« L’économie chinoise connait sa pire crise en 30 ans »

C’est l’avis Weijian Shan, fondateur de l’un des plus grands fonds d’investissement asiatique. Selon le Hongkongais, la Chine est « dans une crise profonde ».

« Nous pensons que l’économie chinoise est en ce moment dans la pire situation des 30 dernières années », estime celui qui, via son fonds d’investissement, le groupe PAG, préfère désormais mettre ses billes à l’étranger plutôt qu’en Chine.

C’est aussi vrai pour les marchés: « Le sentiment à l’égard des actions chinoises est également au plus bas sur les 30 dernières années. Je pense aussi que le mécontentement populaire en Chine est à son plus haut niveau depuis 30 ans. »

Les points chauds

En cause, les règles de confinement strictes qui encadrent des villes comme Shanghai, l’un des poumons économiques de la Chine. Alors que la menace pèse désormais sur Pékin, la politique zéro-covid du régime chinois a bien du mal à s’accorder avec la relance, défiant même l’obéissance des citoyens chinois.

L’indice CSI 300, l’indice boursier chinois des 300 plus grandes actions négociées à la Bourse de Shanghai et à la Bourse de Shenzhen, affiche une perte de 20% par rapport à l’année dernière. Le prix des matières premières comme le pétrole chinois sont en chute libre devant la crainte d’une baisse de la demande, tandis que le yuan poursuit sa chute, à son point le plus bas depuis la première crise du covid en 2020.

En conséquence, les investisseurs étrangers prennent leurs jambes à leur cou, d’autant qu’ils avaient déjà été refroidis par les régulations strictes et répétées de Pékin sur certains secteurs comme la tech:  « Les investisseurs mondiaux ne veulent pas jouer aux devinettes en matière de règlementation ni s’inquiéter du fait que les nouvelles du lendemain risquent d’affaiblir une autre entreprise ou un autre modèle économique par ailleurs attrayant », a expliqué Brock Silvers, de la société d’investissement chinoise Kaiyuan Capital, à CNN Business.

Dans le cadre de la campagne de « prospérité commune » voulue par le président Xi Jinping, certains investisseurs internationaux estiment que l’ingérence du gouvernement chinois s’est accrue. Sans compter l’interdiction qui a cours pour les entreprises chinoises de lever des capitaux à l’étranger ou de s’introduire en bourse aux États-Unis.

La riposte

Le régime chinois tente de rectifier le tir et annonce une vague d’assouplissements dans la régulation par-ci, un soutien aux banques pour sauver la face du yuan par-là.

Le dernier plan mis sur la table vise les infrastructures. Xi Jinping a déclaré que « tous les efforts possibles » doivent être faits pour accroître la demande et promouvoir la croissance.

Ces investissements devront porter notamment sur le transport, l’énergie et l’eau, et l’informatique, comme les super-ordinateurs, les services de cloud et l’intelligence artificielle. Selon le président chinois, l’infrastructure actuelle est incompatible avec les ambitions de développement et de sécurité du pays. Voilà pour les intentions, aucune somme ou échéance n’a été avancée.

« Pour nous, la Chine ressemble aux États-Unis et à l’Europe en 2008 », a ajouté Shan. « Bien que nous restions confiants à long terme dans la croissance et les potentiels de marché de la Chine, nous sommes très prudents à l’égard des marchés chinois », a estimé l’investisseur dont les propos ont été rapportés par le Financial Times.

Car il ne s’agit pas d’un commentaire à la presse, mais d’une conversation entre investisseurs qui a fuité. Or, il est inhabituel pour des cadres éminents qui font des affaires en Chine de critiquer ouvertement le pays ou le gouvernement. Le Financial Times rappelle que le patron de la banque américaine JP Morgan, l’Américain Jamie Dimon, a dû présenter ses excuses par deux fois suite à une plaisanterie sur le fait que sa banque allait survivre au Parti communiste chinois.

Shan est l’un des vétérans financiers les plus en vue de Hong Kong et de la Chine continentale. Il a fondé PAG en 2010. Plus tôt cette année, il a été nommé au conseil d’administration d’Alibaba en tant qu’administrateur indépendant. Il a également siégé aux conseils d’administration de la Bank of China Hong Kong, appartenant à l’État, de Baosteel, un producteur d’acier appartenant à l’État chinois, et de Lenovo, la plus grande société informatique de Chine.

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