Aligner les milliards est ‘la partie facile’, la sortie de crise sera plus difficile, prévient la BNB

Si un retour à l’équilibre budgétaire n’est pas envisageable avant plusieurs années, la Belgique ferait bien, une fois la reprise économique post-Covid réellement enclenchée, de revenir à un déficit de 3% du produit intérieur brut (PIB) ‘le plus rapidement possible’, afin de stabiliser la dette publique, recommande la Banque nationale dans son rapport annuel 2020.

Les conséquences économiques de la crise sanitaire et les mesures publiques de soutien adoptées pour maintenir l’économie à flot ont fait exploser le déficit public belge. De 1,9% du PIB en 2019, il est passé à 10,1% du PIB l’an dernier. La dette de l’ensemble des pouvoirs publics belges a augmenté dans la foulée pour atteindre 115,1% du PIB, soit 17 points de pourcentage de plus en un an. Une trajectoire qui pourrait s’avérer insoutenable si elle devait par trop se prolonger.

‘Il faut attendre que la reprise soit suffisamment solide’

‘Je ne plaide pas pour un assainissement des finances publiques tant que l’on n’est pas certain que la croissance est vraiment là’, déclare d’emblée le gouverneur de la BNB, Pierre Wunsch, reconnaissant qu’il faudra une trajectoire de 10 ans pour résorber entièrement le déficit public. ‘Mon message est qu’il faut attendre que la reprise soit suffisamment solide. Cela n’aurait aucun sens aujourd’hui d’assainir les finances publiques. Cela n’exclut même pas que des mesures de soutien supplémentaires soient prises, pour autant qu’elles soient temporaires et ciblées’, ajoute-t-il.

Mais, dit encore le gouverneur de la BNB, une fois la croissance revenue, il sera opportun de se fixer ‘un objectif intermédiaire’ et de ramener le plus vite possible le déficit à 3% du PIB. Un niveau qui permettrait de ‘stabiliser la dette publique’ belge, même si celle-ci augmentera encore dans un premier temps, et qui correspond en outre aux règles budgétaires européennes, actuellement mises entre parenthèses en raison de la pandémie.

Aligner les milliards, ‘la partie facile de la gestion de la crise’

Si le gouverneur ne s’inquiète pas trop de la dette contractée pendant la crise, car celle-ci est assortie de taux très faibles voire nuls, Pierre Wunsch ne voit pas forcément d’un bon oeil les dépenses primaires de la Belgique augmenter année après année. En 2000, elles atteignaient 42,7% du PIB et, selon les estimations, elles pourraient atteindre près de 59% en 2020. Une hausse inexorable qui n’est pas tenable, met-on en garde.

Le gouverneur attire encore l’attention sur le subtil équilibre qu’il faudra trouver lorsqu’il s’agira de mettre fin aux mesures publiques de soutien à l’économie. Un véritable travail d’équilibriste s’annonce entre ce soutien et la soutenabilité des finances publiques. Aligner les milliards d’euros pour aider les secteurs en crise s’apparente en fait ‘à la partie facile de la gestion de la crise’, l’exercice ‘d’exit’ s’annonçant, lui, plus difficile.

‘L’économie belge a montré une certaine résilience’

Bonne nouvelle tout de même: avec une contraction de 6,2% de son produit intérieur brut (PIB) en 2020, la Belgique a certes connu la plus grave crise économique depuis la Seconde Guerre mondiale, mais la contraction est finalement moindre que ce qui avait été craint dans un premier temps, ressort-il du rapport annuel de la BNB dévoilé jeudi soir.

‘C’est une baisse du PIB unique dans notre histoire mais c’est moins mauvais qu’attendu. A un certain moment, on s’attendait à ce que la chute soit de 8%, voire de 9 à 10%. Finalement, c’est -6’, a souligné le gouverneur de la Banque nationale de Belgique.

Le Belgique a fait moins bien que les Pays-Bas (-4,3% du PIB) ou l’Allemagne (-5,5%) mais mieux que la moyenne européenne (-7,3%) et que certains de ses voisins comme la France (-9,3%) ou la Grande-Bretagne (-10%).

Selon Pierre Wunsch, ‘l’économie belge a montré une certaine résilience’ face à la crise sanitaire. Après le premier confinement, l’économie a rebondi au troisième trimestre. Le second confinement n’a pas trop fait souffrir l’économie belge, à l’exception notable de certains secteurs martyrs comme l’horeca, visés par des mesures de fermeture. Et ‘le quatrième trimestre n’a pas été si mauvais. Nous sommes un des rares pays à avoir connu une croissance positive.’

Ce qui rend la situation actuelle unique, c’est que la crise économique est due à un choc externe, la pandémie de Covid-19, et non à de grands déséquilibres économiques, comme cela a été le cas lors de la grande crise financière de 2008-2009. ‘Cela conduit à un certain optimisme d’un retour assez rapide au niveau de PIB d’avant-crise. Il y a d’ailleurs l’exemple positif de la Chine.’

‘C’est une crise unique, complètement atypique, qui a été plutôt bien gérée. On a pu éviter un effondrement total de l’économie. Ce n’était pas si évident au début de la crise’, conclut le gouverneur de la BNB.

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