Aussi puissant et fermé qu’il puisse être, Wall Street ne dispose pas de remparts suffisamment grands pour repousser les influenceurs. Après la mode, le gaming ou encore les technologies, le secteur financier succombe lui aussi à la fièvre des Tiktokeurs et autres Instagrameurs.
Avec l’avènement des réseaux sociaux est née une nouvelle catégorie de personnalités publiques: les influenceurs. Ils exercent sur les plateformes sociales les plus à la mode – Instagram, TikTok, mais aussi Snapchat ou encore Twitter – et abordent de nombreux sujets ; mode, maquillages, technologies, sport, mais aussi la finance. Grâce à leur personnalité attachante, leur humour ou tout simplement leur talent, ils sont parvenus à se créer une fan-base importante et sont devenus de véritable porte-voix pour les marques qui sont prêtes à mettre le prix.
Les influenceurs des finances
Wall Street ne fait pas exception. Le secteur des finances est lui aussi devenu le terrain de jeu de nombreux spécialistes amateurs des finances. Ces derniers s’expriment sur les réseaux sociaux – principalement sur TikTok – et partagent des conseils sur des investissements, les bons placements à faire ou encore comment gérer son argent. Ils rendent également accessible des termes et concepts complexes au plus grand nombre, de manière ludique, le tout gratuitement.
Une logique qui a de quoi plaire, surtout si vous vous intéressez à la finance. Il n’est donc pas anormal que certains « fininfluenceurs » soient suivis par des centaines de milliers de personnes sur les plateformes sociales. Une fan-base conséquente qui donne un certain poids aux influenceurs, de sorte que les sociétés financières elles-mêmes lorgnent dessus.
Des opportunités à 6 chiffres
Austin Hankwitz est l’un de ces fininfluenceurs. Âgé de seulement 25 ans, il gagne environ 500.000 dollars par an en partageant des conseils sur la finance. Il s’est également constitué un portefeuille évalué à 1,3 million de dollars depuis mars 2020, grâce à des capitaux propres reçus de marques avec lesquelles il travaille. L’influenceur gagne ainsi bien plus que certains banquiers de Wall Street.
Ce salaire annuel, l’influenceur ne le doit pas qu’à ses quelque 500.000 abonnés. Son succès sur la plateforme sociale lui a permis de signer de jolis de contrats de partenariats avec des entreprises, intriguées par ce qu’il faisait, mais aussi désireuses de gagner en visibilité grâce à lui.
L’influenceur gagne ainsi une prime ou un pourcentage lorsqu’il fait une vidéo promotionnelle à propos de telle ou telle société ou lorsque ses abonnés utilisent son code unique sur une plateforme de trading. Il peut d’ailleurs compter sur ses fans pour se remplir les poches. En s’abonnant à sa chaine Patreon, ses followers peuvent recevoir des analyses financières et des conseils pour des investissements plus approfondis contre quelques dollars par mois – en 4 et 17 $.
Explosion de l’intérêt pour les finances
Le phénomène a surtout pris de l’ampleur avec la pandémie de coronavirus. Ceux qui s’intéressaient déjà de près ou de loin au secteur se sont plongés davantage dedans en 2020. Selon Bloomberg, les heures consacrées aux applications financières aux États-Unis ont augmenté de près de 90% durant la pandémie. Les téléchargements d’applications dédiées ont grimpé de 20%, selon les chiffres d’App Annie. Les transactions au marché boursier réalisées avec un smartphone ont bondi de 135%.
Une tendance dont la partie visible a surtout été observée sur le marché des cryptomonnaies. Ce dernier a en effet vu sa popularité exploser durant la crise sanitaire. Mais à mesure que le marché des finances au sens large attirait de plus en plus d’amateurs, les arnaqueurs se sont empressés de prendre le train en marche.
Si certains comme Haley Sacks – fininfluenceuse qui vulgarise le monde de la finance en faisant des références à la pop’culture – offrent de vrais conseils à leurs abonnés, tout en indiquant clairement qu’ils ne sont pas une norme directive et qu’ils ne sont pas bons pour tout le monde, d’autres pseudo-influenceurs se montrent moins scrupuleux et vantent les mérites de tout et n’importe quoi sans forcément s’y connaitre ou en n’indiquant pas qu’ils sont payés pour le faire.
Le phénomène a pris tellement d’ampleur, surtout sur TikTok que la plateforme a dû resserrer la vis. Les créateurs de contenus qui étaient sponsorisés par des services et produits financiers et qui en faisaient la promotion sans l’indiquer clairement seront désormais sanctionnés.
D’autres encore cherchent juste à nuire en partageant des informations totalement infondées. De nombreux comptes sur Twitter, Instagram et TikTok se font passer pour des spécialistes et tentent d’influencer des utilisateurs naïfs ou proposent des solutions super simples pour devenir riches en quelques jours seulement.
Les sociétés elles-mêmes ne sont pas à l’abri d’une arnaque, c’est pourquoi elles font une enquête minutieuse sur les fininfluenceurs avant de conclure un accord avec eux. Mais le fait que des acteurs du club élitiste qu’est Wall Street se mélangent avec les « petites gens » de l’influence sur les réseaux sociaux reste tout de même quelque chose de remarquable. Malheureusement, cette influence pourrait être à double tranchant si certains de ces fininfluenceurs décident du jour au lendemain d’abuser de leur popularité pour manipuler en quelque sorte les marchés.
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