Fermeture du plus grand champ gazier européen : « Les États-Unis et le Qatar pourraient en profiter »

Les Pays-Bas prévoient de fermer le plus grand champ de gaz naturel d’Europe, le champ de Groningue, d’ici octobre 2023. Comment cela affectera-t-il l’approvisionnement énergétique de l’Europe ? Business AM Radio a interrogé Moniek De Jong, chercheuse postdoctorale en politique énergétique à l’université de Gand.

Pourquoi est-ce important ?

Jusqu'à l'année dernière, l'Union européenne importait environ 40 % de son gaz naturel de Russie. Cependant, lorsque l'invasion de l'Ukraine a commencé, les décideurs politiques ont reçu un signal d'alarme. L'UE devait soudain réduire rapidement sa dépendance à l'égard des combustibles fossiles russes. Pour ce faire, elle s'est tournée vers les Pays-Bas, entre autres, comme fournisseur potentiel de gaz.

Que signifie l’arrêt de la production de gaz à Groningue pour l’approvisionnement en gaz en Europe ?

« En raison de la fermeture du plus grand champ gazier d’Europe, moins de gaz sera produit sur le continent. Bien entendu, la production de ce gisement de gaz de Groningue a été raisonnablement réduite au cours de la dernière décennie. À son apogée, il s’agissait de 54 milliards de mètres cubes. À la fin, nous ne parlions plus que de 5 milliards de mètres cubes. C’est vraiment une baisse importante. Cette fermeture représente donc, bien sûr, une perte d’environ 5 milliards de mètres cubes de gaz naturel. Mais il existe de nombreux autres gisements de gaz aux Pays-Bas, notamment en mer du Nord, où la production se poursuit. Mais en soi, cela ne signifie pas grand-chose. Parce que la production du champ de Groningue avait déjà été raisonnablement réduite. »

Nous ne le remarquerons alors pas immédiatement sur nos factures d’énergie non plus.

« Non, en effet, cela n’aura aucun impact sur la facture énergétique. Bien sûr, c’est quelque chose qui était prévu depuis dix ans, que, effectivement, cet approvisionnement serait inversé. Depuis, les Pays-Bas cherchent d’autres gisements de gaz pour répondre à cette demande. De nouveaux gisements de gaz ont de ce fait déjà été exploités et ils ne sont pas aussi grands que le gisement de Groningue. Mais ce champ était de toute façon en train d’épuiser sa production.

Il reste environ 450 milliards de mètres cubes de gaz naturel dans le gisement. Et cela, s’il fallait approvisionner toute l’Europe en gaz, suffirait pour un an. Et s’il devait remplacer la demande de gaz russe en Europe, nous parlerions de trois ans, si tout est extrait, au maximum. Quoi qu’il en soit, il s’agit également d’un producteur de gaz à court terme, s’il continue à fonctionner à plein régime.

Cela ne signifie pas encore que les factures vont augmenter. Le marché a pris en compte l’arrivée de cette fermeture.

Qui bénéficie réellement de la fermeture ?

« Ensuite, nous nous intéresserons surtout au GNL (gaz naturel liquéfié, NDLR) et à ses producteurs. L’Amérique et le Qatar ; ils peuvent en bénéficier. Ils vont donc effectivement exporter davantage vers les Pays-Bas. Nous avons déjà constaté que ces dernières années, ils exportent de plus en plus vers les Pays-Bas. Un terminal GNL a donc été ajouté dans le nord du pays à la fin de l’année dernière. »

En conclusion, le trésor public néerlandais ne subira-t-il pas une énorme perte de revenus ?

« Au total, elle a rapporté à l’État néerlandais 430 milliards d’euros au cours des 60 dernières années. Mais dans le budget du gouvernement néerlandais, la part de ces recettes s’était déjà passablement réduite. L’année dernière, par exemple, le rendement n’a été que de 2,6 milliards d’euros. C’est toujours une somme importante, bien sûr, mais cela représente environ 0,3 % du budget néerlandais, et ce ne sera alors plus vraiment une recette gigantesque. Cela inclut donc tous les autres champs de gaz que possèdent les Pays-Bas. »

RVW

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