Les présidents chinois et américains se sont entretenus au téléphone au sujet du problème taïwanais. Joe Biden se veut optimiste, mais les deux campent sur leur position. Et sur l’île, la tension monte : le ministre de la Défense considère que la Chine se sentira prête à attaquer d’ici trois ans.
Après plusieurs mois de tensions, le président Joe Biden a annoncé s’être entretenu directement avec son homologue chinois Xi Jinping par téléphone. Et selon l’Américain, cela s’est plutôt bien passé: » J’ai parlé à Xi et nous sommes d’accord, nous allons nous conformer à l’accord sur Taïwan. Nous avons été clairs sur le fait que je ne pense pas qu’il doive faire autre chose que de respecter l’accord. »
Biden fait ici référence à l’accord sur Taïwan entre la Chine et les États-Unis, par lequel ces derniers reconnaissent le principe de nation chinoise unie et indivisible au profit de Pékin plutôt que de Taipei, ainsi qu’au Taiwan Relations Act qui conditionne cette reconnaissance à une résolution pacifique du conflit entre les deux pays qui se réclament de la Chine légitime et unie. Pour la Chine toutefois, c’est là un signe que les USA ne s’opposent pas de front à son objectif de réunion des deux pays sous un même drapeau, Taïwan n’étant vu que comme une « province rebelle ».
Harcèlement aérien
Une déclaration qui fait figure de posture d’apaisement entre Pékin et Washington, alors que les tensions montent dans le détroit de Taïwan : rien que cette semaine, c’est plus d’une centaine d’aéronefs de l’Armée populaire de Libération (APL) chinoise qui ont été détectés dans la zone d’identification des défenses aériennes taïwanaises. Des provocations à répétition qui fait sérieusement craindre à la nation insulaire une invasion imminente. Et qui servent sans doute à tester, voire saturer, les capacités de défense des Taïwanais.
Horizon 2025 : la guerre
L’annonce de la reprise du dialogue entre Xi Jinping et Joe Biden a été saluée par la diplomatie américaine, qui y voit un premier pas en avant sur un chemin qui sera, certes, semé d’embûches. Mais à Taïwan, le ton n’est pas à l’optimisme. Le ministre de la Défense de l’île, Chiu Kuo-cheng, assure qu’une tentative d’invasion n’est plus qu’une question d’année: « D’ici 2025, la Chine abaissera le coût et l’attrition d’une telle attaque au niveau le plus bas. Elle en a la capacité aujourd’hui, mais elle ne déclenchera pas une guerre aussi aisément, tant la Chine doit prendre en compte des éléments extérieurs. » Des éléments tels que la position du président américain, par exemple.
La présidente de Taïwan, Tsai Ing-wen, campe sur des positions farouchement autonomistes, tout en argumentant que l’ile étant de facto une nation indépendante, elle n’a pas à déclarer son indépendance. Ce qui serait un casus belli certain envers la Chine. Ce mardi, la présidente a rappelé que son pays ne serait pas « aventuriste » face à la menace de conflit, mais qu’il se défendrait par tous les moyens. Néanmoins son ministre de la Défense fait part de son inquiétude face aux manœuvres chinoises, qui pourraient très bien provoquer une perte de sang-froid au dessus du détroit. « Pour moi, en tant que militaire, l’urgence est juste devant moi » résume M. Chiu.
Nation très militarisée où le service militaire est toujours de mise, Taïwan renforce ses capacités de défense ces dernières années. Face à une Chine largement supérieure en nombre, le pays a opté pour une défense en « porc-épic » qui doit rendre toute tentative d’invasion bien trop coûteuse à l’ennemi pour qu’il s’y risque.
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