La Banque centrale européenne (BCE) pourrait relever ses taux d’intérêt avant de mettre fin à son programme d’achat. C’est ce que suggère Robert Holzmann, responsable de la politique de la BCE. Le gouverneur de la banque centrale autrichienne remet ainsi en question une opinion de longue date de la banque sur la séquence de ses mesures politiques.
« La BCE pourrait relever les taux d’intérêt en été – avant de mettre fin au programme d’achat »
Pourquoi est-ce important ?
L'inflation ayant atteint de nouveaux records au cours des derniers mois, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, s'est éloignée du récit selon lequel une hausse des taux restait peu probable cette année. Toutefois, on estime qu'avant d'annoncer une hausse des taux d'intérêt, le programme d'achat d'obligations doit d'abord être interrompu. La "séquence" des mesures politiques n'a jusqu'à présent été ouvertement remise en question par personne au sein du conseil des gouverneurs de la BCE.« En fait, la BCE a toujours signalé dans ses perspectives de taux d’intérêt qu’une hausse des taux ne devrait avoir lieu que peu de temps après la fin des achats d’obligations », soulève M. Holzmann dans le journal suisse Neue Zürcher Zeitung. « Mais il serait également possible d’avoir une première étape de taux d’intérêt en été, avant la fin des achats, et une seconde à la fin de l’année. Je préférerais cette variante », semble-t-il.
Un « signal important »
M. Holzmann, qui est considéré comme un faucon en raison de son soutien à une politique monétaire restrictive, estime que la fin de l’ère des taux d’intérêt négatifs constitue un « signal important » pour la société et les marchés. Il dit aussi qu’il aimerait que les taux d’intérêt soient relevés deux fois d’ici la fin de 2022 ou le début de 2023.
« Certains de mes collègues seraient peut-être plus progressistes ici, tandis que d’autres seraient plus prudents« , explique le gouverneur de la banque centrale autrichienne.
Selon M. Holzmann, un taux directeur d’environ 1,5 % serait une référence pour une politique monétaire neutre : « Je pense qu’un taux de base d’environ 1,5 % en 2024 pourrait être réaliste, bien que cela puisse très bien évoluer vers l’avant ou vers l’arrière. »
Sa motivation ? « Pour moi, le plus grand danger est que les anticipations d’inflation deviennent incontrôlables, car il faudrait beaucoup d’argent pour les rattraper à nouveau. Beaucoup de choses seraient alors remises en cause, y compris la transition énergétique », conclut-il.
Avant la fin de l’année ?
La discussion avait auparavant porté sur la date à laquelle le PEPP, le programme d’achat d’urgence en cas de pandémie créé en mars 2020, pourrait être supprimé progressivement. Normalement, le programme PEPP est interrompu en mars et remplacé par le programme APP, qui était en place avant la pandémie.
L’argument contre une hausse des taux d’intérêt avant la fin des achats d’obligations est que cela permettrait à la BCE d’appuyer sur l’accélérateur et sur le frein.
Cela aurait également pour effet d’aplatir la courbe des taux d’intérêt, écrit Reuters. Cela serait préjudiciable à la rentabilité des banques, car elles bénéficient de la différence entre les taux d’intérêt sur les prêts et l’épargne.
La prochaine réunion officielle de la BCE aura lieu le 10 mars ; ce jeudi, les banquiers centraux se réunissent de manière informelle à Paris. Les économistes s’attendent à ce que la séquence des mesures politiques soit maintenue. Les responsables politiques devraient signaler la fin du programme d’achat au troisième trimestre, ouvrant ainsi la porte à une hausse des taux avant la fin de l’année.