Pour la première fois de son histoire, Netflix a fait savoir mardi que son nombre d’abonnés avait baissé au cours du premier trimestre. Le géant du streaming annonce la couleur: il compte bien déployer les grands moyens pour rebondir.
Ce mardi, Netflix a déclaré avoir perdu 200.000 abonnés au premier trimestre. La plateforme en compte désormais 221,64 millions. Une première depuis la naissance du service.
Si Netflix a vu son chiffre d’affaires augmenter de 10% en un an (7,9 milliards de dollars) grâce à une augmentation du nombre d’abonnés sur un an (+6,7%) et à une hausse de ses tarifs, l’entreprise a dégagé moins de bénéfices nets: 1,6 milliard lors du premier trimestre 2022, contre 1,7 milliard lors du premier trimestre 2021.
Conséquence immédiate: l’action Netflix a chuté de près de 25% mardi après la clôture de Wall Street. Depuis le début de l’année, cette baisse est de 40%.
L’entreprise est loin d’être dans sa meilleure forme. Elle a même prévu de perdre 2 millions d’abonnés supplémentaires au deuxième trimestre de cette année.
Guerre en Russie et partage des comptes
Netflix explique en partie cette perte historique d’abonnés par la guerre en Ukraine et la suspension de son service en Russie.
« La suspension de notre service en Russie et la diminution progressive du nombre d’abonnés payants russes a entraîné une perte nette de 700.000 abonnements. Sans cet impact, nous aurions eu 500.000 abonnements supplémentaires », a indiqué la firme dans un communiqué.
En outre, Netflix a ressorti une vielle rengaine: le partage des comptes serait particulièrement néfaste pour ses chiffres. Dans sa lettre trimestrielle aux actionnaires, rapporte CNBC, Netflix a reconnu avoir délibérément autorisé cette technique parce que cela avait contribué à rendre les utilisateurs accros au service. La société estime qu’aujourd’hui, plus de 100 millions de foyers dans le monde utilisent probablement un mot de passe partagé. Face à une concurrence toujours plus féroce, trop, c’est trop.
« Notre pénétration relativement élevée des ménages – si l’on tient compte du grand nombre de ménages qui partagent des comptes – combinée à la concurrence, crée des vents contraires à la croissance des revenus », a déclaré Netflix dans sa lettre. « Le partage de compte en tant que pourcentage de nos membres payants n’a pas beaucoup changé au fil des ans, mais, associé au premier facteur, cela signifie qu’il est plus difficile d’augmenter le nombre de membres sur de nombreux marchés – un problème qui a été occulté par notre croissance de Covid. »
Système de sanction financière élargi
Face à ce constat, Netflix a annoncé son intention de sévir. Ce n’est bien sûr pas la première fois que le géant du streaming annonce qu’il va sanctionner ses abonnés qui partagent leur mot de passe, mais cette fois, c’est du très sérieux.
Depuis le mois dernier, une nouvelle fonctionnalité est d’ailleurs testée au Costa Rica, au Pérou et au Chili. À partir du moment où un abonné donne son mot de passe à des personnes extérieures à son foyer, il doit payer une note plus salée. L’utilisateur sanctionné a la possibilité d’éjecter lui-même les personnes auxquelles il a partagé son compte. À moins que, bien sûr, celles-ci ne se décident à s’abonner à leur tour, auquel cas leur historique de visionnage, leur liste de visionnage et leurs recommandations personnalisées – chacun basé sur les programmes visionnés en profitant du compte « ami » – seront transférés sur leur compte propre.
Netflix a annoncé que ce système de sanction va continuer d’être testé pendant environ un an, le temps d’étudier le surcoût idéal à faire payer aux fraudeurs. La fonctionnalité va également être testée sur d’autres marchés que les trois cités ci-dessus. À terme, elle devrait débarquer dans tous les pays.
Abonnement moins cher, avec de la pub
Si cette première mesure risque de faire grincer pas mal de dents chez les utilisateurs, une autre, potentiellement plus attrayante, pourrait être dégainée. Dans une interview accordée à Business Insider, le co-PDG de Netflix, Reed Hastings, a ouvert la porte à une nouvelle formule d’abonnement, moins chère. En contrepartie, l’abonné serait contraint de voir des publicités entre (voire pendant ?) ses programmes.
« Ceux qui ont suivi Netflix savent que je me suis opposé à la complexité de la publicité et que je suis un grand fan de la simplicité de l’abonnement », a-t-il expliqué. »Mais autant je suis un fan de cela, autant je suis un plus grand fan du choix du consommateur, et permettre aux consommateurs qui voudraient avoir un prix plus bas et qui sont tolérants vis-à-vis de la publicité d’obtenir ce qu’ils veulent a beaucoup de sens. »
« C’est une question que nous examinons actuellement et que nous tenterons de résoudre au cours des deux prochaines années. Mais considérez que nous sommes tout à fait ouverts à l’idée de proposer des prix encore plus bas avec la publicité comme un choix du consommateur », a ajouté Hastings. « Il est assez clair que cela fonctionne pour Hulu. Disney est en train de le faire. HBO l’a fait. Je ne pense pas que nous ayons beaucoup de doutes sur le fait que cela fonctionne ».
Pour l’instant, le co-PDG de Netflix ne s’est pas avancé sur le prix d’un éventuel abonnement avec de la publicité. Mais vous l’aurez compris: cette alternative semble plus que jamais envisageable, la continuelle hausse des tarifs étant elle aussi une des explications à la perte d’abonnés de l’entreprise au premier trimestre.