Après le pétrole, l’Inde se convertit au charbon russe : ses importations ont doublé malgré les avertissements américains

Alors que l’Europe et les États-Unis font tout ce qui est en leur possible pour isoler diplomatiquement et économiquement la Russie, en Inde, la guerre fait les affaires. La plus grande démocratie du monde, qui n’a pas voulu condamner l’invasion russe de l’Ukraine, ouvre ses ports aux matières premières que brade Vladimir Poutine.

La Commission européenne a proposé la semaine dernière d’interdire le charbon russe dans le cadre d’une nouvelle série de sanctions contre Moscou, mais, de l’autre côté du monde, les importations indiennes de charbon en provenance de Russie ont bondi en mars pour atteindre des niveaux jamais vus depuis plus de deux ans, selon les données de la société d’information sur les matières premières Kpler. New Delhi, qui dépend fortement de ses importations pour assurer son approvisionnement énergétique, avait déjà sauté sur le pétrole que la Russie veut écouler à bas prix ; depuis le 24 février, l’Inde a déjà acquis 13 millions de barils de pétrole brut aux Russes. Soit presque autant que les 16 millions de barils achetés tout au long de l’année 2021.

70% de l’électricité indienne vient du charbon

Le gouvernement indien suit la même tendance pour l’or noir solide : les importations de charbon en provenance de Russie ont atteint 1,04 million de tonnes, soit le niveau le plus élevé depuis janvier 2020, a confirmé auprès de CNBC Matthew Boyle, analyste chez Kpler. Pas moins des deux tiers du volume de mars provenaient des ports russes d’Extrême-Orient, probablement après le début de la guerre fin février.

« Les marchés soupçonnent l’Inde et la Chine d’augmenter leurs importations de charbon en provenance de Russie, ce qui compenserait en partie l’impact d’une interdiction formelle de l’UE sur les importations de charbon russe », a déclaré Vivek Dhar, directeur de la recherche sur les produits miniers et énergétiques à la Commonwealth Bank of Australia, dans une note publiée la semaine dernière. Nous sommes d’ailleurs au delà de la pure suspicion, car le mois dernier, New Delhi a confirmé auprès de l’agence Reuters que L’inde allait doubler sous peu ses importations de coke russe afin de nourrir ses aciéries.

Avant le début de la guerre, l’Inde n’importait pas plus de 2% de son charbon depuis la Russie. Mais le pays reste fort dépendant au minerai : il est le deuxième consommateur mondial, après la Chine, et 70% de sa production électrique en dépend encore. Si Moscou peut fournir du charbon à bas prix, New Delhi ne va pas s’en priver.

La colère de Washington

Une décision qui, on s’en doute, ne plait guère à Washington, et les rumeurs de sanctions économiques se multiplient. L’administration américaine a averti que l’Inde subirait des conséquences importantes si elle s’alignait sur Moscou, selon certains rapports.

« Malgré les avertissements de l’Occident, l’Inde continue de s’appuyer sur sa chaîne d’approvisionnement avec la Russie pour les ressources naturelles comme le pétrole et le charbon », a déclaré Samir N. Kapadia, responsable du commerce au sein de la société de conseil en relations gouvernementales Vogel Group.

La Maison Blanche a tiré deux « coups de semonce » jusqu’à présent, faisant pression sur l’Inde pour qu’elle soit du « bon côté de l’histoire » et évite de s’aligner sur la Russie. Il n’y en aura probablement pas de troisième si cela persiste. » La nature de ces sanctions reste toutefois encore une inconnue.

Moscou cherche de nouveaux partenaires

Pendant ce temps, la Russie cherche de nouveaux clients dans le domaine de l’énergie, tant sur son territoire qu’à l’étranger, car les acheteurs réguliers de ses produits énergétiques cherchent refuge ailleurs ou réduisent leurs achats. Lors d’une réunion avec de hauts responsables, mercredi, le président russe Vladimir Poutine a reconnu que son pays, embarqué dans une guerre non déclarée en Ukraine, était confronté à de graves problèmes pour exporter.

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