Le début d’une nouvelle « attaque hybride » – et d’un désastre humanitaire – orchestrée par Minsk et Moscou ?

À nouveau, des migrants apparaissent à la frontière entre la Lituanie et la Biélorussie. Détail macabre : certains n’auraient même plus de chaussures. Le président biélorusse Loukachenko – et derrière son mentor Vladimir Poutine – semble prêt à tout pour augmenter la pression sur la frontière orientale de l’UE.

Pourquoi est-ce important ?

Militairement, Vladimir Poutine est aux abois. Il semble d'autant plus prêt aux plans les plus sinistres pour faire céder la volonté de résistance ukrainienne - ou la solidarité européenne - avec l'aide de son seul véritable allié, le président biélorusse Alexandre Loukachenko. Des méthodes qui feront surtout des victimes civiles, comme les bombardements sur les villes, mais aussi un nouvel usage des migrants comme "armes".

Dans l’actualité : la ministre de l’Intérieur de Lituanie, Agnė Bilotaitė, alerte l’Europe contre une possible nouvelle vague de migrants rassemblés par la Biélorussie et envoyée aux frontières des pays baltes et de la Pologne pour mettre ces pays sous pression.

  • Selon la ministre, les gardes-frontière lituaniens ont repéré de nouvelles tentes du côté biélorusse de la frontière. C’est là que seraient rassemblés des migrants avant de les envoyer tenter de passer idéalement la frontière.
  • Détail macabre : ces migrants arriveraient pieds nus devant la frontière – largement clôturée. C’est sans doute une manière d’ébranler la résolution des gardes, mais il n’est pas clair s’il s’agit là d’un conseil donné aux migrants du côté biélorusse, ou si on leur prend purement et simplement ce qu’ils ont aux pieds avant de les envoyer vers la frontière.
  • Les migrants reçoivent un paquet d’aide composé de nourriture, de vêtements et de chaussures de la part des gardes-frontières lituaniens, mais « le fait qu’ils arrivent pieds nus n’est pas une raison pour les laisser entrer », maintient Agnė Bilotaitė.
  • Selon les gardes-frontières, neuf migrants ont déjà été hospitalisés en raison de leur état de santé. Plus de 10.000 personnes ont été arrêtées à la frontière depuis janvier de cette année, selon les données officielles.

Attaque hybride de l’usage des migrants comme armes

Le précédent : l’année dernière, à la même période, des centaines de migrants sont apparus aux frontières baltes et surtout polonaises en espérant entrer dans l’Union européenne. Peine perdue : ces pays ont solidement clôturé les zones frontalières et ont mobilisé leur armée respective pour empêcher toute entrée illégale.

  • Il s’est avéré que ces migrants – dont des familles entières, et beaucoup d’enfants – avaient été victimes d’une grande opération organisée par Minsk et vraisemblablement orchestrée depuis Moscou.
  • En envoyant ces gens vers des frontières où ils seraient inévitablement bloqués – en plein hiver et à travers la forêt – Poutine et Loukachenko espéraient tant mettre sous pression les pays concernés qu’éprouver les opinions publiques européennes. Le nombre de morts (de froids ou de blessures en tentant le passage) causé par ce qui fut qualifié « d’attaque hybride » reste inconnu.

L’enjeu : tenter une nouvelle attaque de ce type en utilisant des êtres humains comme munition juste maintenant est à la fois monstrueux et logique. C’est l’hiver, et la situation humanitaire pourrait vite devenir catastrophique aux frontières orientales de l’UE. En particulier alors que toutes les armées sont déjà sur le qui-vive face à une extension possible du conflit en Ukraine. En outre, les pays plus à l’ouest ont déjà ouvert leurs portes à de nombreux Ukrainiens.

Crise humanitaire et enjeux communautaires

  • Chez nous, certaines paroles commencent à se libérer sur la question de l’accueil des Ukrainiens ayant fui la guerre. « Nous sommes tendus jusqu’à la limite », a ainsi déclaré mardi Bart Somers, ministre flamand des Affaires intérieures.
  • Non pas qu’il appelait à leur refuser l’accueil, mais il estime que les différentes régions belges ne sont pas sur un pied d’égalité.
  • Sur les quelque 50.000 réfugiés ukrainiens inscrits au registre national, 29.705 sont enregistrés dans la Région flamande. La Flandre est donc proche des 60 % convenus avec les autres régions.
  • La Région de Bruxelles-Capitale, avec 19 %, est nettement au-dessus de son seuil de 10 %, mais la Wallonie, avec 21 %, reste bien en dessous des 30 % convenus, détaille le Brussels Time.
  • Dans un pays ou même l’accueil des réfugiés en temps de guerre peut devenir un enjeu communautaire, l’espoir qu’on vienne en aide à ceux qui meurent de froid aux frontières de l’UE reste bien mince.
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