer la relève d’Ariane 5, mise au rebut en juin. Pourquoi ? La France et l’Allemagne financent majoritairement le projet, par l’intermédiaire de l’Agence spatiale européenne. Or les deux pays s’opposent ici aussi sur plusieurs points.
    • La France ne veut plus que les contrats soient attribués en fonction de la participation financière des pays. Principe ayant transféré des missions d’Ariane de la France vers l’Allemagne, principal contributeur à l’ESA.
    • L’émergence d’une industrie spatiale privée met en péril la coopération franco-allemande, traditionnellement axée sur de grandes entités comme l’ESA. L’approche actuelle, bien que dominante depuis les années 1980, semble trop rigide pour l’Allemagne.

L’Europe, l’enfant victime du divorce ?

Zoom arrière : Autant de problèmes qui risquent de se répercuter sur toute l’Europe.

  • La mésentente franco-allemande sur l’énergie met en péril un projet de réforme du marché de l’électricité de la Commission européenne. Soumis au printemps, ce projet doit être adopté avant la fin de l’année.
  • « C’est souvent un dialogue de sourds. À chaque nouveau texte européen qui vient sur la table, on retrouve les mêmes positions de part et d’autre et on a beaucoup de mal à trouver un compromis » indiquait en mars une source européenne au journal Les Échos.
  • Comme pour chaque enfant de parents divorcés, les pays européens choisissent leur camp. Une alliance de douze pays s’est par exemple formée derrière la France pour soutenir le nucléaire.

« Si [Macron et Scholz] décident de simplement poursuivre leurs propres intérêts, ils seront non seulement tous deux perdants, mais l’UE le sera aussi, elle qui n’est pas aussi forte et stable qu’elle devrait l’être »

a déclaré à Reuters Detlef Seif, législateur de l’Union chrétienne-démocrate allemande (CDU) sur les affaires européennes.
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