L’hydrogène est une source d’énergie renouvelable, qu’on espère un jour produire sans rejets polluants. Le problème, c’est que les propriétés de ce gaz lui-même sont mal connues. Et selon certains scientifiques, il faut s’alarmer de sa contribution à l’effet de serre qui pourrait, à masse égale, être 200 fois plus forte que le CO2.
L’année dernière, la Commission européenne dévoilait sa stratégie pour la transition massive vers les énergies renouvelables, et l’hydrogène était présenté comme une piste essentielle pour cette révolution énergétique: l’EU estimait que d’ici 2050, 24% de la consommation mondiale d’énergie pourrait provenir de l’hydrogène, en particulier dans des secteurs tels que l’industrie de l’acier, ou celle des produits chimiques. Il est vrai qu’en brûlant, ce gaz ne dégage que de la vapeur d’eau, ce qui semble totalement inoffensif. Mais des scientifiques s’alarment : la question est un peu plus complexe que ça.
Effet de serre indirect
Steven Hamburg, chercheur pour l’organisation non-gouvernementale Environmental Defense Fund (EDF) rappelle que, indirectement, l’hydrogène peut jouer un rôle dans le réchauffement climatique en interagissant avec les gaz à effet de serre classiques: « L’hydrogène qui fuit dans l’atmosphère est en fait un gaz à effet de serre très puissant, car il prolonge la durée de vie du méthane dans l’atmosphère, ce qui fait que celui-ci ne se dégrade pas et continue de contribuer au réchauffement climatique. L’hydrogène se comporte comme un gaz à effet de serre indirect à courte durée de vie, 200 fois plus puissant que le dioxyde de carbone au moment où il est libéré, kilogramme pour kilogramme. «
Cela ne serait pas si problématique en théorie, vu que l’idée est justement de brûler ce gaz, pas de le rejeter tel quel dans l’atmosphère, du moins pas intentionnellement. Mais le sous-produit de sa combustion, la « si inoffensive vapeur d’eau », peut elle aussi entrainer de graves conséquences physico-chimiques. Car l’eau, même à cet état diffus, a aussi un effet loupe qui augmente l’intensité des rayons solaires. « L’hydrogène réagit pour former l’ozone troposphérique, qui contribue également à l’effet de serre », ajoute M. Hamburg. Et l’hydrogène se décompose également en vapeur d’eau dans la stratosphère. »
Rarement vraiment vert
Ces effets peu étudiés relativisent beaucoup la pertinence de ce gaz comme carburant « vert » alertent les scientifiques, et ce même si l’hydrogène lui-même est produit via des énergies renouvelables, ce qui reste encore très loin d’être vraiment au point, malgré de nombreux efforts en ce sens. L’ennui, c’est que de nombreux pays, dont le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne, misent massivement dessus comme alternative aux carburants fossiles, l’hydrogène étant – ça, c’est certain – parfaitement renouvelable. Mais ce n’est pas pour autant que ce gaz a été suffisamment étudié en amont: nous n’avons, par exemple, aucune idée de la quantité d’hydrogène que nous relâchons déjà accidentellement dans l’atmosphère à cause de fuites ou de canalisations défectueuses.