Le thorium serait-il le carburant d’avenir pour le secteur nucléaire ? C’est en tout cas le pari que fait l’Empire du Milieu. Le thorium semble à la fois plus sûr, et moins aisé à convertir en armes atomiques.
Le thorium a été découvert en 1829 par le chimiste suédois Jöns Jacob Berzelius, et celui-ci a nommé ce métal en l’honneur de Thor, le dieu nordique de la foudre et du tonnerre. Et nom très pertinent, car cet élément chimique nous offrira peut-être la prochaine grande révolution énergétique. La Chine envisage de bâtir une centrale nucléaire qui ne fonctionnerait pas avec le classique uranium-235, mais avec du thorium en guise de carburant. Un minerai bien moins rare sur Terre.
Plus sûr
Ce réacteur fonctionnera avec une combinaison de thorium liquide et de sels fondus. Une méthode expérimentale qui offre de nombreux avantages sur le nucléaire traditionnel : en cas de fissure, les sels se resolidifient très vite au contact de l’air, créant une gangue autour du thorium et l’empêchant de s’écouler. Ce qui rendrait impossible une catastrophe du type de celle de Tchernobyl, où le magma radioactif a failli atteindre les eaux souterraines, ce qui aurait dévasté encore plus la région.
Le thorium serait aussi moins dommageable pour l’environnement en temps normal. Là où un réacteur à uranium-235 produit des déchets fortement radioactifs comme le plutonium, qui doivent être stockés sous de grosses couches de plomb et qui restent toxiques durant des dizaines de milliers d’années, le thorium se dégrade en sels de fluorure, et en déchets dont la demi-vie ne dépasse pas 500 ans. Il est même possible d’obtenir ainsi de l’uranium-233, non seulement utilisable pour produire de l’énergie, mais en plus capable de se décomposer lui-même en thorium, et ainsi d’obtenir en théorie un cycle énergétique complet.
Inutile dans une bombe
Autre défaut de l’uranium : un réacteur destiné à la production d’énergie produit des déchets qui sont parfaitement utilisables pour faire des bombes, comme le fameux plutonium, ou tout simplement l’uranium-235 lui-même. C’est tout simplement impossible avec un réacteur au thorium, ce métal étant bien moins réactif, ce qui trace une frontière nette entre le nucléaire civil et les usages militaires, tout en supprimant aussi tout risque de voir des déchets nucléaires détournés pour armer des bombes atomiques « sales ».
Ces différents avantages ont convaincu le gouvernement chinois de bâtir une première centrale. Celle-ci devrait entrer en fonction en 2030. Elle sera construite dans la province du Gansu, à proximité de la ville de Wuwei. Une zone désertique de Chine centrale. Car, autre avantage, le thorium se passe très bien des grandes quantités d’eau nécessaires pour refroidir une centrale ordinaire.
Ce n’est là qu’un début : cette centrale sera la première d’une longue série, si cette technologie est au point. La Chine envisage même de construire 30 autres centrales au thorium dans des pays partenaires de son réseau d’influence « Belt and Road« . Le nucléaire au service du soft power chinois, donc.
Pour aller plus loin: