L’économiste Erik Joly s’exprime sur les prévisions du FMI sur la chute des taux d’intérêt : « Je pense que cela prendra du temps »

Le FMI prévoit une baisse des taux d’intérêt jusqu’aux niveaux d’avant-crise. Erik Joly, économiste en chef chez ABN Amro, commente cette prévision pour Business AM.

D’abord la nuance :

  • « Le FMI parle de ce que l’on appelle le ‘taux d’intérêt neutre’. Il s’agit d’un nom technique pour désigner un taux d’intérêt auquel l’économie croît à un rythme tel qu’il ne provoque pas d’inflation », explique Joly.
  • Or, le niveau ne fait pas l’unanimité : « Si vous mettez trois économistes dans une pièce et que vous leur demandez ce que sera le taux d’intérêt neutre dans un avenir prévisible, vous obtiendrez quatre opinions différentes. Je pense qu’il faut d’abord considérer le très court terme. Personnellement, je pense que cela prendra un certain temps (avant que les taux baissent vers ce niveau neutre, NDLR). »
  • C’est qu’à court terme, les taux vont encore augmenter, continue-t-il. Autant aux États-Unis que dans la zone euro.
    • Aux États-Unis, on s’attend à une nouvelle hausse des taux d’intérêt de 25 points de base lors de la prochaine réunion de mai, pour atteindre un niveau de 5,25 %.
    • Pour la zone euro, deux autres hausses de taux, de 50 et 25 points de base respectivement, sont attendues. Cela ramènerait les taux d’intérêt à 3,75%.

À partir de quand peut-on alors s’attendre à une réduction des taux ?

  • « Je pense que pour la zone euro comme pour les États-Unis, la réduction des taux d’intérêt à court terme sera amorcée d’ici la fin de l’année ou au début du premier trimestre 2024. »
  • Reste à voir à quel niveau le taux sera finalement considéré comme « neutre ». Selon le FMI, ce serait au niveau d’avant-crise, c’est-à-dire quand les taux étaient proches de zéro. L’institution monétaire justifie sa prévision par le faible taux de croissance dans la décennie à venir. L’économie doit alors être boostée par les taux d’intérêt favorables, les mêmes qui ont créé l’inflation.

Bonne nouvelle

Le détail : quel effet d’une baisse des taux ?

  • « Une détente des taux d’intérêt est tout simplement une bonne nouvelle. C’est une bonne nouvelle pour les entreprises car elles peuvent se financer à des conditions plus favorables et c’est une bonne nouvelle pour le secteur immobilier« , estime Joly.
    • L’économiste rappelle le mal que peuvent faire les taux élevés à l’immobilier : « Au cours de la période 1978-1983, les prix nominaux de l’immobilier se sont détériorés chaque année. En termes réels, l’immobilier belge a même perdu 40 % de sa valeur durant cette période. La cause en est justement la hausse extrême des taux d’intérêt au cours de cette période ».
  • Mais ce ne serait pas que bénéfique pour les entreprises et l’immobilier. « C’est également une bonne nouvelle pour les gouvernements et leurs dettes. Ceux qui ont dû dépenser de très grosses sommes d’argent ces derniers mois et ces dernières années pour contenir toutes sortes de crises, d’abord la crise sanitaire, puis l’impact de la guerre en Ukraine », ajoute l’expert.

(CP)

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