Faire appliquer la quarantaine : le casse-tête des autorités

Le Premier ministre l’a annoncé haut et fort lors du dernier comité de concertation: toute personne qui reviendrait d’un séjour à l’étranger de plus de 48 heures doit observer une période de quarantaine de 10 jours. Reste le plus compliqué: faire appliquer la mesure.

‘S’il vous plait, ne voyagez pas‘, Alexander De Croo s’est montré insistant vendredi dernier à l’égard des éventuels projets de vacances des Belges. Lui et le ministre de la Santé Frank Vandenbroucke estiment que la situation sanitaire de la Belgique est bien meilleure qu’ailleurs sur le continent. C’est pourquoi ils poussent pour que chacun reste au pays durant les fêtes. Quiconque se rendrait à l’étranger durant plus de 48 heures devra observer une période de quarantaine de 10 jours et se soumettre à un test au bout de 7 jours. Cette personne ne pourra sortir de sa quarantaine sans un test négatif.

Il y a une seule exception pour échapper à cette quarantaine: il faut prouver, via le formulaire obligatoire, que toutes les précautions ont été prises lors de votre séjour à l’étranger. En d’autres mots, que vous vous soyez complètement isolé.

Chaque Région est tenue de préparer son plan de bataille pour faire appliquer la quarantaine. Au-delà des contrôles du formulaire à la frontière, comment savoir si les vacanciers observent bien leur période de quarantaine à leur retour?

Les bourgmestres: les bonnes poires ?

Durant le Comité de concertation, le ministre-président wallon Elio Di Rupo disait vouloir utiliser les bourgmestres: ‘L’idée qui se développe, et le parlement flamand a déjà pris attitude à cet égard, c’est de permettre à tous les bourgmestres, éventuellement via les gouverneurs, de faire appel aux CPAS, aux services de prévention, aux polices locales, à la fois pour aider les personnes qui sont en quarantaine (aider ceux qui sont seuls en faisant leurs courses ou en allant chercher des médicaments), mais aussi pour s’assurer et rappeler qu’être en quarantaine c’est rester quelque part et ne pas contaminer les autres. Ce sont donc ces mesures-là que nous allons travailler avec le gouvernement de Wallonie.’

Voilà pour l’idée générale. Mais concrètement, comment ça se passe ? ‘Il est encore trop tôt pour le dire’, explique le porte-parole d’Elio Di Rupo à Sud Presse. Mais cela passera de toute façon par le remplissage du formulaire de Localisation du Passager (PLF) dont les données seront transmises aux bourgmestres, puis aux CPAS et aux polices locales. En tout cas en principe.

Pour le moment, les call centers peuvent vous appeler à votre domicile pour vérifier votre présence. La police peut également effectuer une visite. Le tout peut déboucher sur une sanction, mais dans les faits, elle n’est jamais appliquée. L’impunité est donc totale, même pour ceux qui rempliraient le formulaire.

Police déjà surchargée

Du côté de la police, on estime déjà avoir assez de boulot. C’est aussi l’avis du bourgmestre de Namur et président du cdH Maxime Prévot, qui ne veut pas davantage surcharger sa policier locale. Il appelle chacun à se responsabiliser.

Du côté flamand, l’arsenal législatif a déjà été voté et donne de nouvelles prérogatives aux bourgmestres dans cette situation d’urgence. Mais la proportionnalité doit toujours s’appliquer, l’épisode des drones de surveillance à Genk, finalement recadrés, en est un exemple concret.

À Bruxelles, le centre de traçage Iriscare est chargé d’appeler les personnes à leur domicile. La police peut vérifier sur place le respect de la quarantaine. Mais là encore, dans les faits, il n’y a eu aucun contrôle. Aucun PV n’a été dressé. Pourtant, une amende de 500 euros et jusqu’à 6 mois de prison sont prévus. La police pourra maintenant disposer de toutes les informations provenant de l’Iriscare mais uniquement sur demande. Didier Gosuin (DéFi), bourgmestre d’Auderghem et actuel président de la conférence des bourgmestres à Bruxelles, est sur la même ligne que Maxime Prévot: ‘Je crois que la police a des missions plus importantes’estime Didier Gosuin sur BX1Et puis, on voit bien que les informations ne circulent pas. Depuis le début, en tant que bourgmestre, je ne sais pas s’il y a un cluster dans ma commune et où. Alors, aller vérifier que les personnes respectent leur quarantaine parce qu’elles sont allées une journée à l’étranger, c’est impossible.’

Une déclaration qui en dit long sur la gestion de la crise du covid-19 en Belgique. Derrière les intentions, il y a une application des mesures très laborieuse.

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