Célébre investisseur britannique, Jeremy Grantham a livré une interview très pessimiste sur l’état actuel du marché. Pour lui, la situation est pire que celles de 1929 et de 2000. Le krach approche.
Quand Jeremy Grantham parle, on a plutôt intérêt à l’écouter. En 1989, il avait averti au sujet du futur éclatement de la bulle des prix des actifs japonais. Même chose en 2000 pour la bulle technologique quelques mois après. Rebelote en 2008 pour la bulle immobilière. Certains en sont venus à le qualifier de « bulle-ologiste ».
D’après lui, nous sommes à nouveau à l’aube d’une très grave crise financière. En janvier dernier, il a écrit une lettre aux investisseurs, « Waiting For the Last Dance », sur le gonflement d’une bulle qui « pourrait bien être l’événement le plus important de votre vie d’investisseur ».
Ce qui lui a valu de vives critiques. « Des vagues de fanatiques du bitcoin m’ont attaqué de toutes les manières possibles. Ils m’ont dit que […[ je devais être enfermé dans une maison de retraite », a-t-il confié.
Six mois plus tard, dans une interview à Reuters, il remet le couvert: le danger est imminent.
« Au coin de la rue se cachent de sérieux problèmes »
« Les bulles sont incroyablement faciles à voir; il est plus difficile de savoir quand l’effondrement aura lieu. On le voit lorsque les marchés font la une des journaux au lieu des pages financières, lorsque les nouvelles sont pleines d’histoires de gens qui se font escroquer, lorsque de nouvelles pièces sont créées chaque mois. L’ampleur de ces phénomènes est tellement plus grande qu’en 1929 ou en 2000 », explique M. Grantham.
« Mon indicateur préféré est le ratio prix/ventes : ce que l’on constate, c’est que même les parties les moins chères du marché sont beaucoup plus chères qu’en 2000 », ajoute-t-il.
Pour l’investisseur, les bulles éclatent « quand les marchés atteignent leur sommet, lorsque vous êtes aussi heureux que possible et qu’une économie quasi parfaite est extrapolée dans un avenir indéfini ». « Mais au coin de la rue se cachent des problèmes sérieux comme les taux d’intérêt, l’inflation, les prix du travail et des matières premières. Tous ces éléments commencent à être moins optimistes qu’il y a seulement une ou deux semaines », souligne-t-il.
Pour quand ?
S’il a reconnu qu’il était difficile de donner une échéance précise, il a tout de même averti que l’éclatement était probablement tout proche.
« Un effondrement pourrait prendre quelques mois de plus, et, en fait, je l’espère, car cela nous donnera l’occasion d’avertir plus de gens. La plus forte probabilité est que cela se prolonge jusqu’à l’automne: les mesures de relance, la reprise économique et les vaccinations ont permis à tout cela de durer quelques mois de plus que ce que j’avais initialement deviné », a-t-il concédé.
Quant à la nature de l’élément qui fera éclater la bulle, il ne la connait pas. Nouvelle vague de coronavirus, problème relatif à l’inflation ou – et c’est le plus probable, selon lui – quelque chose d’inattendu: de nombreux dangers se profilent.
Selon M. Grantham, ce krach se traduira en un « énorme effet de richesse négatif », plus important que jamais ». « C’est la première fois que nous avons une bulle dans autant de domaines différents – taux d’intérêt, actions, logement, matières premières non énergétiques. En montant, elle nous a donné un effet de richesse positif, et en descendant, elle va se rétracter, douloureusement », prévient-il.
Pour s’en prémunir, le cofondateur de la société d’investissement Grantham, Mayo, & van Otterloo (GMO) conseille de se rabattre sur les liquidités et « les classes d’actifs les moins mauvaises et les moins surévaluées », à savoir « les actions dépréciées et les marchés émergents ».
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