La Chine entre officiellement en déflation, et ça pourrait bien durer : qu’est-ce que cela signifie ?

Pour la première fois depuis deux ans et demi, les prix à la consommation ont baissé en Chine. Le pays entre donc de facto en déflation. De quoi alimenter les appels au gouvernement pour qu’il mette en place davantage de mesures de relance.

Pourquoi est-ce important ?

Des prix à la consommation qui baissent, cela peut sembler être une bonne chose pour les consommateurs. Mais in fine, cela peut devenir très embêtant. Car si les prix reculent, c'est que la demande se tasse. Les entreprises diminuent alors leur offre, ce qui peut les mener à licencier des employés - ou du moins à ne plus embaucher. Elles peuvent également être tentées de proposer leurs produits à des prix encore plus faibles pour se défaire de leur stock, ce qui est mauvais pour leur rentabilité.

Les détails : la Chine entre en déflation.

  • L’indice des prix à la consommation en Chine a baissé de 0,3% en juillet (sur base annuelle).
    • Les prix de l’alimentation ont baissé de 1,7 %.
    • Les prix des légumes ont chuté de 1,5 %.
    • Les prix du porc (la viande la plus consommée) ont chuté de 26 %
    • Les prix non alimentaires sont restés stables.
  • L’économie chinoise tombe en déflation, un phénomène qu’elle n’avait plus connu depuis une courte période entre fin 2020 et début 2021.
  • L’indice des prix à la production – qui reflète le prix des produits à leur sortie de l’usine – a quant à lui chuté de 4,44% le mois dernier. Cela veut dire que les marges des entreprises sont réduites. Il en était déjà ainsi le mois dernier.
  • Autre indicateur du malêtre de l’économie chinoise : les exportations ont chuté de 14,5% en juillet, la plus forte baisse depuis la pandémie.

Les explications : c’était attendu.

  • En Chine, on ne se posait pas la question « Va-t-il y avoir une déflation ? », mais « Quand arrivera-t-elle ? », tellement l’économie est mal en point.
    • Le fait que cela se produise maintenant n’est pas une surprise. La plupart des analystes l’avaient prédit. Et ils s’attendaient même à une déflation plus prononcée (0,4-0,5%).
  • Cette déflation s’explique par une reprise post-Covid (très) décevante. Un marasme en partie causé par le crash du secteur immobilier, qui a longtemps représenté un quart du PIB chinois.
  • Les indicateurs manufacturiers déçoivent de mois en mois, la demande intérieure est en berne et les exportations sont plombées par la faible demande extérieure.
  • Si la précédente période de déflation avait été de courte durée, nombre d’analystes estiment que celle-ci pourrait davantage s’inscrire dans le temps.
    • « L’économie chinoise risque désormais sérieusement de sombrer dans un épisode déflationniste qui pourrait déclencher une spirale descendante auto-entretenue de la croissance et de la confiance du secteur privé », a ainsi commenté Eswar Prasad, expert en finance chinoise à l’Université Cornell, cité par le Financial Times.

La Chine peut-elle s’en sortir ?

Et maintenant : Pékin sommé d’agir.

  • Maintenant que la déflation est là, le gouvernement va recevoir encore plus d’appels à aider la relancer.
  • Les chiffres sont en effet bien éloignés des objectifs de Pékin, qui vise un taux d’inflation moyen de 3% au cours de 2023.
  • Fin juillet, les décideurs ont annoncé avoir préparé une série de mesures (détaillées ici) censées booster chaque secteur en difficulté de l’économie.
  • Reste à voir si Pékin, déjà lourdement endetté, osera vraiment sortir l’artillerie lourde ou si ce qu’elle proposera ne sera pas suffisant pour enrayer la spirale négative dans laquelle est engluée son économie.
    • Il faudra également s’assurer que les consommateurs et les entreprises y mettent du leur. Car avec le choc déclenché par la crise immobilière, chacun y réfléchit à deux fois avant d’emprunter et de dépenser.
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