En Islande, une entreprise se lance dans le pompage du carbone atmosphérique pour le changer en pierre. Une démarche coûteuse, mais qui permet de compenser un tant soit peu nos émissions. Et cette technologie a le vent en poupe : elle intéresse même le secteur du pétrole.
Au rythme où on rejette du carbone dans l’atmosphère, réduire drastiquement nos émissions reste essentiel, mais cela risque de ne pas suffire à limiter les dégâts sur la planète. Partout dans le monde, des scientifiques se penchent plutôt sur le stockage de ce gaz à effet de serre. Comme dans les grandes forêts ou au fond des océans, qui représentent des immenses poches naturelles de carbone qui n’est ainsi pas relâché dans l’atmosphère. Mais aussi pour le capter et l’enfuir très profondément; c’est exactement ce à quoi est destiné le projet Orca.
Orca signifie tout simplement énergie en islandais, et c’est le nom qui a été donné à cette usine issue d’un partenariat entre la start-up suisse Climeworks AG et la firme islandaise de captage de carbone Carbfix. Le site, qui ressemble à première vue à une série de containers dotés d’étranges tuyères, a été mis en marche ce mercredi. Le projet, ambitieux, avait été lancé en 2011.
La solution c’est la roche
Grâce à un système de filtres et de ventilateurs, Orca est capable d’extraire le carbone présent dans l’air ambiant. Celui-ci est ensuite dissous dans de l’eau, qui sera ensuite pompée profondément sous terre. Dans les profondeurs, le carbone va très lentement décanter et reprendre naturellement son cycle naturel, se cristallisant en pierre calcaire. L’ensemble du processus est alimenté en énergie par les sources d’eau chaude voisines.
Attention au green washing
Orca est le plus grand site de ce genre au monde actuellement, et il est capable de capturer et de stocker durablement jusqu’à 4.000 tonnes de CO2 par an. Soit les émissions annuelles rejetées par 790 voitures. Une goutte d’eau par rapport aux 31,5 milliards de tonnes de CO2 que nous produisons annuellement, selon l’International Energy Agency. Mais une preuve que cette technologie fonctionne. Il existe actuellement 15 sites de ce type à travers le monde, captant un total de 9.000 tonnes de CO2 par an. Et le captage de carbone bénéficie d’un véritable engouement dans… l’industrie pétrolière.
Occidental Petroleum Corporation est en train de développer un site de capture de CO2 atmosphérique bien plus imposant, qui serait capable de pomper jusqu’à un million de tonnes de gaz par an autour de ses champs pétrolifères du Texas. Une manière de capter directement les émissions à leur source. Et aussi sans doute une belle occasion de green washing.
Car si le captage du carbone se révèle très probablement essentiel pour limiter l’ampleur du changement climatique, il ne remplacera pas la transition vers des énergies renouvelables. Le carbone que nous réinjectons dans la roche ne doit pas devenir un alibi pour continuer à en saturer l’atmosphère.
Pour aller plus loin :
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