La Réserve fédérale continue de tenter de freiner l’inflation avec une hausse de ses taux de 75 points de base. Pourtant, de plus en plus de signes indiquent que le pic d’inflation est déjà derrière nous. Pour l’instant, le dollar est le grand gagnant : même si le revirement de politique de la banque centrale américaine arrive trop tard.
La banque centrale américaine a relevé ses taux d’intérêt de 75 points de base ce mercredi. C’est ce que bon nombre d’analystes avaient prédit. Sur les marchés financiers, l’attention s’est donc davantage portée sur le ton de la Réserve fédérale que sur la hausse des taux elle-même. Et son message principal a été que de nouvelles hausses de taux sont à l’ordre du jour. La Fed n’aura pas peur de nuire à l’économie, si c’est nécessaire pour maîtriser l’inflation. La Fed a également révisé ses prévisions. Selon elle, la croissance économique américaine ne devrait plus être que de 0,2% en 2022, tandis que le chômage devrait augmenter à 4,5% en 2023.
Fermeté !
Lorsque l’on sait que l’indice des prix à la consommation (IPC) est supérieur à 8% depuis des mois, la fermeté de la Fed est compréhensible. Cette image change lorsque l’on examine la manière dont le taux d’inflation est construit et les résultats obtenus. Pour commencer, la hausse de l’IPC de cette année, qui est passé de 1,4 à 8,3%, est principalement due à l’augmentation des coûts de l’énergie et du logement. Toutefois, un net redressement se dessine sur ces deux marchés. Le prix du pétrole Brent est passé de plus de 120 dollars le baril début mars à moins de 90 dollars aujourd’hui. Même si les prix du pétrole restent à leur niveau actuel, les prix de l’énergie vont pousser l’inflation fermement vers le bas au cours de l’année 2023. Il en va de même pour le coût du logement, d’ailleurs. En effet, les prix de l’immobilier américain ont également déjà commencé à baisser fortement ces derniers mois.
Mais ne vaudrait-il pas mieux attendre ?
Il faut être juste : l’IPC n’est pas l’indicateur le plus fiable de la boussole de l’inflation de la Fed. La banque centrale préfère examiner les dépenses de consommation personnelle (PCE). Ce taux donne une image plus complète de la structure réelle des dépenses des ménages américains. Mais, à 6,3%, il est déjà beaucoup plus proche des 2% – visés par la Fed – que l’IPC.
En outre, la banque centrale n’a certainement pas une réputation à défendre lorsqu’il s’agit de prévoir et de contrôler l’inflation. La première hausse de taux, par exemple, n’est intervenue qu’à la mi-mars. À cette époque, l’inflation était déjà bien supérieure à l’objectif de la Fed, et il était clair que la hausse allait se poursuivre fortement.
Ne pariez pas (encore) contre le dollar
Il y a un réel danger que la Fed arrive à nouveau trop tard sur la balle. Si elle continue à augmenter les taux d’intérêt pendant trop longtemps – comme elle a attendu trop longtemps avant sa première hausse des taux au début de cette année – elle freinera inutilement la croissance économique. Par ailleurs, tant une nouvelle hausse des taux d’intérêt américains que les inquiétudes quant à l’approche d’une éventuelle récession jouent en faveur du dollar. En effet, le billet vert est aussi un refuge en période d’incertitude économique. Dans les mois à venir, il serait donc peu judicieux de parier contre le dollar. Il est plus sage d’attendre que l’inflation américaine diminue encore.
L’auteur, Joost Derks, est un spécialiste des devises chez iBanFirst. Cette chronique reflète son opinion personnelle et ne constitue pas un conseil professionnel d’investissement.
(OD)