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Macron a-t-il vraiment eu tout faux dans son discours sur Taïwan ? Timidement, l’Allemagne s’aligne sur sa position

Macron a-t-il vraiment eu tout faux dans son discours sur Taïwan ? Timidement, l’Allemagne s’aligne sur sa position
Des chars taïwanais, la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock et le président français Emmanuel Macron. (Chris McGrath/Getty Images, Soeren Stache/picture alliance via Getty Images, Peter Boer/Bloomberg via Getty Images)

En début de semaine, une interview d’Emmanuel Macron au sujet de Taïwan a suscité un tollé. Surtout aux États-Unis, mais aussi en Europe. Alors que les mots pour qualifier ses déclarations allaient de « maladroites » à « honteuses » en passant par « dangereuses », le voilà qui reçoit un soutien de choix en Allemagne.

Pourquoi est-ce important ?

Il y a de plus en plus de nervosité autour de Taïwan, à mesure que la Chine exerce d'inquiétantes manœuvres militaires à proximité. Les États-Unis répètent qu'ils soutiennent bec et ongles l'État insulaire... et ils espèrent bien que l'Europe pense la même chose. Si cela venait à changer, ils le vivraient comme une véritable trahison.

Dans l’actu : en Chine, une ministre allemande s’aligne sur la France.

  • Une semaine après la visite de Macron auprès de Xi Jinping, c’est l’Allemagne qui envoie une représentante en Chine, en la personne d’Annalena Baerbock, sa ministre des Affaires étrangères.
  • Elle a tenu un discours similaire à celui de son homologue français sur Taïwan. Avec plus de diplomatie.

Le détail : « la politique française reflète la politique européenne ».

  • Arrivée ce jeudi dans la ville portuaire de Tianjin pour une tournée de trois jours en Chine, Baerbock a été invitée à s’exprimer devant les journalistes sur les propos tenus par Emmanuel Macron quelques jours plus tôt.
  • Selon la ministre allemande, citée par la DW, le président français a « encore souligné que la politique chinoise française reflète pleinement la politique chinoise européenne ».
    • « Nous ne sommes pas seulement proches les uns des autres, mais nous poursuivons des approches stratégiques communes sur les questions centrales de nos intérêts et de nos valeurs », a-t-elle ajouté, parlant des alliés européens.
    • Pour rappel, Macron avait appelé l’Europe à ne pas être « suiviste » des USA sur le sujet afin d’œuvrer en faveur de « l’autonomie stratégique » européenne qu’il défend en vue d’aboutir, in fine, à la création « d’une troisième superpuissance ».
  • En parallèle, dans un communiqué précédant ces déclarations, Baerbock a aussi répété les mots tenus par Ursula von der Leyen une semaine plus tôt.
    • À savoir qu’elle comptait souligner auprès des Chinois « la conviction européenne commune qu’un changement unilatéral du statu quo dans le détroit de Taïwan, et en particulier une escalade militaire, serait inacceptable ».
    • Une position qui semble là un peu plus ferme que celle de Macron – et qui devrait donc lui épargner les virulentes critiques que celui-ci a reçues, principalement depuis les États-Unis.
    • Le président français avait en effet avoué que, étant donné que « les Européens n’arrivent pas à régler la crise en Ukraine », ils n’étaient pas en mesure de s’affirmer « de manière crédible » auprès de la Chine sur Taïwan.

Une seule chose paraît claire : l’Europe est divisée

Les critiques les plus féroces : chez les républicains et en Europe de l’Est.

  • On l’a dit, c’est surtout de l’autre côté de l’Atlantique – et particulièrement dans le camp républicain – que l’on a très mal digéré les propos de Macron. Avec en vitrine les mots on ne peut plus crus de Donald Trump : « Il a léché le cul de Xi Jinping ».
  • Mais en Europe aussi, certains responsables se sont désolidarisés des propos du président français. Principalement en Europe de l’Est, où le Premier ministre polonais Mateusz Morawieck a dénoncé une « erreur dramatique ».
    • “Vous ne pouvez pas protéger l’Ukraine aujourd’hui et demain en disant que Taïwan n’est pas votre affaire”, a-t-il notamment déploré.

La question : le gouvernement allemand sait-il vraiment ce qu’il veut ?

  • En Allemagne, il y a eu des mots très peu tendres dans le camp des chrétiens-démocrates de la CDU. Un député a notamment accusé Macron de « diviser et d’affaiblir l’Europe avec une rhétorique aussi naïve que dangereuse. »
    • Mais la CDU, bien qu’elle soit la deuxième plus grande force politique du pays, est aujourd’hui dans l’opposition après plus de quinze ans de gouvernance avec Angela Merkel en tête de gondole.
  • Quid du côté de la majorité, alors ? Une première flèche a été décochée par le député Metin Hakverdi, du SPD, le parti du chancelier Olaf Scholz.
    • « Macron recommence. Il s’exprime à Pékin sans aucune autorisation de l’UE. Il organisera alors certainement des garanties de sécurité pour l’Ukraine tout seul », a-t-il réagi, ajoutant qu’il s’agissait « d’une grave erreur pour l’Occident que de se laisser diviser dans ses relations avec Pékin. »
  • Son de cloche un peu moins vigoureux, mais somme toute similaire du côté du ministre de la Défense Boris Pistorius, lui aussi du SPD et premier membre du gouvernement à réagir publiquement sur le sujet.
    • « Nous n’avons jamais été en danger d’être ou de devenir un vassal des États-Unis », a-t-il assuré, en référence au fait que Macron a déclaré qu’être un « allié » ne voulait pas dire être un « vassal. »
    • « J’ai trouvé cette déclaration malheureuse », a ajouté Pistorius. « Cela ne nous aide pas de nous diviser ou de nous laisser diviser sur des positions différentes. À la fin, cela aide seulement la politique étrangère chinoise ».
  • Olaf Scholz n’a quant à lui pas encore commenté publiquement la polémique.
  • On notera que Baerbock n’est pas du même parti. Elle fait partie des Verts, la troisième force politique allemande.
  • Les libéraux du FDP, le troisième membre de la tripartite au pouvoir, sont quant à eux restés discrets sur le sujet.
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