Les Argentins se rendent aux urnes dimanche pour élire un nouveau président. Dans les sondages, un outsider radical est en tête : « l’anarcho-économiste » Javier Milei. Ce dernier veut mettre fin à 75 ans de péronisme, qui ont relégué l’Argentine – autrefois le pays le plus riche de la planète – dans les profondeurs de la communauté internationale.
L’outsider radical Javier Milei veut mettre fin à 75 ans de destruction de l’Argentine, ce dimanche

Pourquoi est-ce important ?
L'Argentine a tout pour elle. C'est le huitième plus grand pays du monde. Plus d'un tiers de sa superficie est constitué de terres agricoles très fertiles. L'Argentine possède d'importantes réserves de pétrole et de gaz et les quatrièmes réserves de pétrole de schiste au monde. Elle possède une industrie vinicole de renommée mondiale, une population jeune, un patrimoine culturel de premier ordre, une industrie touristique florissante et exporte des footballeurs de classe mondiale. Mais ce qui manque à l'Argentine depuis des décennies, c'est une classe politique responsable et compétente.Un outsider radical
Dans l’actu : Javier Milei, économiste libertaire et outsider radical, continue d’accroître son avance dans les sondages.
- Le leader de « La Libertad Avanza » a obtenu 31 % des voix lors des primaires du mois d’août, devenant ainsi le grand favori de l’élection présidentielle du 22 octobre. Le parti d’opposition Juntos por el Cambio a obtenu 28 % des voix, tandis que les péronistes au pouvoir sont restés à 27 %. Dans le sondage ci-dessous, Milei a encore accru son avance.

Qui est Javier Milei ?
Zoom avant : Les rassemblements de Javier Milei, qui ressemblent à des concerts de rock, et son attrait pour le populisme sont souvent comparés à ceux de Donald Trump.
- Bien que Milei soit parfois décrit comme la réponse de l’Argentine à Donald Trump ou à Jair Bolsonaro au Brésil, sa philosophie politique diffère de ces deux derniers.
- Le nationalisme n’est pas un élément majeur de son message. Son libéralisme économique extrême ne tolérerait pas les importants déficits publics de Trump ou les dépenses électorales de Bolsonaro pour l’aide aux pauvres.
- Cependant, comme Trump, il possède un talent naturel pour divertir. À ce titre, il est un invité convoité des programmes télévisés.
- Milei n’est certainement pas irréprochable. Il demande l’abolition de la banque centrale argentine et veut remplacer le peso par le dollar. En outre, il souhaite privatiser les entreprises publiques et réduire considérablement la réglementation des entreprises.
- Il souhaite également légaliser la vente d’organes humains sans intervention du gouvernement. Enfin, il pense que l’éducation sexuelle dispensée dans les écoles argentines fait partie d’une conspiration de l’élite visant à détruire la famille traditionnelle.
75 ans de « péronisme »

Zoom arrière : L’Argentine souffre d’une mauvaise gestion économique depuis des décennies. C’est une conséquence du « péronisme », une idéologie politique non officielle conçue par Juan Domingo Péron, un militaire qui sera élu président de son pays à trois reprises, de 1946 à 1955 et de 1973 à 1974.
Péron, un « überpopuliste » autoritaire
- Péron était un überpopuliste autoritaire, qui s’inspirait de Mussolini et du manifeste politique d’Hitler, Mein Kampf. Péron comprenait ce qui animait les classes défavorisées argentines, les « descamisados ».
- Le philosophe argentin Mario Bunge qualifie le péronisme de « phénomène unique, regroupant des influences de toutes sortes : du fascisme et du socialisme au communisme, et du corporatisme soutenu par l’État au national-syndicalisme ».
- En résumé, Péron est le premier à avoir réussi à créer un vaste mouvement politique qui, malgré l’opposition des élites, regroupait les syndicats et les travailleurs. Le péronisme a ainsi comblé un vide laissé par les partis traditionnels.
- Cela se traduit par un appareil d’État puissant mais intouchable, combiné à l’enrichissement personnel de politiciens corrompus, un protectionnisme brutal qui favorise les entrepreneurs favorables au gouvernement, de puissants syndicats contrôlés par l’État qui paralysent le pays à volonté, et un système judiciaire ultrapolitisé.
- Tout cela dans un pays qui a toujours vécu au-dessus de ses moyens et qui s’est mis en « défaut de paiement » jusqu’à huit fois au cours des 100 dernières années.
- Quatre Argentins sur dix vivent dans la pauvreté. Le taux d’intérêt directeur est aujourd’hui proche de l’inflation… à 133 %.
- La base de données du projet Maddison, basée aux Pays-Bas, présente ci-dessous les destructions causées par 75 ans de péronisme ? – sur la base du PIB par habitant.

Zoom arrière : Les politiciens anti-establishment ont la cote.
- Trump a représenté une rupture totale avec la classe politique américaine.
- En 2018, les électeurs brésiliens épuisés par les scandales et la stagnation de l’économie ont choisi Jair Bolsonaro.
- Des outsiders politiques ont également accédé au pouvoir au Chili et, pas plus tard que dimanche dernier, en Équateur.
- La probabilité que Milei réussisse n’est donc pas négligeable. Une tâche ardue l’attend, mais il pourrait compter sur le soutien de la Propuesta Republicana (2015 – 2019) de l’ancien président Mauricio Macri et de Juntos por el Cambio de Patricia Bullrich. Cette dernière a été ministre dans le gouvernement Macri. Ces deux partis pourraient apporter à Milei le soutien d’un gouvernement de droite stable.
(SR)