L’économie de la cocaïne: ‘Je me suis aperçu que la coke était l’axe autour duquel tout tournait’

L’écrivain italien Roberto Saviano est un héros de la trempe de Giovanni Falcone et Paolo Borsellino, qui ont été tous deux tués par la mafia dans les années 90 du siècle dernier. Saviano a passé la majeure partie de ces 10 dernières années à écrire sur les pratiques criminelles de la mafia napolitaine, connue sous le nom de Camorra. Son livre ‘Gomorra’ (2008) s’est vendu à des millions d’exemplaires et il a été traduit dans 20 langues.

Mais la vie de Saviano est un enfer, car il paie un lourd tribut pour l’œuvre de sa vie. Depuis le 13 octobre 2006, il vit sous protection policière, et il est accompagné de 5 à 7 carabinieri – le corps d’élite qui est responsable de sa sécurité – partout où il se rend.

En avril 2013, Saviano a publié un nouveau livre, « Zéro Zéro Zéro », consacré à la cocaïne, qu’il a dédié à ses gardes du corps, parce que désormais, il lui est devenu impossible d’entretenir des relations normales avec d’autres personnes. Quiconque s’approche de lui est condamné à devenir une cible de la Camorra.

Le titre est une métaphore avec la catégorie de farine la plus pure, la plus blanche, c’est à dire la farine de type 45, que les Italiens appellent « farine 000 », qui évoque la cocaïne. 

En voici une courte anthologie:

– Au Mexique, depuis 2007, plus de 100.000 personnes ont été tuées par la violence liée au trafic de drogue, et 300.000 personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays. Si ces événements se produisaient dans d’autres circonstances, le monde évoquerait une catastrophe humanitaire. Mais au Mexique, ce massacre continue.

– L’économie de la cocaïne génère cette férocité parce que sa rentabilité est disproportionnée. Toute personne ayant investi la somme de 1.000 euros dans des actions d’Apple en 2012 en aurait retiré  1.670 euros 12 mois plus tard. Mais le même investissement réalisé en cocaïne aurait permis de retirer  environ 182.000 euros au terme de la même période. Les barons de la drogue n’ont donc aucun scrupule pour écarter les potentiels concurrents.

– Ceci, bien sûr à la condition que votre investissement transite en toute sécurité de la jungle colombienne aux rues de Londres, où la police britannique ne parvient guère à intercepter plus de 20% de la cocaïne entrant dans le pays.

– A l’apogée de sa puissance, le cartel de la drogue de Pablo Escobar dépensait 2.500 dollars par mois en bandes de caoutchouc pour regrouper les billets de banque issus des recettes du trafic de drogue.

– Dans certains pays comme la Colombie, le trafic de drogue a été bâti sur l’héritage de la violence politique qui l’avait précédée. Mais à Rio de Janeiro – où ce n’est pas le cas – la guerre de la drogue dans les années nonante a conduit à l’un des taux d’homicides les plus élevés du monde. Les morts n’étaient pas uniformément répartis entre les différentes populations, et 70% des victimes étaient des jeunes non-blancs.

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