Après avoir proposé des conditions ‘vertes’ pour l’achat de titres, la présidente de la Banque centrale européenne, Christine Lagarde, veut créer des prêts à long terme ‘verts’ avec un taux inférieur à zéro. Mais l’idée est loin de faire l’unanimité dans le Conseil d’administration.
Le principe se base sur des prêts déjà existants, les TLTRO, les targeted longer-term refinancing operations. Ce programme propose des prêts à long terme aux banques, avec un taux inférieur à zéro, pour des crédits aux entreprises ou aux ménages. L’idée de Christine Largarde est de garder le même principe, mais conditionné à des investissements respectueux de l’environnement.
Christine Lagarde n’a jamais nié ses convictions sur une BCE avec des objectifs plus verts. Le mois dernier, elle s’était dite ‘très heureuse’ de voir les représentants de l’organisation l’écouter. Mais dans les faits, tous les collaborateurs ne se montrent pas aussi enthousiastes, explique le média Bloomberg. Jens Weidmann, président de la Bundesbank, Piet Christiansen de Danske Bank et Isabel Schnabel, membre du Conseil d’administration, entre autres, y sont farouchement opposés.
Leur argumentation est assez simple : ce n’est pas le rôle de la BCE, mais celui des gouvernements. ‘Je considère la lutte contre le changement climatique comme une tâche du siècle qui doit être accélérée. Cependant, la politique monétaire n’a aucun rôle dans sa structuration, tout comme elle n’a aucun rôle dans la politique industrielle ou la politique de distribution’, a déclaré Katharina Utermohl, d’Allianz Europe.
Selon Christiansen, même si la proposition reste louable, il y a vraiment peu de probabilités qu’elle soit vraiment utile. Pour Weidmann, la présidente de la BCE va trop loin dans ses objectifs verts. Il considère que la banque centrale européenne a un seul gros objectif sur lequel il faut se concentrer: la stabilité des prix. Et les projets ‘verts’ de Lagarde pourraient faire détourner l’organisation de sa ligne de conduite.
Point de vue technique
Isabel Schnabel et d’autres fonctionnaires ont un avis beaucoup plus technique sur ce projet. Ce dernier est, selon eux, relativement compliqué à mettre en place. Pour pouvoir déterminer qui a le droit ou non à un prêt, la BCE doit définir précisément ce qui est considéré comme un financement durable. Cette définition est déjà discutée avec la Commission européenne, mais les institutions sont encore loin d’avoir trouvé un consensus clair. ‘Pour le moment, ce ne serait même pas faisable, je dirais. En outre, cela soulèverait des problèmes opérationnels’, explique Schnabel. L’économiste allemande n’a, semble-t-il, rien contre le principe de prêts verts, mais elle estime que cela ne pourra pas être envisagé avant au moins un an.
En outre, les banques nationales devraient aussi s’adapter à ce nouveau programme, car actuellement, il n’y a pas de données collectées sur le caractère écologique des projets financés. Pour avoir accès à ces prêts ‘verts’, les banques devront également estimer quels projets entrent dans les critères de la BCE. La Banque centrale devra, de son côté, créer un système de vérification.