Dans son allocution lundi soir, Emmanuel Macron a réitéré l’idée d’une application permettant de tracer le coronavirus. En pratique, elle alerterait en cas de contact potentiel avec une personne contaminée. Encore faut-il inciter la population à l’utiliser, et possiblement perdre une partie de liberté.
C’est une polémique qui fait rage de l’autre côté de la frontière, avant sans doute de s’inviter chez nous. ‘Stop Covid’, comme son nom l’indique, aurait pour but d’endiguer la pandémie de coronavirus. Sa méthode: le traçage numérique pour contrôler l’évolution de l’infection et prévenir d’éventuelles nouvelles vagues. Pour l’instant, elle n’en est qu’aux ‘si’ et ‘peut-être’. Mais sa possible existence est déjà remise en question.
‘Il ne faut négliger aucune piste, aucune innovation, mais je souhaite que, avant le 11 mai, nos assemblées puissent en débattre et que les autorités compétentes puissent nous éclairer’, a déclaré le président français à propos de cette application. ‘Cette épidémie ne saurait affaiblir notre démocratie ni mordre sur quelque liberté’, a-t-il rassuré. Mais les travaux actuels, menés avec ‘avec certains de nos partenaires européens’, font bien émerger une ‘application numérique dédiée sur la base du volontariat et de l’anonymat’.
Alerte automatique
Volontaire et anonyme, donc, le secrétaire d’Etat au Numérique Cédric O l’avait déjà affirmé samedi, indiquant qu’elle présenterait toutes les garanties en matière de respect de la vie privée et des normes RGPD.
‘Lorsque deux personnes se croisent pendant une certaine durée, et à une distance rapprochée, le téléphone portable de l’un enregistre les références de l’autre dans son historique. Si un cas positif se déclare, ceux qui auront été en contact avec cette personne sont prévenus de manière automatique’, a-t-il expliqué. L’application serait basée sur la communication Bluetooth pour conserver l’anonymat.
Une carotte ?
Mais pas de quoi rassurer les citoyens, visiblement. Les Français tiennent à leur liberté symbolique, certains députés l’ont bien compris. L’eurodéputé LREM Stéphane Séjourné estime pour sa part qu’il est ‘faux de penser que Big Brother peut nous sauver’ et que le contact tracing ‘revient à admettre que les régimes autoritaires sont mieux armés que les démocraties pour répondre à la crise’.
Outre ce spectre du despotisme brandi en drapeau rouge vif, une autre question demeure, celle du caractère volontaire de cette application. Car si l’on n’oblige pas la population à l’utiliser, comment s’assurer qu’elle voudra suffisamment s’y plier de son plein gré pour permettre son fonctionnement? Grâce à l’âne et la carotte.
‘Pour faire monter le taux d’adhésion [au ‘tracking’], il faut une carotte. Il faut dire: tous ceux qui téléchargeront l’application seront prioritaires le jour où on aura des tests de sérologie qui permettront de déconfiner ceux qui sont immunisés’, indique l’éditorialiste de BFM TV Christophe Barbier. Avant d’ajouter tout de même: ‘ce n’est peut-être pas très moral de procéder ainsi’. Trop tard, la patate chaude est lancée.
Et chez nous?
En Belgique aussi, une application de tracing est envisagée pour se préparer au mieux au déconfinement. ‘Le principe de tracer, de contacter les personnes qui ont été en contact avec une personne positive est l’un des éléments nécessaires dans le cadre de ce déconfinement. Depuis de nombreuses semaines, nous instiguons de nombreuses pistes’, indiquait le 10 avril le porte-parole du centre interfédéral sur le Covid-19, Emmanuel André.
‘Ces technologies devront s’accompagner de toute l’infrastructure nécessaire’, a-t-il ajouté, et ‘le jour où cela sera nécessaire, ce sera probablement l’un des outils que nous aurons à disposition’. Nous sommes prévenus.
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