Des chercheurs canadiens créent une machine à dessaouler: elle aspire l’alcool du corps

Lorsqu’une personne est en état d’ébriété, les médecins ne peuvent pas y faire grand-chose. Le processus d’élimination de l’alcool est naturel et constant. Mais des chercheurs canadiens ont trouvé la parade en créant une ‘machine à dessaouler’.

Précisons-le d’emblée, cette innovation n’est pas destinée à permettre aux fêtards de boire de l’alcool toute la soirée puis de se ‘purger’ afin de reprendre le volant. Il s’agit d’un dispositif destiné au personnel médical, qui pourra être utilisé lorsqu’il fera face à une personne souffrant d’une intoxication alcoolique.

L’intoxication alcoolique n’est d’ailleurs pas toujours liée à un état d’ébriété. Elle survient généralement lorsque la concentration d’alcool dans l’air expiré dépasse les 0,22 mg/l. Dans des cas sévères, elle peut déboucher sur un coma éthylique et mener à de graves lésions au niveau du cerveau, du cœur ou encore des poumons.

Malheureusement, quand un patient est hospitalisé pour une intoxication alcoolique, les médecins doivent généralement se contenter de surveiller ses signes vitaux. Le processus de l’élimination de l’alcool étant naturel, ils ne peuvent pas l’accélérer. Et c’est là que l’invention des chercheurs de l’University Health Network (Toronto) trouve toute son utilité.

Comment ça marche?

Une grande partie de l’alcool présent dans le corps est éliminée via le foie. Mais les poumons ont aussi leur rôle à jouer. Lorsque le sang passe par la circulation pulmonaire, il est rechargé en oxygène frais. Une partie de l’alcool est expulsée avec le dioxyde de carbone. C’est à ce niveau que l’appareil va agir.

Le système mis au point par les chercheurs, baptisé ClearMate, va permettre au patient d’hyperventiler: respirer rapidement et profondément. En temps normal, hyperventiler est dangereux. Au bout de quelques minutes, cela peut provoquer un étourdissement, voire un évanouissement. Quand on hyperventile, on élimine le dioxyde de carbone trop vite: le corps n’a pas le temps de le remplacer. Or, la machine créée par les chercheurs canadiens permet d’hyperventiler en toute sécurité.

En pratique, on place un masque sur le visage du patient. Le système est relié à une bouteille contenent de l’oxygène et du dioxyde de carbone. Par conséquent, ClearMate permet d’assurer un équilibre optimal entre les deux gaz, tout en aidant la personne à expirer davantage d’alcool.

‘C’est un appareil très basique, de faible technicité, qui pourrait être fabriqué n’importe où dans le monde: ni électronique, ni ordinateur, ni filtres, ne sont nécessaires’, explique le Dr Joseph Fisher, membre de l’équipe de recherche. ‘Il est presque inexplicable que nous n’ayons pas essayé cela il y a des décennies’

Des premiers résultats prometteurs

A la base, cet appareil a été créé pour traiter les intoxications au monoxyde de carbone. En 2019, après voir fait ses preuves lors de multiples études, il a obtenu les autorisations nécessaires à sa commercialisation.

Vidéo explicative de l’utilité de ClearMate dans le traitement des intoxications au monoxyde de carbone

Cette année, l’équipe de chercheurs canadiens a eu l’idée de le tester pour soigner des intoxications alcooliques. Lors de l’étude pilote, ClearMate a été testé sur cinq individus. On leur a fait boire de la vodka deux jours de suite. Un jour, on a analysé le temps qu’ils mettaient pour éliminer l’alcool de manière naturelle. Le lendemain, on les a fait hyperventiler via ClearMate. En moyenne, les scientifiques ont constaté que l’appareil a permis aux individus d’éliminer l’alcool trois fois plus rapidement.

Bien sûr, ces premiers résultats doivent être consolidés par des études plus poussées. Néanmoins, l’équipe de chercheurs croit que ClearMate va bel et bien pouvoir être prochainement utilisé pour traiter des intoxications alcooliques, en plus des intoxications au monoxyde de carbone.

Petit bémol: on imagine mal comment un individu fortement alcoolisé pourrait respirer pendant une à plusieurs heure(s) – le temps nécessaire à faire passer le taux d’alcool dans le sang à un niveau non dangereux – avec l’appareil sur le visage. Dès lors, les scientifiques planchent déjà sur une autre version de leur appareil qui fonctionnerait par intubation.

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