L’Italie compte plafonner le prix des billets d’avion, Ryanair dénonce une mesure « digne de l’URSS de 1927 »

Le torchon brûle entre Ryanair et le gouvernement italien. Ce dernier veut – et sauf retournement de situation, va – plafonner le prix des billets des vols entre les îles (Sicile et Sardaigne) et le continent. La Commission européenne va s’emparer du dossier.

Pourquoi est-ce important ?

A priori, au sein de l'Union européenne, c'est la libre concurrence qui fait loi dans la détermination du prix de nombreux services. Y compris ceux des vols d'avion. En plafonnant ceux-ci, l'Italie pourrait créer un précédent.

Dans l’actu : malgré la colère de Ryanair, Meloni persiste et signe.

  • Cette semaine, le gouvernement italien a approuvé une mesure visant à plafonner le prix des vols entre les îles italiennes et le continent.
  • Le patron de Ryanair, la compagnie aérienne la plus concernée par ces vols, est furieux.

« Même à Poudlard, ils ont compris comment fonctionne le marché »

Les détails : à quoi ressemble la mesure ?

  • En période de pointe, Ryanair a pour habitude de faire exploser le prix des vols qui relient la Sicile et la Sardaigne au continent italien. Jusqu’à 830% plus élevés que la moyenne, selon un récent calcul du Corriere della Sera. Une pratique qui ne convient pas au gouvernement Meloni.
  • Pour éviter que la compagnie low cost ne poursuive cette politique, l’exécutif italien a approuvé lundi une mesure visant à plafonner le prix de ces billets. Cela doit se faire via une interdiction de l’utilisation des algorithmes permettant à Ryanair de faire fluctuer ses prix en fonction du nombre d’internautes se renseignant sur les vols lors de certaines périodes.
  • L’objectif est d’empêcher Ryanair de faire dépasser de 200% le prix des vols des périodes les plus plébiscitées par rapport au tarif moyen. Comme le précise Politico, la façon de calculer ce « prix moyen » reste toutefois relativement floue à l’heure actuelle.

Les réactions : le patron de Ryanair n’en revient pas.

  • Ces derniers jours, le CEO de Ryanair a multiplié les sorties incisives pour critiquer la mesure. Dans un communiqué, Eddie Wilson l’a qualifiée « d’illégale ».
  • Selon lui, la mesure aura des « conséquences imprévues ». Dans les colonnes de La Repubblica, il a expliqué qu’un plafonnement pousserait sa compagnie à réduire le nombre des vols entre les îles et le continent italiens et à lorgner d’autres destinations. « Moins de vols et moins de sièges aériens entraîneront une augmentation des prix, pas leur baisse », a-t-il prévenu.
  • Très en colère, le patron de la compagnie irlandaise a aussi usé de comparaisons peu flatteuses pour évoquer le gouvernement Meloni.
    • « Savez-vous qui a essayé de fixer les prix au lieu de suivre le marché ? L’Union soviétique en 1927. Et ça n’a pas marché. Même à l’école Harry Potter, ils ont compris qu’il fallait augmenter l’offre d’un produit pour que les prix baissent », a-t-il ironisé.
    • Quant aux algorithmes que Ryanair utiliserait, il s’agit, selon lui, « d’une théorie du complot basée sur l’imagination de personnes qui n’ont pas assez de travail à faire ».
  • Jeudi, le ministre du Made in Italy lui a répondu sans sourciller.
    • « Ryanair a besoin de bons conseillers en droit commercial, quelqu’un qui comprenne le marché car au fil des années, ils ont montré une certaine impatience vis-à-vis des règles du marché », a commenté Adolfo Urso auprès de TgCom24, rappelant que la compagnie à bas coût a été sanctionnée onze fois ces dernières années par l’autorité de la concurrence et du marché.
    • Il a également assuré que la mesure de son gouvernement était conforme à la règlementation européenne.

Bruxelles réclame des informations supplémentaires

Et maintenant : le parlement italien… et la Commission européenne.

  • Maintenant que le gouvernement Meloni a approuvé la mesure, la Chambre des députés italienne a deux mois pour lui donner son feu vert à son tour, après avoir éventuellement soumis des amendements.
  • Dans le même temps, le dossier va tout de même être examiné par la Commission européenne. Ce jeudi, son porte-parole a indiqué avoir demandé à l’Italie qu’elle lui fasse parvenir davantage d’informations sur la mesure.
    •  Si Bruxelles soutient généralement « les mesures visant à promouvoir la connectivité à un prix abordable, conformément aux règles du marché intérieur de l’UE », c’est « la concurrence durable avec la libre fixation des prix qui est généralement le meilleur garant de prix abordables », a-t-il signalé.
  • En théorie, l’UE laisse les autorités publiques réguler le prix de certains vols. Ceux desservant des destinations assez isolées, généralement. Avec des centaines de vols organisés rien que pendant la haute saison estivale, la Sardaigne et la Sicile ne semblent pas entrer dans ces critères.
    • Selon le gouvernement Meloni, il n’y a toutefois « pas d’alternative de marché adéquate » pour les vols depuis et vers la Sicile et la Sardaigne. Or, fait-il valoir, les règles européennes préconisent que « l’État intervienne lorsque le citoyen est soumis à une action qui ne répond pas aux règles du marché »
    • Reste à voir si les justifications apportées par Rome convaincront Bruxelles.

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