Vers un second « moment Evergrande » en Chine ? Le secteur immobilier vacille à nouveau

Le secteur de l’immobilier chinois ne s’est jamais remis de l’affaire Evergrande, le second plus grand promoteur, rattrapé par ses montagnes de dettes. Voilà qu’un autre pourrait suivre, tandis qu’un troisième se retrouve en plein scandale de corruption. Les marchés retiennent leur souffle.

Pourquoi est-ce important ?

Il y a deux ans, le deuxième promoteur immobilier de Chine, Evergrande, s'est retrouvé en défaut de paiement. Grandie trop vite et atteinte d'une fièvre de la construction rapide, l'entreprise avait contracté des dettes se comptant en milliards de dollars. Un château de cartes qui n'est pas passé loin de s'effondrer complètement, causant la panique dans le secteur et une vague de troubles toujours rare en Chine.

Deux ans après Evergrande, la Chine entre-t-elle dans une seconde phase de bulle immobilière prête à éclater ? Country Garden, l’un des plus grands promoteurs actifs, aurait manqué deux paiements de coupons sur des obligations en dollars qui étaient dus dimanche. Des dettes qui courent respectivement jusqu’en février 2026 et août 2030, relève Reuters. La société n’a pas encore présenté de plan de paiement de ces dettes.

  • Les actions de Country Garden cotées à Hong Kong ont clôturé en baisse de plus de 1,7% mercredi, après de fortes baisses plus tôt dans la semaine.
  • Les ventes de l’entreprise ont baissé de 39% par rapport à l’année dernière ; c’est là la pire performance de l’année parmi le secteur immobilier chinois, du moins jusqu’à présent.
  • Country Garden est classé 147e dans la liste Fortune Global 500 et 28e dans la version chinoise, et employait plus de 100.000 personnes en 2019.

Un modèle à bout de souffle

Plus inquiétant encore : le conglomérat chinois Wanda Group, regroupant des activités liées au tourisme, à l’hôtellerie et au cinéma, a vu son vice-président senior Liu Haibo emmené par la police ce jeudi, suite à une enquête interne de l’entreprise pour corruption, signale CNBC. L’entreprise n’a pas encore fait de communiqué officiel. Cela fait deux magnats chinois du béton sous les radars en très peu de temps, alors que l’ensemble du secteur ne s’est toujours pas remis de la crise. En que l’économie chinoise tout entière ne se porte pas au mieux.

« Avec une baisse des ventes totales de logements en Chine au premier semestre 2023 par rapport à l’année précédente, des prix des logements en baisse d’un mois sur l’autre ces derniers mois et une croissance économique vacillante, une autre défaillance de promoteur (et une très grande à cela) est peut-être la dernière chose dont les autorités chinoises ont besoin en ce moment »

Sandra Chow, co-directrice de la recherche pour l’Asie-Pacifique chez CreditSights (Fitch Ratings), citée par CNBC

Une confiance qui a disparu

  • Malgré le soutien du gouvernement chinois – qui, à l’époque, semblait avoir voulu punir Evergrande avant de s’effrayer des conséquences possibles -, le marché immobilier chinois va mal, alors qu’avec ses industries connexes, il représente un quart de l’économie chinoise.
  • En Chine, traditionnellement, on paie pour des appartements qui n’ont pas encore été construits. Mais Evergrande a changé la donne, et les clients sont bien moins enclins à payer dans les temps, ayant vu de nombreux immeubles n’être jamais achevés – voire détruits avant. « Avec cette confiance vacillante, le secteur immobilier privé restera probablement un frein à la croissance du pays pour le reste de l’année », estiment les analystes du Rhodium Group dans une note publiée cette semaine.
  • Pour soulager le secteur, le gouvernement pourrait alléger les restrictions imposées sur les ventes d’appartements durant la crise précédente. Au risque de faire augmenter l’offre alors que la demande ne suit pas.
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