Le gouvernement chinois s’est enfin décidé à adopter une série de mesures qui doit revigorer sa reprise économique moribonde. La question est de savoir de quelle marge de manœuvre bénéficie vraiment Pékin.
Dans l’actu : la Chine face à la déflation.
- La relance chinoise est toujours aussi décevante. L’activité manufacturière a chuté pour le quatrième mois consécutif en juillet. Les secteurs des services et de la construction sont au bord de la contraction.
- Le chômage des jeunes âgés de 16 à 24 ans a atteint le taux record de 21,4 %, en juin, ont indiqué les autorités. Mais ce taux pourrait être deux fois plus important, selon Zhang Dandan, professeure associée d’économie à l’université de Pékin, qui a réfuté les chiffres officiels dans un article d’opinion publié dans le magazine chinois Cai Xin.
- La Chine connaitra son inflation pour le mois de juillet, ce mercredi. Mais il faut plutôt parler de déflation : après un repli des prix à la production, les prix à la consommation devraient, eux aussi, entrer en territoire négatif, à -0,5% selon les économistes interrogés par Bloomberg.
La réponse : face à ses résultats économiques décevants, la Chine change son fusil d’épaule.
- Pékin s’est enfin décidé à prendre le taureau par les cornes. En tout cas, ce sont ses intentions. Fin juillet, le Politburo énonçait un par un les secteurs en difficulté et les réponses politiques à y apporter.
- Il était notamment question d’attirer davantage de capitaux privés, de mieux favoriser les entreprises privées ou encore de soutenir la consommation des ménages.
L’essentiel : la Chine en a-t-elle vraiment les moyens ?
- C’est la question que se pose CNN Business ce lundi. Mais le média américain qui a interrogé plusieurs économistes est sceptique. 2023, n’est pas 2008. À l’époque, les dirigeants chinois ont sorti de leur chapeau un plan à 4.000 milliards de yuans (586 milliards de dollars) pour minimiser l’impact de la crise financière mondiale. Un véritable succès : la croissance du PIB est grimpée jusqu’à 9% au deuxième trimestre 2009. Souvenez-vous, c’était l’époque où tout le monde pensait que la Chine allait dépasser les États-Unis comme première puissance économique mondiale.
- Mais ce déploiement budgétaire basé sur les infrastructures a eu un effet pervers : l’endettement. État, entreprises et ménages se sont retrouvés surendettés. Les dirigeants chinois ont juré en 2012 qu’on ne les y reprendrait plus. Le coût était trop important.
- Entre-temps, 3 années de crise Covid sont passées par là. Les analystes estiment que l’encours de la dette publique chinoise a dépassé les 123 000 milliards de yuans (18 000 milliards de dollars) l’année dernière. La Chine n’a plus les moyens d’une telle politique.
- « Il semble peu probable que les décideurs chinois adoptent une relance monétaire ou budgétaire majeure, craignant probablement que cela n’exacerbe les risques croissants d’endettement de la Chine », a déclaré Craig Singleton, chercheur principal sur la Chine à la Fondation pour la défense des démocraties.
- « Aucune [stimulation budgétaire] n’a été annoncée, ce qui semble indiquer que les décideurs chinois se méfient toujours d’une augmentation trop rapide de la dette publique », abonde Garcia-Herrero, chef économiste pour l’Asie auprès de la Banque d’investissement Natixis.
- « Tout au plus, nous pouvons nous attendre à de maigres mesures, principalement axées sur l’offre, visant ostensiblement, entre autres, à attirer davantage de capitaux privés et à stimuler la possession de véhicules électriques », a ajouté Singleton.
- Au niveau des ménages, la crise immobilière est encore dans toutes les têtes. Les entreprises font face à une demande intérieure très décevante et une demande extérieure plutôt faible. « La grande préoccupation est de savoir si les outils politiques dont les dirigeants disposent auront beaucoup de poids pour essayer d’éviter la déflation », s’interrogeait également Eswar Prasad, dans le Wall Street Journal, la semaine dernière.
- La spirale négative n’est alors plus très loin : face aux mauvaises perspectives économiques, les ménages et les entreprises préfèreront rembourser leurs dettes plutôt que de dépenser ou d’investir.
Conclusion : si la Chine veut éviter que son économie s’embourbe encore plus, elle devra transformer ses intentions en actes.