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Le Hamas au combat : pourquoi l’une des meilleures armées du monde n’a pas intérêt à sous-estimer son ennemi

Le Hamas au combat : pourquoi l’une des meilleures armées du monde n’a pas intérêt à sous-estimer son ennemi
Des membres de la brigade Izz al-Din al-Qassam le bras armé du Hamas, avec leur puissance de feu en 2021. (Photo by Yousef Masoud/SOPA Images/LightRocket via Getty Images)

Le Hamas n’est pas un simple groupuscule terroriste, mais un mouvement politique qui dispose d’une armée nombreuse et entrainée. Depuis 2014, celle-ci a eu tout le temps de faire de Gaza une forteresse urbaine ; un dangereux piège pour Tsahal, qui a bien conscience du danger.

Pourquoi est-ce important ?

Le Hamas n'est pas une milice comme les autres. Ce mouvement a atteint le rang de "techno-guérilla". Un "pire des deux mondes" dans lequel un mouvement armé non étatique met en œuvre des moyens technologiques de pointe, sur le champ de bataille comme dans la guerre informationnelle. Un vrai défi pour une armée régulière, même aussi bien équipée et entrainée que Tsahal.

Dans l’actualité : l’armée israélienne semble avoir pris pied dans la bande de Gaza. Après toute une série de raids testant les défenses du Hamas, les chars israéliens semblent tenir des positions au nord-est de Gaza.

Le Hamas a appris des guerres passées

L’armée israélienne n’était plus intervenue au sol dans la bande de Gaza depuis 2014, en représailles à des tirs de roquettes. En 49 jours de combat, elle a perdu 66 soldats. Assez pour que le Hamas proclame cela comme une victoire, en comparaison aux deux morts israéliens de l’opération précédente, en 2012, bien qu’elle n’avait duré que sept jours de combats au sol.

  • Le Hamas avait en fait radicalement changé sa méthode de combattre, et visiblement les Israéliens ne s’y attendaient pas. Il dispose d’une véritable infanterie entrainée, avec ses arsenaux et ses souterrains sécurisés, un réseau surnommé « le métro de Gaza ».
  • Le mouvement considéré comme terroriste a surtout acquis un arsenal varié et efficace, vraisemblablement avec l’aide de l’Iran. Outre les bombes artisanales et les roquettes bas de gamme, mais tirées en masse, le Hamas dispose de vrais missiles antichars portant à plusieurs kilomètres, rappelait Michel Goya dans une analyse du conflit de 2014. Mais aussi de fusils de précision lourds, capables de frapper au-delà des murs israéliens, avec un poste de tir suffisamment haut.
  • On n’a pas affaire à quelques combattants mal rasés qui brandissent des kalachnikovs. Mais à une véritable armée organisée, forte en 2014 de sans doute 10.000 soldats auxquels il faut ajouter autant de combattants occasionnels et de miliciens des autres mouvements. Et ils ont l’avantage du terrain.
  • Aujourd’hui, selon Tsahal, le Hamas compte jusqu’à 40.000 combattants et possède un arsenal de drones et d’environ 30.000 roquettes. 8.500 auraient déjà été tirées, épuisant ainsi les munitions des systèmes intercepteurs israéliens, qui ont dû être ravitaillés par l’armée américaine.

L’avantage est à la défense

L’avantage de la défense préparée sur l’attaque est une vieille règle de la guerre. C’est d’autant plus vrai dans un milieu urbain dense, face à un ennemi qui a préparé et piégé le terrain. La puissance de feu écrasante d’une armée moderne – et Tsahal compte parmi les plus redoutables au monde – ne suffit jamais à annuler cet avantage.

« Le Hamas a été formé par « les meilleurs du métier » (le Hezbollah libanais et les Gardiens de la Révolution iraniens, NDLR). C’est aussi une organisation apprenante qui a combattu les forces israéliennes à plusieurs reprises. Le Hamas connaît très bien son terrain et le défendra farouchement et avec ingéniosité. »

Emile Hokayem, directeur de la sécurité régionale à l’International Institute for Strategic Studies à Londres, cité par le Financial Times

Bataille urbaine

  • De toute évidence, le Hamas était sur le pied de guerre avant la riposte de l’État hébreu. On ne mène pas un raid en profondeur chez l’ennemi sans s’attendre à une riposte. Même s’il reste possible que les miliciens aient « outrepassé » leur objectif en se livrant à de véritables massacres, en plus de prendre des otages.
  • Reste que selon les informations des renseignements américains, une cellule militaire au sein de l’organisation a pris l’initiative de l’attaque sans en informer la branche politique. Une manière de provoquer les événements qui ne manque pas de surprendre. Voici en tout cas le Hamas et Israël embarqués dans une guerre qui ne peut plus être de courte durée.
  • Tsahal promet d’aller jusqu’au bout, cette fois. Difficile toutefois pour l’armée israélienne de supporter des pertes sur la durée. Le Hamas, lui, peut considérer toute victoire à la Pyrrhus comme une grande défaite de l’État hébreu. Et il s’en est vraisemblablement donné les moyens. Côté israélien, les réservistes ont été mobilisés à côté de l’armée en service, pour la première fois depuis 1973.
  • Nous allons assister à un siège urbain qui va vraisemblablement rappeler celui de Falloujah par les troupes américaines, en Irak en novembre-décembre 2004. Dans tous les cas, la guerre sera longue, et le bilan très lourd – surtout pour les civils des deux camps. Il se peut que le bilan soit déjà plus lourd.
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