Coup dur pour la rue de la Loi ? Meta envisage de supprimer les publicités politiques en Europe

Plutôt que se conformer à une future législation compliquée, les patrons de Meta envisagent d’interdire purement et simplement les publicités politiques sur les plateformes Facebook et Instagram.

Pourquoi est-ce important ?

La lutte contre la désinformation se joue en grande partie sur les réseaux sociaux. En son temps, Mark Zuckerberg avait déclaré ne pas vouloir devenir "un arbitre de la vérité". Mais devant la propagation des fausses informations et des contenus complotistes, le patron de Facebook avait fait suspendre la publicité politique lors des élections présidentielles américaines de 2020.

Le contexte : l’UE travaille sur une nouvelle réglementation pour encadrer la publicité politique sur les plateformes des géants du net.

  • Concrètement, l’UE veut que les Meta et autres Google soient plus transparents en matière de publicité politique, en affichant par exemple le coût des publicités, qui les a payées et combien de personnes ont vu le contenu.
  • La Commission européenne, le Parlement et enfin les Etats membres doivent se mettre d’accord sur un texte final d’ici le 5 juin. Si elle est adoptée, la nouvelle réglementation pourrait entrer en vigueur dès l’année prochaine.

La réponse de Meta : une interdiction pure et simple, plutôt qu’une adaptation compliquée.

  • « Les patrons de Meta envisage d’interdire la publicité politique en Europe », écrit le Financial Times ce jeudi. Le problème pour les plateformes est la largesse de la définition de ce qu’est « une publicité politique ».
  • Meta pense qu’il serait plus simple d’interdire la publicité politique. D’abord parce qu’elle n’intéresse que peu les utilisateurs, et que les revenus qu’elle génère sont minimes par rapport à ses autres ressources publicitaires. D’après les chiffres de Insider Intelligence, la publicité politique n’a rapporté « que » 800 millions de dollars aux États-Unis entre 2019 et 2021. Au total, Meta a génèré des revenus de 115,9 milliards de dollars pour ses publicités en 2022.
  • On comprend entre les lignes que cette menace de Meta est un moyen de mettre la pression sur les législateurs et le monde politique en général, qui voit la publicité en ligne comme un moyen de toucher un large public, à relativement peu de frais.

La Belgique : championne d’Europe.

  • Récemment, une enquête d’AdLens a fait la lumière sur les dépenses des partis politiques belges sur les réseaux sociaux, « semblables à des multinationales ».
  • En 2022, la N-VA a dépensé 1,7 million d’euros sur Facebook et Instagram, devant le Vlaams Belang (1,1 million) et le PTB/PVDA (695.000 euros).
  • « Les partis belges sont les plus grands dépensiers en Europe », constatait Reinout Van Zandycke, expert en communication politique. Et c’était déjà le cas en 2021. Cette année-là, dans le top 10 des politiciens européens ayant dépensé le plus sur Facebook, 7 sur 10 étaient Belges.
  • À l’époque, Bart De Wever était l’homme politique européen qui dépensait le plus sur Facebook et Instagram (225 411€). En 2022, il a laissé la place à Tom Van Grienken, le président du VB, qui a dépensé 363 623€ soit plus de 100 000€ que les 231 014€ dépensés par De Wever cette année.