Les compagnies aériennes qui ont essayé d’adapter le business model du low-cost aux vols longs-courriers sont quasiment toutes en difficultés économiques. Cela pose la question de la viabilité de ce type d’offre.
Norwegian, Wow Air, Primera : ces trois compagnies aériennes, toutes nordiques, ont pour point commun d’avoir tenté d’adapter le business model des compagnies low-cost aux vols longs-courriers.
Une faillite et une grave menace pour l’Islande
Mais au début du mois d’octobre, la compagnie danoise Primera Air, qui avait ouvert des lignes entre l’Europe et les Etats-Unis, a fait faillite. Cela ne faisait que 5 mois qu’elle opérait des vols low-cost. Des dizaines de milliers de passagers ont été cloués au sol par surprise.
La compagnie aérienne islandaise Wow-Air a été fondée en 2011. Elle dessert 36 destinations en Europe, en Amérique du Nord et en Asie, ce qui fait d’elle l’un des fleurons islandais. traverse une période particulièrement délicate. Au premier semestre de cette année, ses pertes se sont montées à près de 60 millions de dollars. Wow Air se débat désormais pour éviter la faillite, et cherche un repreneur. Sa compatriote Icelandair, qui s’était portée volontaire, a finalement décliné l’invitation, sans doute parce que les difficultés financières de Wow Air sont encore plus grandes que prévu.
Des négociations pour un éventuel plan de sauvetage ont débuté avec le fond américain Indigo Partners. Entre-temps, 111 employés sur 650 ont été licenciés et 7 lignes vers l’Amérique du Nord ont été supprimées ; la compagnie devrait aussi se débarrasser d’une partie de sa flotte de 20 avions, pour ne conserver que 9 appareils en leasing.
Pour l’Islande, les enjeux sont énormes. Un groupe de travail islandais a calculé qu’une faillite de Wow Air risque conduirait à la destruction de 1400 emplois, à une chute de 13 % de la parité de la couronne islandaise, ce qui provoquerait de l’inflation dans le pays.
Norwegian : un business model basé sur un endettement massif
Même la vedette de ce nouveau secteur, la Norvégienne Norwegian Air Shuttle, la troisième plus grosse compagnie low-cost d’Europe, traverse actuellement une période de graves turbulences, et serait également au bord du gouffre.
La compagnie, qui a eu largement recours au crédit pour financer sa flotte, s’est lourdement endettée. A la fin de l’année 2018, sa dette culminait à 3,5 milliards d’euros, à comparer à son chiffre d’affaires de 3,1 milliards d’euros en 2017. Elle ne serait plus en mesure de faire face à ses échéances et serait donc exposée à une mise en redressement judiciaire, ce qui lui porterait le coup fatal.
Piégées entre la hausse des prix du carburant et la nécessité de baisser le prix des billets
Ces compagnies ont toutes été confrontées à une évolution défavorable de leur marché : une intensification de la concurrence, et surtout, une forte hausse des cours du pétrole. Les cours ont commencé à redescendre, mais ils ont presque doublé dans le courant du premier semestre de cette année. En conséquence, ces compagnies audacieuses se sont toutes retrouvées piégées entre la flambée du prix du carburant, et la nécessité de baisser le prix de leurs billets pour continuer d’attirer les passagers. En outre, certaines d’entre elles doivent payer leur personnel en devises étrangères, ce qui a augmenté leurs coûts salariaux.
L’avenir s’annonçait pourtant radieux pour ces compagnies qui avaient souvent misé sur les nouveaux appareils moyens-courriers, l’Airbus A321 neo et le Boeing 737 Max, des avions moins chers à l’achat et moins énergivores que les gros-porteurs traditionnellement utilisés sur les lignes long-courriers. Et la demande était là, avec plus de 10 millions de passagers sur l’Amérique du Nord (dont 8 millions rien que sur les Etats-Unis), et une progression de 5 à 7 % du trafic. Cette année, au départ de Paris, les compagnies low-cost ont été plus nombreuses que les compagnies traditionnelles à proposer des vols transatlantiques, rapportait le journal Les Echos.
Norwegian est encore rentable et se bat pour sa survie
Malgré ses difficultés, Norwegian demeure rentable, et en 4 ans, elle s’est imposée comme la compagnie proposant le plus de liaisons entre l’Europe et les Etats-Unis. Sur les 3 dernières années, elle a connu une croissance à deux chiffres, et encore aujourd’hui, ses ventes continuent de se développer. Au troisième trimestre de cette année, elle a transporté 11 millions de passagers, desservi 150 destinations moyen-courriers et long-courriers et réalisé un bénéfice de 134 millions d’euros, en hausse de 18 %.
La compagnie mise maintenant sur un plan de restructuration pour réduire sa voilure de 200 millions d’euros, et sur la revente de certains de ses appareils pour générer de la trésorerie. On évoque également une nouvelle levée de fonds auprès de ses actionnaires, et la création d’une filiale qui reprendrait ses appareils pour les lui sous-louer, afin de se débarrasser d’une partie de sa dette.