Les deux plus grands mythes de ces dernières décennies sont en train de s’effondrer en Chine

La Chine, première puissance économique mondiale ? Cela n’arrivera peut-être jamais, et le pays se dirige vers un grand « plat » économique, analyse The Economist. À Pékin, on le sait sans doute, au risque de devenir nerveux.

Pourquoi est-ce important ?

La Chine est un tigre économique, c'est incontestable depuis de nombreuses années. Mais ce n'est pas pour autant que l'Empire du Milieu est à l'abri d'un grand changement de cap des vents dominants qui soufflent sur son économie, et elle pourrait manquer l'occasion de devenir la puissance dominante. Il n'est pas exclu que sa puissance connaisse un pic avant que ne s'amorce une stagnation voire un déclin, et celui-ci pourrait se révéler très proche.

La démographie

  • La Chine n’est plus le pays le plus peuplé au monde : elle a été détrônée par l’Inde. Et la démographie chinoise inquiète de plus en plus le gouvernement du pays, qui a besoin de bras.
  • Or, la productivité moyenne par travailleur n’augmente pas aussi vite qu’espéré avec l’automatisation, tandis que les moins qualifiés peinent dorénavant à trouver un travail. La Chine voit s’effondrer à la fois son mythe du plein emploi et celui de sa croissance infinie.
  • Avec l’augmentation de l’âge moyen de la population, dû tant à la faible natalité qu’à l’augmentation de l’espérance de vie, la Chine va devoir s’occuper de ses ainés. Une tâche qui va drainer des ressources et, encore une fois, détourner de la main-d’œuvre des objectifs de croissance.
  • Le parti unique (d’ailleurs largement aux mains d’une bande de sexagénaires) au pouvoir tente bien d’inverser la tendance avec des incitants à procréer, mais jusqu’ici rien n’y fait.

La puissance économique

La Chine voit les nuages noirs s’accumuler : les grands travaux d’infrastructure (routes, ponts, barrages, etc.) sont de moins en moins rentables pour l’État, d’autant plus que les grands chantiers de l’initiative Belt and Road sont loin d’être achevés. En partie d’ailleurs par manque de moyens : de nombreux pays ont dû s’endetter, et Pékin a d’ailleurs bien volontiers joué les bailleurs de fonds, mais c’est là un pari dangereux.

  • Les entreprises privées craignent les élans de répression de l’État central, comme sur le secteur de la tech ou celui des jeux vidéos, mais aussi de l’immobilier. Cela freine d’un coup sec la croissance de ces entreprises, mais aussi la capacité d’innovation du pays, fait remarquer The Economist.
  • Les tensions géopolitiques ont incité les entreprises étrangères à diversifier leurs chaînes d’approvisionnement, mais aussi à protéger davantage leur patrimoine économique et leurs brevets. On l’a vu avec le port de Hambourg en Allemagne, mais aussi avec la volonté américaine et taïwanaise, mais aussi européenne, d’empêcher Pékin d’obtenir les moyens d’améliorer la qualité de ses microprocesseurs.

Vers un grand ralentissement ?

Alors qu’on imaginait encore il y a peu la Chine devenir la nouvelle première puissance économique, il parait de plus en plus probable qu’elle se dirige vers une période de stagnation. Une théorie du « Peak China » popularisée par Hal Brands et Michael Beckley.

  • Ceux-ci craignent qu’une Chine qui se sent aux abois puisse devenir plus agressive, d’autant plus avec un budget militaire qui ne cesse d’augmenter, des ambitions nucléaires renouvelées, et Taïwan en ligne de mire.
  • Un statu quo reste, bien sûr, toujours possible et cette incertitude pourrait jouer en faveur de la paix, Pékin n’osant finalement pas lancer son offensive. Mais tout dépend au final du dirigeant chinois en place. Or, Xi Jinping est le tenant d’une ligne dure, et il a muselé toute contradiction interne.

« [Le pays] a atteint le point où il est suffisamment fort pour perturber agressivement l’ordre existant, mais où il perd confiance dans le fait que le temps joue en sa faveur. »

Extrait de l’étude de Hal Brands et Michael Beckley cité par The Economist
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