En janvier dernier, le Suiso Frontier s’est chargé de la toute première livraison internationale d’hydrogène liquide. Il apparaît à présent qu’un incendie s’est déclenché à bord du navire juste avant son départ, alors qu’il avait déjà été chargé.
Parti de Hastings, au sud de Melbourne (Australie), le 28 janvier dernier, le Suiso Frontier est arrivé à Kobe (Japon) le 25 février, acheminant avec succès la première cargaison mondiale d’hydrogène liquide. Mais au vu de l’enquête lancée par l’Australian Transport Safety Bureau (ATSB), l’agence fédérale chargée d’enquêter sur les accidents aériens, maritimes et ferroviaires, l’opération a failli tomber à l’eau.
En effet, l’ATSB a annoncé qu’un incendie s’est déclaré à bord du navire le 25 janvier, soit trois jours avant son départ. Il n’y a eu ni blessé ni problème de pollution, mais selon la fiche signalétique dédiée à l’enquête, l’événement a été classé parmi les « incidents graves ».
« L’ATSB enquête sur un dysfonctionnement de l’équipement de contrôle de la pression du gaz à bord du transporteur de gaz Suiso Frontier après que le navire ait chargé de l’hydrogène liquéfié à Western Port, Hastings », indique l’agence. « Une flamme a été aperçue sur le pont en provenance de l’échappement de l’unité de combustion de gaz. L’unité a été immédiatement arrêtée et isolée avant que l’équipage ne mette en œuvre le plan d’intervention de prévention des incendies. »
« Si un problème de sécurité critique est identifié à tout moment au cours de l’enquête, l’ATSB en informera immédiatement les opérateurs et les régulateurs afin que des mesures de sécurité appropriées et opportunes puissent être prises. Un rapport final sera publié à la fin de l’enquête », conclut l’agence australienne.
Une association en colère
Interrogée par le journal The News, Julia Stockigt, de Save Westernport, une association locale de protection de l’environnement, s’est dite « préoccupée par le fait que la violation de la sécurité à bord du Suiso Frontier ne semble pas avoir été signalée au public à l’époque. »
Elle a aussi dénoncé le fait que, selon elle, « depuis que le ministre de la Planification, Richard Wynne, a qualifié le projet de ‘projet essentiel pour Victoria’ en 2019, cela a permis à l’installation d’éviter l’examen minutieux d’une déclaration des effets sur l’environnement pour évaluer sa sécurité et d’autres impacts. »
Gros enjeu
Comme le rappelle Recharge, l’objectif de ce projet pilote est de démontrer qu’expédier de l’hydrogène liquide d’Australie au Japon est viable et sécurisé. Une installation de liquéfaction de l’hydrogène (produit à partir de lignite australien) et une installation de chargement de cet hydrogène ont été placées au port de Hastings, spécifiquement pour le Suiso Frontier.
Le projet, qui coûte 500 millions de dollars australiens (environ 350 millions d’euros) est piloté par Kawasaki Heavy Industries, une multinationale japonaise qui produit notamment des tankers à gaz naturel liquéfié (GNL), et notamment soutenu par les gouvernements japonais et australien.
La viabilité du transport de l’hydrogène sous forme liquide a déjà été critiquée par une partie des spécialistes de la question. Certains estiment qu’il serait plus économique de l’expédier sous forme d’ammoniac. Sous forme liquide, le transport de l’hydrogène nécessite en effet des températures de moins 253°C. Il contient, aussi, moins d’H2 en volume que le NH3 (ammoniac).