Les entreprises chinoises, cotées à la bourse de Shanghai ou de Shenzhen, peuvent désormais délivrer des GDR (certificats représentant leurs actions) à la bourse suisse. Quatre entreprises ont déjà sauté le pas, et une dizaine d’autres préparent leurs dossiers. A l’heure où le marché boursier des Etats-Unis devient de plus en plus difficile d’accès pour les entreprises chinoises, la Suisse pourrait se présenter comme une solution de financement étranger.
Entre le marteau et l’enclume. Les entreprises chinoises cotées à Wall Street vivent une double peine. D’un côté, le gendarme boursier américain, la SEC, veut leur faire passer un audit pour qu’elles puissent rester cotées. Le dernier exemple en date est le géant Alibaba, qui a été inscrit sur liste noire vendredi, avec une suppression de la cotation en 2024, si l’entreprise ne se soumet pas à l’audit d’ici là. Cet audit est une règle en place depuis 2020 et s’applique également à toute entreprise étrangère qui souhaite s’introduire en bourse aux Etats-Unis.
D’un autre côté, Pékin n’apprécie pas que Washington mette son nez dans les données de ses entreprises, et ferait pression pour qu’elles refusent d’être passées au crible. Elle rend aussi la vie dure à celles qui veulent trouver des financements à l’étranger, avec des audits sur la protection des données avant tout feu vert, ce qui prend du temps.
Dans l’état actuel des choses, la voie américaine semble se fermer, alors que la Chine est confrontée à un contexte économique difficile à cause des confinements mis en place durant ce printemps, qui ont fait stagner son économie au deuxième trimestre. Mais les entreprises chinoises qui veulent trouver des financements étrangers peuvent désormais se tourner prendre une autre voie : la Suisse.
« Feu vert rapide »
Un programme d’échange entre la bourse suisse (Switzerland 20) et les bourses de Shenzhen et Shanghai est entré en vigueur le 25 juillet. Le 28, quatre entreprises étaient déjà inscrites à la cotation, rapporte CNBC. GEM, Gotion High-tech, Keda Industrial Group et Ningbo Shanshan ont pu récolter l’équivalent de 1,5 milliard de dollars. Il ne s’agit pas d’une cotation classique, où les actions sont échangées directement, mais d’un échange sous forme de global depositary receipts (GDR), c’est-à-dire via des certificats qui représentent les actions cotées à une autre bourse (ici : Shanghai ou Shenzhen).
Cette forme de cotation est plus simple à mettre en place qu’une véritable double cotation. Ainsi, les entreprises chinoises ont reçu le feu vert du gendarme boursier chinois « en quelques semaines », explique Wang Hang de la société de consultance juridique Baker McKenzie, qui a accompagné les entreprises dans la préparation des dossiers. Selon lui, les procédés d’autorisation durent en moyenne plus longtemps, « entre plusieurs mois et une demi-année ».
Avant une double cotation
La porte ouverte par la Suisse intéresse en tout cas plus d’une entreprise chinoise désireuse d’obtenir des financements étrangers. Wang explique qu’au moins 13 entreprises chinoises ont déjà annoncé vouloir émettre leurs actions en Suisse, depuis l’annonce du programme d’échange en début d’année. D’autres l’ont prévu, mais ne l’ont pas encore publiquement indiqué.
Certaines ayant même entamé une réflexion pour faire une introduction en bourse à Hong Kong, le premier marché boursier étranger pour les entreprises chinoises (et souvent une solution de repli pour garder une double cotation à l’étranger, pour celles qui se retirent des États-Unis). Mais en voyant la solution d’émettre des GDR sur le marché boursier suisse, elles ont reporté leur introduction à Hong Kong, pour d’abord tenter l’aventure internationale en Suisse.
Reste à voir si ces premières entreprises feront mouche et si la Suisse pourra être la porte de secours pour les entreprises chinoises qui se verraient, dans l’état actuel des choses, interdire l’accès à Wall Street.