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La Chine et le chômage des jeunes : « Il n’y a pas de problème si on arrête de publier les chiffres »

La Chine et le chômage des jeunes : « Il n’y a pas de problème si on arrête de publier les chiffres »
Une foire à l’emploi en Chine, et des jeunes par milliers. (Photo by VCG/VCG via Getty Images)

La Chine ne publiera pas de nouveaux chiffres sur le chômage des jeunes, prétextant des problèmes de méthodologie et un besoin d’affiner les critères. C’est la meilleure façon d’annoncer sans le dire réellement que les chiffres sont vraiment mauvais. Les dernières données indiquaient qu’un jeune urbain sur cinq est sans-emploi, et c’est sans doute sous-estimé.

Pourquoi est-ce important ?

La croissance chinoise est à l'arrêt et le pays est officiellement entré en déflation : la demande intérieure se tasse tellement que les prix des biens de consommation sont en baisse. Une spirale dangereuse pour l'économie et dont les causes sont multiples, mais parmi lesquelles on peut citer le chômage massif des jeunes, en particulier urbains et diplômés.

Des chiffres poussés sous le tapis

Les chiffres : les dernières données de l’Office national chinois des statistiques sont sorties en juillet et traitaient du mois de juin. Elles faisaient état d’un taux de chômage moyen dans le pays de 4,82%. Celui-ci montait à 5,2 % dans les villes. Chez les jeunes de 16 à 24 ans, le taux de chômage grimpe en flèche : 20,4 % en avril, 20,8 % en mai, et 21,3 % en juin. Mais il n’y aura pas de chiffres pour les mois suivants.

  • L’Office national a annoncé qu’il suspendait la publication de données plus récentes sur cet enjeu, rapporte CNN. Fu Linghui, le porte-parole de l’institution, a justifié cette décision en prétextant que les statistiques actuelles « doivent être améliorées. »

« Si les étudiants qui cherchent un emploi avant l’obtention de leur diplôme doivent être inclus… c’est un point sur lequel les gens ont des avis différents. Cela nécessite des recherches plus approfondies. Définir la tranche d’âge des ‘jeunes chercheurs d’emploi’ nécessite également une étude plus approfondie, car les jeunes passent maintenant plus d’années à l’école. »

Fu Linghui

L’institution officielle va donc mettre à jour sa méthodologie avant de publier de nouvelles données sur la question. Dans un pays d’obédience communiste, cela en dit long sur les résultats obtenus avec les anciennes méthodes.

Des diplômés par millions

  • Le contexte est aussi à prendre en compte : de nombreux étudiants chinois vont bientôt arriver sur le marché du travail, une fois terminés leurs examens. Pas moins de 11,6 millions de diplômés sont sortis des écoles cette année, un record.
  • Mais ce sont ces jeunes diplômés qui viennent massivement grossir les rangs des chômeurs : il y a de moins en moins de débouchés pour ces jeunes ultra-qualifiés. Or, les nouveaux arrivés sur le marché de l’emploi ne veulent pas opter pour des jobs qui ne correspondent pas à leurs attentes, en termes de rémunérations ou de prestige social.
  • Un nouveau phénomène est d’ailleurs apparu récemment dans les villes chinoises : celui des « enfants à temps plein« . Le concept n’est pas de rester à la maison à vivre aux crochets de ses parents, bien au contraire : il s’agit de s’occuper des tâches ménagères et des courses pendant que ceux-ci travaillent encore.
  • Bref, se rendre utile, contre rémunération. Mais comme ces jeunes ne cherchent pas d’emploi, ils passent sous le radar des statistiques officielles, qui sous-estiment en fait probablement le taux réel de non-emploi chez les moins de 25 ans.
  • Sans surprise, la décision de l’Office national des Statistiques de ne pas publier les derniers chiffres a été accueillie avec scepticisme et dérision, y compris par les Chinois eux-mêmes, sur les réseaux sociaux. Ce n’est pas parce qu’on refuse de montrer une mauvaise nouvelle qu’on la cache réellement, bien au contraire.
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