Partant du principe que notre civilisation finira un jour – et peut-être très bientôt – par disparaître, une équipe de scientifiques a décidé de documenter l’ensemble des périls environnementaux auxquels nous faisons et allons faire face. Le tout sera condensé dans une « boîte noire », à destination des survivants.
L’université de Tasmanie, en collaboration avec l’agence de marketing Clemenger BBDO et le collectif artistique Glue Society, est occupée à mettre sur pied le projet Earth’s Black Box. A l’image des boîtes noires des avions, qui enregistrent toutes sortes de données et qui permettent souvent d’expliquer les causes d’un crash, cet outil doit permettre aux générations futures (s’il y en a) de comprendre pourquoi notre civilisation a disparu.
Car oui, les scientifiques participant au projet pensent que notre civilisation va s’éteindre. A moins que l’on « transforme radicalement notre mode de vie« , préviennent-ils sur leur site web.
Une œuvre incassable installée au milieu de nulle part
Concrètement, cette boîte noire s’assimilera, en apparence, à une oeuvre d’art. Il s’agira d’une installation en acier de 7,5 cm d’épaisseur, de la taille d’un gros bus. Elle est vouée à être indestructible.
La construction sera remplie de disques durs alimentés par des panneaux solaires, chacun d’entre eux documentant et préservant un flux de mises à jour et d’analyses scientifiques en temps réel sur les problèmes les plus sombres auxquels le monde est confronté.
L’appareil collectera:
- Des données scientifiques sur la température des terres et des mers, l’acidification des océans, les taux de CO2, l’extinction d’espèces, les changements d’utilisation des terres, etc.
- Des éléments tels que la population humaine, les dépenses militaires et la consommation d’énergie.
- Des données contextuelles telles que des titres de journaux, des publications sur les réseaux sociaux et des informations sur des événements clés sur le changement climatique, tels que les COP.
« La Boîte noire de la Terre enregistrera chaque pas que nous faisons vers cette catastrophe. Des centaines de compilations de données, de mesures et d’interactions relatives à la santé de notre planète seront collectées en permanence et stockées en toute sécurité pour les générations futures », résument les créateurs du projet sur leur site.
L’installation prendra place en Tasmanie, au milieu de nulle part, dans un lieu considéré comme géologiquement stable. Elle sera située entre les petites villes de Strahan et de Queenstown, dans l’ouest de l’île, à quatre heures de route de Hobert, sa plus grande ville. Un emplacement suffisamment éloigné pour offrir une certaine isolation contre le sabotage, mais suffisamment accessible pour ceux qui veulent voir la structure.
Pas uniquement un objectif de mémoire
Si le but affiché est donc bien d’enregistrer et de documenter le délitement de notre civilisation et de notre planète, les acteurs du projet espèrent aussi (et sans doute surtout) avoir un impact sur le présent.
« L’idée est que si la Terre s’effondre à cause du changement climatique, cet appareil d’enregistrement indestructible sera là pour que ceux qui restent puissent en tirer des leçons », explique Jim Curtis, directeur exécutif de la création chez Clemenger BBDO, au média australien ABC. « Il est également là pour demander des comptes aux dirigeants – pour s’assurer que leur action ou inaction est enregistrée ».
« Quand les gens savent qu’ils sont enregistrés, cela a une influence sur ce qu’ils font et disent », a confirmé Jonathan Kneebone, de Glue Society. « C’est notre rôle de faire résonner quelque chose dans l’esprit de tout le monde. »
Certains détracteurs diront que le projet sombre dans l’alarmisme climatique et qu’il s’agit davantage d’un coup de pub que d’un réel travail scientifique. Néanmoins, il a le mérite d’attirer encore un peu plus l’attention sur un problème qui concerne l’ensemble de l’humanité.
L’Earth’s black box aura la capacité de stocker des données pour les 30 à 50 prochaines années. Elle devrait être opérationnelle à partir de 2022.