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Et si le spectre de la déflation nous revenait en pleine face ?

Et si le spectre de la déflation nous revenait en pleine face ?
Deflation – DANIEL SORABJI/AFP via Getty Images

Nous anticipons de trop, nous direz-vous. Et pourtant, la déflation est déjà une réalité en Chine. Et elle hantait les économies occidentales avant la crise du Covid. Alors, peut-elle revenir chez nous ?

Pourquoi est-ce important ?

Les banques centrales ont une peur bleue du "D-word" : la déflation. Pour la simple et bonne raison qu'elle est beaucoup plus difficile à briser que l'inflation, sur laquelle les coups de boutoir de la BCE et de la Fed ont commencé à produire leurs effets. Demandez au Japon : des décennies de plans de soutien auront plombé sa dette à plus de 200% sans avoir vraiment d'influence sur la déflation. La Chine fait face au même dilemme.

Dans l’actu : la Chine face à la déflation.

  • C’est maintenant une certitude : la relance chinoise n’est pas ce qu’elle aurait dû être. Les indicateurs manufacturiers déçoivent de mois en mois, la demande intérieure est en berne et les exportations sont plombées par la faible demande extérieure, c’est-à-dire nous.
    • À court terme, c’est une bonne nouvelle pour notre inflation. Mais à long terme, si la situation perdure, c’est une très mauvaise nouvelle pour l’économie mondiale qui fait toujours face au risque de récession.
  • Mais ce n’est pas tout : à l’inverse des économies occidentales, la Chine connait la déflation, c’est-à-dire une dépréciation des prix. Les prix de l’acier, du ciment et des produits chimiques chutent depuis des mois, écrit le Wall Street Journal.
  • Pour l’heure, les prix à la consommation sont restés stables, en progression d’à peine 0,2%, mais la faible demande a déjà des effets sur le prix du sucre, des œufs, des vêtements et des appareils électroménagers, qui ont tous connu une chute le mois dernier.
  • Les données publiées jeudi ont montré que les bénéfices industriels s’effondrent et que les prix moyens de vente des maisons neuves ont chuté en juin.

L’essentiel : agir sur la demande, le dilemme chinois.

  • La semaine dernière, le Politburo a annoncé une succession de plans pour booster chaque secteur en difficulté de l’économie, à l’instar de ce qui s’est fait aux États-Unis et en Europe après la période Covid. Pour l’heure, toutefois, on est toujours au stade des intentions.
  • La Chine hésite. Car Pékin est déjà lourdement endettée, tout comme les consommateurs et les entreprises qui y réfléchissent à deux fois avant d’emprunter et de dépenser. La crise immobilière qui se poursuit en Chine est dans toutes les têtes.
  • « La grande préoccupation est de savoir si les outils politiques dont ils disposent auront beaucoup de poids pour essayer d’éviter la déflation », a déclaré Eswar Prasad au journal américain, il est professeur d’économie à l’Université Cornell et un ancien chef de la division Chine du Fonds monétaire international.
  • Le parallèle avec le Japon est évident. Les années 90 ont été marquées par un effondrement des marchés boursiers et des valeurs immobilières. Cela a conduit les ménages et les entreprises à réduire leurs dépenses pour rembourser leurs lourdes dettes. Une politique accommodante des autorités et de la banque centrale du Japon n’y aura pas changé grand-chose. Les 3,2% d’inflation du mois dernier au Japon font figure d’exceptions sur les 30 dernières années.

De l’inflation à la déflation

La question : la déflation peut-elle revenir chez nous ?

  • L’inflation dans la zone euro est en perte de vitesse, à 5,3%, contre plus du double l’année dernière. Mieux : le risque de récession s’éloigne.
  • Le problème est que certains signaux – une baisse considérable du nombre d’emprunts des ménages et des entreprises – ne sont pas vus comme suffisants pour la BCE et Christine Lagarde, qui n’a pas exclu d’autres hausses des taux d’intérêt, même si une pause devait être décrétée en septembre.
  • Or, il faut généralement entre 12 et 18 mois pour observer clairement les effets de la politique des banques centrales sur l’économie réelle. La BCE a agi plus tard que sa consœur américaine. La pleine mesure de sa politique doit donc encore être observée. Le risque, c’est de tirer trop fort sur le frein à main, alors que les signes du ralentissement économique et de la baisse de l’inflation sont déjà là.
  • Un plus grand risque encore, c’est qu’on bascule de l’autre côté, celui de la récession et de la déflation ou celui, à peine meilleur, de la stagflation.
  • Après tout, la zone euro avait toutes les peines d’atteindre l’objectif des 2% entre la crise financière et la crise sanitaire. Le scénario ne peut pas être écarté, après 2024, quand la fièvre inflationniste sera passée.

Évolution de l’inflation sur les 10 dernières années – Crédit : ABC bourse.

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