Depuis que Proximus a annoncé hier lancer la 5G ‘light’ dans 30 communes, le débat sur cette technologie fait rage. Une pétition anti-5G a été lancée et récolte actuellement plus de 50.000 signatures. La question de la santé et du coût environnemental inquiète. S’agit-il seulement d’une technologie nécessaire? Et est-ce vraiment le bon moment pour l’annoncer?
1. Un progrès nécessaire?
La 5G, qu’est-ce que c’est au juste? Comme son nom l’indique, il s’agit de la cinquième génération de téléphonie mobile. Elle succédera à sa petite sœur la 4G (pas encore totalement déployée dans certains pays) pour apporter à la fois bien plus de débits et des temps de latence considérablement réduits.
Les temps de téléchargement seront par exemple divisés, avec des débits jusqu’à dix fois plus élevés que ceux de la 4G. Même chose pour la latence (le temps de réponse) qui devrait être réduite à une milliseconde seulement. Une réactivité qui pourrait s’avérer essentielle pour le secteur industriel (automatisation, robotique, pilotage à distance), par exemple dans les transports autonomes. En outre, les connexions en simultané ne devraient également plus poser problème.
Autre utilité: le domaine audiovisuel, où la 5G permettrait de charger instantanément n’importe quel contenu en haute et en très haute définition, mais aussi de profiter pleinement des jeux vidéo en streaming et du cloud gaming. De nombreux autres secteurs pourraient bénéficier de cette nouvelle technologie, tels que les villes intelligentes (sécurité publique, territoires connectés, maîtrise énergétique) et la santé (surveillance à distance, télémédecine, téléchirurgie).
2. Un danger pour la santé?
La santé, c’est pourtant l’un des problèmes majeurs que soulève la 5G. Nombreux sont ceux qui s’interrogent sur l’impact biologique et sanitaire des hautes fréquences. La 5G utilise effectivement une fréquence plus haute que la 4G, mais dont la portée des ondes est plus courte. Les hautes fréquences nécessitent donc davantage d’antennes pour le fonctionnement de la technologie, ce qui préoccupe les ONG.
Le site change.org accueille ainsi une pétition adressée au gouvernement belge pour retirer la 5G. À l’heure d’écrire ces lignes, elle dépassait les 50.000 signatures et en gagne de nouvelles chaque seconde. ‘Nous connaissons le désastre que cela entraînerait aussi bien pour la faune que pour nous humains’, indique l’instigatrice de la pétition, Marie Laure Beraud. ‘Comment est-ce possible à l’heure où nous avons la preuve des nuisances qu’elle engendrerait?’
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Pourtant, l’Organisation mondiale de la santé indique que rien ne prouve encore le danger pour la santé humaine causé par l’exposition à des champs électromagnétiques de faible intensité. Une absence d’effet avéré à court terme, certes, mais certaines études mentionnent bien ‘une possible augmentation du risque de tumeur cérébrale, sur le long terme, pour les utilisateurs intensifs de téléphones portables’, indique l’Agence de sécurité sanitaire française Anses. Celle-ci a également estimé que les ondes des objets connectés pouvaient altérer les fonctions cognitives des enfants, telles que la mémoire et la coordination.
Le CIRC (une agence de recherche sur le cancer de l’OMS) a par ailleurs classé en 2011 les radiofréquences comme ‘peut-être cancérigènes pour l’homme’. Il faudra donc encore patienter pour connaître le vrai danger sanitaire de la 5G, en espérant qu’il ne soit pas trop tard.
À court terme, aucune étude ne prouve de manière indéniable la nocivité de la 5G pour la santé de l’homme.
3. Quel coût environnemental?
Conjointement au danger sanitaire se pose la question de l’impact de cette nouvelle technologie sur l’environnement. La planète va déjà mal, inutile de le rappeler. Et pourtant cette question est souvent négligée par les défenseurs de la 5G. Pour anticiper les conséquences de cette technologie, il faudrait connaitre l’ampleur de son déploiement dans le monde, ce qui est actuellement impossible. Ce que l’on sait déjà par contre, c’est que cette nouvelle technologie nous incitera à jeter prématurément nos smartphones pour nous procurer des appareils compatibles, sollicitera davantage le réseau mobile et forcera les opérateurs à fabriquer de nouveaux équipements réseau. ‘Rien’ que ça, c’est déjà une catastrophe pour l’environnement.
C’est en tout cas l’avis de l’astrophysicien français Aurélien Barrau, interrogé sur Canal + : ‘On va multiplier par trois la consommation des opérateurs en quelques années. On va également extraire de nombreux matériaux pour multiplier les relais, et on va devoir créer des milliards de nouveaux téléphones portables (…). Le coût est littéralement exorbitant. Il faudrait qu’on devienne sérieux et qu’on regarde la balance bénéfice/risque.’
4. Est-ce le bon moment?
La seule question à pouvoir vraiment trouver réponse. Non, le timing de cette annonce n’est pas idéal, dans un cas comme dans l’autre. Nous traversons une crise sanitaire sans précédent, lancer une technologie potentiellement dangereuse pour la santé à ce moment précis, ce n’est sans doute pas la chose la plus adroite. ‘À l’heure où nous voyons à quel point nous sommes faibles au regard de cette pandémie, il est inadmissible de profiter de ce temps de confinement pour nous imposer cette folie’, indique l’instigatrice de la pétition mentionnée ci-dessus. ‘Interpellant’, pour le député fédéral Ecolo Gilles Vanden Burre qui compte bien se saisir de la question devant le ministre des Télécoms, Philippe De Backer (Open VLD), déjà bien occupé à solutionner le manque de masques lié à la crise sanitaire.
La députée MR au parlement bruxellois Aurélie Czekaiski pense au contraire qu’il faudrait aller plus vite, notamment à Bruxelles, absente des zones de test de Proximus. Elle rappelle que ‘la norme bruxelloise est 2 fois plus basse qu’en Wallonie, 4 fois plus qu’en Flandre et 50 fois plus que les recommandations de l’OMS’.
Ce qui est certain, c’est que la polémique est lancée. Pro et anti-5G s’affrontent sur les réseaux sociaux. Le chroniqueur Marcel Sel indique lui que la Première ministre Wilmès croule maintenant sous les messages d’activistes anti-5G.
Mais si la 5G suscite autant de méfiance de la part des citoyens, c’est que le débat doit encore être nourri. Que ces questions doivent encore trouver des réponses et que la communication n’a pas été optimale. En ce sens, le déploiement de Proximus en pleine crise sanitaire n’est sans doute pas des mieux réussi.
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