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La Banque nationale retape sur le clou de la compétitivité des entreprises : « Cela s’ajoute aux faiblesses structurelles de l’économie belge »

La Banque nationale retape sur le clou de la compétitivité des entreprises : « Cela s’ajoute aux faiblesses structurelles de l’économie belge »
Pierre Wunsch, gouverneur de la BNB. (Getty Images)

La Banque nationale indique dans son rapport annuel que les récentes fortes augmentations salariales pourraient entraîner un désavantage en termes de coûts pour nos entreprises exportatrices. « Nous devons être vigilants face à une perturbation durable de la compétitivité de la Belgique », estime-t-elle.

Pourquoi est-ce important ?

La formation salariale typiquement belge, avec ses indexations salariales automatiques, doit-elle être modifiée ? En tout cas, il est certain que les hausses de prix se traduisent, pour nos entreprises, par une augmentation des coûts salariaux plus rapide que dans les pays voisins.

Dans l’actu : la Banque nationale a publié son rapport le plus important : le rapport annuel sur l’économie belge. La bonne nouvelle est que notre économie a étonnamment bien résisté l’année dernière – grâce à un marché du travail solide – et a évité une récession. Mais il y a aussi des nuages d’orage qui s’amoncèlent au-dessus d’elle.

Citation : « Relativement peu de choses ont été faites pendant la crise pour relever les défis structurels de l’économie belge », souligne le gouverneur de la BNB, Pierre Wunsch. « J’ai l’impression de devoir vous dire la même chose chaque année ».

Il fait référence à deux problèmes chroniques : le déraillement des finances publiques et le trop faible nombre de personnes actives. « De plus, un défi s’est ajouté : le problème de l’affaiblissement de la compétitivité – que nous avions sous contrôle – est revenu. »

Problème 1 : le déraillement des finances publiques

  • Comme le Bureau du plan, la Banque nationale voit le déficit budgétaire s’établir à environ 5% du produit intérieur brut cette année et dans les années à venir. Insoutenable, estime Wunsch.
  • La dette publique atteindrait 110% du PIB en 2024, faisant de la Belgique l’un des plus mauvais élèves de la classe européenne.
  • « La faiblesse sous-jacente de la position budgétaire belge est liée à la croissance insoutenable des dépenses courantes à moyen terme », pointe la BNB du doigt.
  • Et aussi, ce n’est pas vraiment surprenant mais ça n’en reste pas moins inquiétant : « Le vieillissement de la population exercera une pression encore plus forte sur les finances publiques dans les années et décennies à venir. »

Problème 2 : pas assez de travailleurs

  • Alors que les entreprises quémandent du personnel, une trop grande partie de la population n’a pas l’ambition de travailler. En conséquence, l’État-providence belge doit s’appuyer sur une base très étroite, note également la Banque nationale.
  • Selon la BNB, 532.000 personnes employées supplémentaires sont nécessaires pour atteindre l’objectif du gouvernement – un taux d’emploi (proportion de Belges en âge de travailler qui ont un emploi) de 80%. Mais il n’y a actuellement que 462.000 demandeurs d’emploi.
  • « Même si tous les chômeurs trouvaient un emploi, nous n’atteindrions pas ces 80%. Ce qu’il faut pour cela, c’est que davantage de personnes inactives entrent sur le marché du travail. Pour cela, il faut accorder une attention particulière à certains groupes, comme les femmes ou les personnes peu qualifiées », ajoute Wunsch.

Problème 3 : l’affaiblissement de la compétitivité

  • Comme si ces deux défis structurels ne suffisaient pas, un troisième problème s’est ajouté, lié à une inflation historiquement élevée en 2022.
  • Le phénomène est bien connu : en raison des indexations automatiques des salaires, les coûts salariaux ont récemment augmenté nettement plus vite que chez nos voisins allemands, français et néerlandais, qui sont aussi nos principaux partenaires commerciaux.
  • La principale crainte est que cela nuise durablement à la position concurrentielle de la Belgique. « Il n’est pas certain que la perte de compétitivité liée aux coûts puisse être rattrapée au cours des années suivantes », écrit la Banque nationale. Il faudrait pour cela que les coûts salariaux augmentent moins vite dans notre pays que chez nos voisins, ce qui n’est pas acquis.
  • Deux facteurs permettent toutefois de relâcher un peu la pression, nuance Wunsch : dans nos pays voisins, les appels à des augmentations salariales plus importantes sont en hausse et les prix de l’énergie, qui jouent également un rôle dans la compétitivité, ont baissé récemment.
  • Toujours selon le gouverneur, la baisse de la compétitivité est l’une des raisons pour lesquelles la balance courante, qui mesure nos échanges avec l’étranger, s’est détériorée en 2022.
  • « En raison de la détérioration de la compétitivité des entreprises belges, la balance courante devrait rester sous pression dans les années à venir », prévoit le rapport annuel. « Cela signifie que, compte tenu de l’important déficit budgétaire, les investissements devront de plus en plus être couverts par l’épargne étrangère. Cela pourrait à terme accroître la vulnérabilité de l’économie. »

Une formation des salaires trop rigide ?

  • « À un moment donné, nous allons devoir revoir la formation des salaires », avance Wunsch. La réglementation actuelle offrirait trop peu de flexibilité : il n’est pas possible d’ajuster plus lentement les salaires en fonction des prix et de protéger ainsi la compétitivité.
  • Dans le même temps, il y a aussi trop peu de possibilités pour les entreprises ou les secteurs forts de proposer des augmentations de salaire supérieures à la moyenne, ajoute la Banque nationale.
  • « Très concrètement, cela rend plus difficile pour les entreprises de conserver et d’attirer du personnel en offrant de meilleures conditions salariales. Dans le même temps, les entreprises en difficulté ne peuvent pas réduire les salaires réels pour contribuer à absorber un choc négatif », résume la BNB.

(OD)

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