La crise énergétique est loin d’être terminée : les prix de l’électricité s’envolent après que la France a réduit ses prévisions de production d’énergie nucléaire

Les prix de l’électricité en Europe se sont envolés après qu’EDF, le plus grand producteur d’énergie nucléaire du continent, a abaissé son objectif de production nucléaire pour la deuxième fois en un mois. La prévision de production nucléaire pour 2022 a été abaissée de 300-330 térawattheures à 295-315 térawattheures, comme prévu précédemment. Selon EDF, cette réduction est liée à des contrôles de sécurité sur ses réacteurs.

Pourquoi est-ce important ?

Les réacteurs d'EDF constituent l'épine dorsale d'un système électrique européen de plus en plus intégré. Mais la flotte devient de moins en moins fiable en raison de longues périodes de maintenance planifiée et non planifiée. Les récentes pannes d'électricité ont exacerbé la crise énergétique de l'Europe, alors que les tensions entre la Russie et l'Ukraine sont vives et que les flux de gaz naturel du plus grand pays du monde vers le continent s'amenuisent.

EDF (Électricité de France, l’entreprise détenue en grande partie par l’État français, ndlr) a laissé entendre que sa production nucléaire pourrait tomber cette année à des niveaux jamais vus depuis 1990. Cette pénurie a parfois contraint la France à importer de l’électricité. Les pays voisins, qui ont l’habitude de compter sur le géant français du nucléaire pour assurer l’alimentation en électricité, sont donc confrontés à des difficultés d’approvisionnement. C’est ce qu’écrit l’agence de presse Bloomberg.

Problèmes liés aux réacteurs

  • EDF a déclaré que la production nucléaire devrait tomber à 295 et 315 térawattheures en 2022, contre une prévision antérieure de 300 et 330 térawattheures.
  • La compagnie énergétique s’est également vantée que ses nouvelles prévisions de production étaient liées à des problèmes de corrosion connus ou suspectés dans 11 réacteurs.
    • Trois réacteurs – Chinon 3, Bugey 4 et Cattenom 3 – ont fait l’objet d’arrêts non planifiés.
    • Plus récemment, une fuite d’huile a mis hors service la centrale nucléaire de Tricastin.
    • Les différentes pannes de réacteurs vont peser sur les revenus du géant français du nucléaire.
    • Le rachat de 15 térawattheures d’électricité aux prix actuels coûtera à EDF 2,1 milliards d’euros (2,4 milliards de dollars), soit 8 % de la capitalisation boursière de la société, note Ahmed Farman, analyste chez Jefferies Group.
  • Les prix de l’électricité allemande pour l’année prochaine, une référence européenne, ont augmenté de 4,7 % pour atteindre 147 euros par mégawattheure, tandis que le contrat de mars a grimpé de 5,5 %. Le contrat français pour l’année prochaine a augmenté de 7 % pour atteindre 162 euros, son niveau le plus élevé jusqu’à présent en 2022.

La banque d’affaires Morgan Stanley affirme également dans un rapport qu’il existe une « probabilité significative » qu’une réduction de la production soit également prévue en 2023. Une annonce à ce sujet pourrait suivre la publication des résultats d’EDF dans le courant du mois.

« Inquiétude pour l’hiver prochain »

La dernière fois que la production nucléaire de la société est passée sous la barre des 300 térawattheures remonte à plus de trente ans.

« Lorsque l’objectif est proche ou inférieur à 300 térawattheures, c’est inquiétant pour l’hiver prochain en termes d’offre et de demande », a déclaré à Bloomberg Emeric de Vigan, PDG de la société française d’analyse de l’énergie COR-e.

Les analystes affirment que le ralentissement de la production d’énergie nucléaire encourage l’utilisation d’un plus grand nombre de centrales à combustible fossile. Cela fait grimper le prix des quotas de carbone, qui approchent pour la première fois les 100 euros par tonne.

« Le prix élevé du carbone a un impact direct sur les prix de l’électricité car il n’y a pas d’alternatives à la production de charbon et de gaz à court terme. Dans les périodes où l’énergie nucléaire et les énergies renouvelables ne peuvent pas répondre à la demande, le charbon et le gaz déterminent effectivement les prix de l’électricité », décrit Fabian Rønningen, analyste chez Rystad Energy, cité par Reuters.

Action

Les actions d’EDF ont chuté jusqu’à 3,5 % à Paris, mais se sont ensuite redressées pour ne baisser que de 2 %. Depuis décembre, elle a subi une perte étonnante de 40 %, rapporte l’agence de presse Reuters.

« Nous pensons que ces annonces nuisent au sentiment sur le titre et peuvent encourager les investisseurs à attendre plus longtemps avant de revenir sur le nom », ont écrit les analystes de Morgan Stanley dans leur rapport.

La France a été le plus grand exportateur net d’électricité en Europe au cours du second semestre de l’année dernière, envoyant l’équivalent de 10 % de sa demande à l’étranger, selon le consultant industriel Enappsys.

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