La banque coopérative en devenir NewB a réussi à lever 35 millions d’euros auprès de plus de 70.000 investisseurs. Le projet peut donc se poursuivre. Mais il reste à savoir si cela suffira pour bâtir une banque viable.
NewB, le projet d’une banque éthique en construction depuis 2011, est satisfait du résultat de la campagne de collecte de fonds. Le compteur a terminé mercredi autour du montant de 35 millions d’euros. Cela signifie que NewB remplit la condition pour demander une licence d’établissement de crédit.
Le plus grand défi pour le président Bernard Bayot et le CEO Tom Olinger est maintenant de convaincre la Banque nationale et la Banque centrale européenne d’accorder une telle licence à NewB. Une fois la licence obtenue, NewB espère pouvoir démarrer à partir de mai 2020 avec trois produits de base destinés aux particuliers: un compte courant, un compte d’épargne et des prêts verts.
Cependant, le buiness plan est très discutable.
Problème 1: Un modèle de revenus dépassé
NewB veut faire de la banque de manière classique: collecter l’épargne et l’utiliser pour octroyer des prêts. Ce modèle de rémunération traditionnel à lui seul est remis en question depuis un certain temps déjà par les taux d’intérêt historiquement bas et les profonds bonds en avant vers des taux d’intérêt négatifs. Il devient de plus en plus difficile pour les banques de profiter des écarts entre les taux d’intérêt entrants et sortants.
La plupart des banques tentent de compenser cette situation en générant d’autres sources de revenus, telles que les commissions sur les fonds de placement ou les commissions sur les services bancaires. NewB devra également chercher ces revenus si elle veut sortir du rouge.
Problème 2: Pas de proposition de vente unique
NewB veut se profiler comme une banque coopérative éthique. Cependant, il existe déjà une banque éthique, Triodos. Pour les étrangers, une coopération entre les deux est évidente, mais ces dernières années, les relations ont été froides.
Il existe également plusieurs banques belges ayant une approche coopérative, dont des acteurs majeurs tels que KBC/CBC Argenta et Crelan. Et puis il y a Belfius. Si cela dépendait d’un large éventail d’organisations non gouvernementales et de syndicats, cette banque contrôlée par le gouvernement aurait une tâche qui, à première vue, serait très similaire à celle de NewB.
Il n’est pas exclu que des sympathisants utilisent NewB principalement comme deuxième banque.
Problème 3: Trop petite
La taille limitée de NewB est peut-être la plus grande ombre au tableau du projet. Une échelle suffisante est nécessaire pour faire face aux coûts exorbitants des technologies de l’information et de la réglementation.
Plus de 70.000 particuliers ont participé à l’opération de collecte. Avant le début, NewB comptait 52.000 coopérateurs. Cela indique que NewB peut compter sur plusieurs dizaines de milliers, voire plus de 100.000 clients.
Dans son business plan, le projet bancaire vise l’ouverture de 108.000 comptes courants d’ici fin 2024. Cela peut sembler beaucoup, mais cela reste limité pour une banque. Cela correspond à une part de marché de 0,69 %, car il y a 15,8 millions de comptes courants belges.
Autre point de comparaison: la caisse d’épargne Argenta compte 1,44 million de clients en Belgique.
Problème 4: Le train des fintech est déjà parti
Les quatre grandes banques belges (BNP Paribas Fortis, KBC, Belfius et ING) travaillent depuis des années au développement technologique de nouveaux services, tels que les applications tout-en-un pour smartphones avec services non financiers.
Les acteurs non financiers, comme Cake, préparent également une offensive dans les mois à venir. Les experts sont sceptiques quant à la capacité de NewB à contrer cette avalanche fintech.
Problème 5: Outsider
Le grand scepticisme des milieux bancaires belges à l’égard de NewB est également lié à un aspect humain. La plupart des banquiers considèrent NewB comme un projet d’ONG extérieur au secteur.
Cette position d’outsider peut nuire à NewB, car de plus en plus de banques belges nouent des alliances pour réduire conjointement les coûts, comme la récente joint-venture de quatre banques belges et de Bpost pour gérer conjointement les distributeurs de billets.
Le projet bancaire n’a pas non plus réussi à attirer un nom établi comme Ethias ou P&V, des assureurs à vocation coopérative. Pour son offre d’assurance, NewB s’est associé à l’assureur français Monceau, inconnu en Belgique.
Pour NewB, ‘rester en dehors du système’ est également une question de principe. Dans son prospectus, elle indique qu’elle ‘n’a pas l’intention d’utiliser les marchés financiers pour se financer’ et ‘ne souhaite pas recourir à des organismes extérieurs via le marché bancaire interbancaire ou via un financement important’.