‘Les hommes politiques qui ont sapé la confiance des citoyens dans les institutions ont tout d’un coup perdu la foi dans la coopération internationale, et nous en payons le prix fort’, affirme le philosophe israélien Yuval Noam Harari, dans une interview au magazine français Le Point.
En début d’année, Harari avait donné une conférence devant plus de 5.000 personnes à la Lotto-arena d’Anvers, un événement exclusif organisé par notre magazine-frère Newsweek.
Le philosophe juif s’étonne que les dirigeants mondiaux soient incapables de formuler une réponse globale au malaise économique et à la crise sanitaire qui ravagent désormais la planète entière. Selon l’Israélien, le nœud du problème résiderait dans le fait que de nombreux politiciens ne sont tout simplement pas fiables. Il espère qu’à l’avenir, les électeurs se rendront compte du danger qu’il y a à voter pour des politiciens xénophobes, ces derniers étant incapables d’établir une coopération mondiale.
Les politiciens comprennent bien moins le monde qu’ils ne le font paraître
Mais selon ce philosophe, le nationalisme et l’antimondialisme ne sont pas les seules caractéristiques du populisme actuellement au pouvoir dans de nombreux pays. Dans son livre ‘21 questions pour le 21e siècle’, Harari écrit que les politiciens comprennent bien moins le monde qu’ils n’aiment à le penser et à le faire paraître. Ils ignorent également sa complexité. Et cela engendre toute une série de conséquences, comme on peut le voir maintenant.
‘Des personnes qui n’y connaissent rien ou presque en météorologie expriment leur opinion sur le changement climatique. Des politiciens qui ne sont jamais allés au Moyen-Orient ou en Ukraine, et qui ont même du mal à les situer sur une carte, nous expliquent quelles sont les meilleures solutions pour résoudre les conflits qui y sévissent. Les politiciens sont souvent entourés de béni-oui-oui. Des personnes qui ont pris l’habitude de dire à leur patron ce qu’il veut entendre’.
Mais selon M. Harari, la clé des crises comme celle que nous traversons aujourd’hui est la solidarité internationale. ‘Aucun pays ne peut résoudre à lui seul les graves problèmes auxquels nous sommes confrontés aujourd’hui. Ils appellent à des solutions au niveau mondial’.
‘Si le projet européen échoue, comment espérer que le reste du monde réussisse?’
L’UE ne parvient pas non plus à apporter une réponse paneuropéenne à la crise. Néanmoins, Harari adopte régulièrement des positions pro-européennes:
‘L’Union européenne représente à ce jour la tentative la plus réussie pour trouver un juste équilibre entre les intérêts nationaux, régionaux et mondiaux. Elle a permis une coopération efficace entre des centaines de millions de personnes. Sans leur imposer un gouvernement, une langue ou une nationalité unique. Elle a créé l’harmonie sans imposer l’uniformité.’
Si l’Europe parvient à apprendre au reste du monde comment promouvoir l’harmonie sans uniformité, alors l’humanité a d’excellentes chances de bien se porter au cours du siècle prochain, a-t-il déclaré dans une interview au journal Le Monde l’année dernière. ‘Si le projet européen échoue, comment pouvons-nous espérer que le reste du monde réussisse?’