Le clinquant émirat de Dubaï est frappé en plein cœur par la crise du coronavirus. Sa capitale du même nom surfe sur le travail et l’argent des expatriés, mais ceux-ci retournent de plus en plus souvent dans leur pays d’origine, faute de filets de sécurité pour résister à l’impact économique de la pandémie.
Les chiffres sont éloquents. Le bureau d’enquête Oxford Economics estime que les Émirats arabes unis, dont Dubaï fait partie, pourraient voir quelque 900.000 emplois partir en fumée. Un véritable uppercut pour un pays qui ne compte que 9,6 millions d’habitants.
Le plus problématique, c’est qu’un grand nombre de ces emplois sont occupés par des expatriés originaires du monde entier. Environ 90% des habitants de la ville de Dubaï sont des travailleurs étrangers. Ils peuvent gagner beaucoup d’argent dans la métropole, mais si leur emploi disparaît, ils ne peuvent compter que sur leurs économies pour s’en sortir. En effet, ils ne peuvent pas demander la citoyenneté émiratie, il n’y a pas de statut de résident permanent et par conséquent pas de système d’allocations de chômage sur lequel se rabattre.
Une grande partie des expatriés qui quittent les Émirats sont originaires d’Inde, du Pakistan et d’Afghanistan. Ce sont les travailleurs bon marché qui rendent possible la frénésie de construction mégalomane des émirs locaux. Mais plus haut sur l’échelle sociale, l’exode est également palpable. Et c’est là que l’impact sur l’économie de Dubaï se ressent le plus fortement. L’émirat estime qu’environ 10% de sa population est sur le point de partir au cours des prochains mois.
Dubaï possède un modèle économique qui repose entièrement sur une croissance permanente. Les expatriés qui gagnent bien leur vie sont la locomotive de toute une frange de la classe moyenne, des restaurants et boutiques de luxe aux écoles et cliniques privées. ‘Un exode de cette riche classe moyenne pourrait déclencher une spirale mortelle pour l’ensemble de l’économie’, déclare Ryan Bohl, analyste du Moyen-Orient, à Bloomberg.
Malgré toute une série de promesses de la part des autorités des Émirats arabes unis de mettre en place plus de garanties pour les expatriés dans le pays, les nombreux étrangers de l’État du Golfe se retrouvent pris entre le marteau et l’enclume. Reprendre ses billes et se retrouver au chômage dans son pays d’origine n’est pas un choix très intéressant, mais le coût de la vie à Dubaï a augmenté de façon alarmante ces dernières années.
En 2013, Dubaï était encore classée 90e dans la liste des villes les plus chères du monde par le cabinet de conseil Mercer. Entre-temps, la ville a bondi en 23e position. Dans pareil contexte, une personne qui se retrouve sans emploi – et sans revenu de remplacement – n’a souvent d’autre choix que de partir. ‘Dubaï, comme tout le Golfe Persique, vit aux crochets des expatriés. S’ils partent en masse, cela ne fera que renforcer le ralentissement économique provoqué par la crise du coronavirus’, prévient Ziad Daoud, économiste en chef pour les marchés émergents chez Bloomberg.